The Last of Us (HBO) | Épisodes 6 & 7

Toutes les deux semaines, nous nous retrouvons pour l’analyse des nouveaux épisodes de The Last of Us, série produite par HBO. Vous pouvez d’ailleurs (re)découvrir les articles sur les épisodes 1, 2 et 3, 4 et 5, sur le blog. Aujourd’hui, penchons-nous sur les épisodes 6 et 7, non sans spoilers.

Épisode 6 : « Kin »

Cheminement dans le jeu

Le sixième épisode de The Last of Us débute par un flash-back, remontrant la fin de l’épisode précédent. Toutefois, le montage est différent et bien plus fidèle au jeu original. Après la mort d’Henry, l’écran devient brutalement noir. Cela amène une ellipse temporelle, car Joël et Ellie vont faire un bout de route avant d’arriver à leur prochaine destination. On constate que l’hiver a débuté. L’épisode 6 est une adaptation des chapitres 7 et 8 du jeu vidéo. Dans celui-ci, Joël conduit Ellie au barrage hydroélectrique, avant de découvrir que son petit frère Tommy y a élu domicile. Joël aide le groupe à défendre le barrage face à une horde d’humains armés jusqu’aux dents. Après quoi, Ellie apprend que Joël souhaite la confier à Tommy. La jeune fille décide ni plus ni moins de fuguer. Joël et Tommy enfourchent chacun un cheval afin de partir à la recherche d’Ellie, qu’ils retrouvent dans un ranch. C’est là qu’Ellie confie à Joël qu’elle a peur d’être abandonnée et qu’il rétorque qu’elle n’est pas sa fille. S’ensuit une nouvelle séquence de gunfights, car dans The Last of Us, on n’est jamais tranquilles. Joël change finalement d’avis et conduit lui-même Ellie à la faculté, dans une séquence plus longue que dans la série. L’exploration de l’université est relativement dense, car certains bâtiments abritent des infectés et mêmes des colosses. Le duo finit par comprendre que les Lucioles ont déserté les lieux. Malheureusement, une armée d’hommes les attaquent et suite à une mauvaise chute, Joël a la hanche empalée. C’est donc à Ellie de l’extraire de cette épineuse situation. Maintenant que nous avons fait un rappel du cheminement dans le jeu, une évidence apparaît. De nombreux passages ont été coupés, et il ne s’agit quasiment que de scènes d’action.

Une absence de violence ?

Le manque d’action et de violence est une critique qui devient redondante, notamment sur les réseaux sociaux. Il est vrai que les séquences de combats sont toutes, ou presque, passées sous silence. Lorsqu’il y en a, les ennemis sont nettement moins nombreux que dans le jeu vidéo. Certains regrettent l’apparition d’ennemis ou d’infectés, car on ne se rend pas compte à quel point le monde est devenu dangereux et mortel. Selon eux, le périple de Joël et Ellie paraît trop facile ou ennuyeux, et cela a un impact sur l’émotion de certaines scènes. Je dois admettre qu’il est humain de regretter de ne pas voir telle ou telle scène transposée à l’écran. Bien que je ne sois pas férue d’action, j’admets moi-même que la violence est encore moins présente que je ne l’imaginais. Il était même un peu frustrant de voir Joël se faire neutraliser par aussi peu d’hommes, à l’université. D’ailleurs, cette diminution de la violence se confirme dans l’épisode suivant, où Riley et Ellie ne sont attaquées que par un seul infecté. C’est carrément minimaliste. Mais en y réfléchissant… On reproche depuis des années au cinéma et aux séries de mettre l’accent sur des scènes d’action épileptiques, qui ne laissent aucune place à la psychologie des personnages ni l’émotion. Le meilleur parallèle à faire et probablement avec les nombreuses adaptations de Resident Evil, qui furent toutes des échecs. Pour The Last of Us, je préfère de loin être légèrement frustrée par un manque de violence, que déçue par une éventuelle abondance. Et puis, rappelons que le jeu lui-même raconte avant tout une histoire d’amour entre une fille et son père de substitution. Il est bien naturel que la série se focalise sur les liens entre les personnages. Pour finir, bien qu’ils soient peu présents et nombreux, les adversaires humains et infectés sont – à chaque fois – dévastateurs. Ils sont synonymes de blessures, de morsures voire de mort pour les personnages principaux. De fait, ils sont d’autant plus menaçants et on imagine sans mal que, face à une horde d’ennemis, Joël et Ellie n’auraient aucune chance. La série est nettement plus réaliste que le jeu et son intention est tout simplement de se concentrer sur la nostalgie, l’amertume et les amours brisés au sein d’un monde post-apocalyptique. C’est une vision artistique que je soutiens amplement et puis, qui sait ? Les deux derniers épisodes de la série pourraient nous surprendre.

Une adaptation fidèle et émouvante

Mais concentrons-nous sur l’épisode 6. Le fil rouge de l’histoire demeure sensiblement le même. Ellie et Joël parviennent au barrage hydroélectrique, et nous assistons aux retrouvailles avec Tommy. Celui-ci ne donnait plus de signe de vie à son frère car il a refait sa vie, au sein d’un nouveau groupe, où il s’est marié avec Maria. D’ailleurs, celle-ci apprend par mégarde à Ellie que Joël avait une fille. Ellie réalise ensuite que Joël veut la confier à Tommy. L’adolescente ne fugue pas mais confronte Joël, de la même manière que dans le jeu vidéo. Ils partent ensemble à l’université, où ils trouvent plus de singes que de Lucioles. L’épisode s’arrête sur la blessure de Joël. Les points forts de « Kin » sont les mêmes que ceux des épisodes précédents. La série se concentre sur la relation entre Joël et Ellie. Cela est extrêmement bien joué, parfois drôle, et surtout émouvant. L’adaptation met peut-être plus l’accent sur leur espoir de trouver un vaccin, pour changer le monde. Je me dois aussi de saluer la reprise des morceaux instrumentaux de Gustavo Santaolalla. C’était un plaisir d’entendre la réorchestration de The Path, d’autant plus que cela accompagnait des plans magnifiques sur les paysages enneigés.

Le développement de Joël

Au cours des premiers épisodes, j’avais sans doute plus de sympathie pour Ellie que pour Joël. J’admets que la balance commence à pencher. Je sais qu’Ellie est en pleine crise d’adolescence, mais elle est parfois gratuitement vulgaire et insolente, au point de sembler caricaturale. Au contraire, Joël commence à révéler son vrai visage. Je regrettais son absence d’émotion. Il est vrai que le fer a mis du temps à plier, mais c’était pour mieux se briser. Tout au long de l’épisode, Joël est victime de malaises qui pourraient s’apparenter à des crises d’angoisse. On sent qu’il est lourdement éprouvé et surtout traumatisé par tout ce qu’il traverse depuis vingt ans. Par-dessus tout, il commence à se faire un sang d’encre pour Ellie. Non seulement il est très attaché à elle, mais il ne supporterait sans doute pas de voir l’histoire se répéter. La mort d’Ellie lui rappellerait trop celle de Sarah, dont il n’a clairement toujours pas fait le deuil. On sent que le fantôme de sa fille hante ses pensées. A Jackson, il aperçoit une jeune femme qui a la même coiffure que Sarah et il se projette. A quoi aurait ressemblé sa fille si elle était devenue adulte ? Serait-il grand-père ? Cela est d’autant plus douloureux qu’il apprend que Tommy aura lui-même un enfant. Il s’agit d’ailleurs d’un petit rajout inédit, par rapport au jeu vidéo, sans doute pour appuyer sur la corde sensible. Il en va de même pour le film projeté aux enfants de Jackson. Il s’agit d’un long-métrage avec Richard Dreyfuss, appelé « The Goodbye Girl ». Un titre évocateur. Joël finit par se confier à Tommy, face auquel il paraît particulièrement vulnérable. La prestation de Pedro Pascal est incroyable et très émouvante. Il semble encore plus attaché à Ellie que dans le jeu, dans le sens où il insiste sur le fait qu’il veut la quitter car il ne se sent plus physiquement capable d’assurer sa sécurité. Naturellement, il va changer d’avis, car Ellie est elle aussi très attachée à lui. L’alchimie entre les deux personnages fonctionne et le développement psychologique de Joël est juste parfait.

Tampons et coupe menstruelle

Autre détail inédit, et je n’aurais jamais cru m’appesantir dessus : Maria donne une coupe menstruelle à Ellie. C’est très anodin, et pourtant on peut se demander pourquoi la série s’arrête sur les tampons, puis là-dessus. C’est probablement parce qu’elle a été produite après le COVID, où l’on s’est rendus compte que, en cas de crise sanitaire, certaines choses anodines pouvaient se révéler bien plus problématiques qu’on ne l’imaginait. De plus, il est finalement rare qu’une jeune fille soit le personnage principal d’une série d’action post-apocalyptique, et que, surtout, on parle ouvertement de sa puberté comme de celle des garçons. Le film d’animation Pixar Alerte Rouge a beaucoup fait parler de lui car il était l’un des premiers à aborder ouvertement la question des règles chez les jeunes filles. Et il est sorti en… 2022. Il y a donc encore une longue route à faire pour briser un tabou qui n’a pas lieu d’être, puisqu’il concerne… la moitié de l’humanité. Enfin, on aurait pu craindre un anachronisme. En Europe, on voit apparaître la coupe menstruelle dans les années 2000, et en ligne. C’est donc après la date de l’apocalypse de The Last of Us. Il faut même attendre 2016 pour que des coupes menstruelles fassent leur apparition dans les grandes surfaces françaises. Et pourtant, non seulement la coupe existe sous différentes formes depuis les années 30, mais elle est utilisée aux États-Unis depuis la fin des années 80. Il est incroyable de constater combien on peut mettre de temps pour importer des alternatives aux serviettes ou aux tampons hygiéniques. Une fois encore, c’est dire combien on apporte d’importance à la modeste moitié de l’humanité. Passons.

Des références à The Last of Us Part II

Pour finir, l’épisode 6 de The Last of Us fourmille de références envers The Last of Us Part II. On sent clairement le terrain se préparer pour la deuxième saison de la série, et c’est plutôt appréciable. Pour commencer, on voit comment fonctionne Jackson, la ville près du barrage hydroélectrique. Tommy annonce à Joël et Ellie qu’ils y seront toujours les bienvenus. Lorsque Joël et Ellie mangent, ils sont épiés par une adolescente cachée derrière un pilier, ce que Ellie prend très mal. Pour beaucoup, il s’agit certainement de l’apparition fugace de Dina, qui deviendra la petite amie d’Ellie, dans The Last of Us Part II. Notre héroïne fait d’ailleurs la rencontre d’un certain cheval appelé Paillette. Lorsque Joël se projette dans l’avenir, il imagine élever des moutons. Il s’agit d’un running gag car Ellie va beaucoup se moquer de lui. Et pourtant, la ferme avec des moutons est aussi un lieu clé de la Part II. Enfin, Maria met clairement Ellie en garde contre les personnes à qui elle donne sa confiance. Car il n’y a qu’elles qui pourront la trahir. L’avertissement n’est pas à prendre à la légère, mais je n’en dirai pas davantage, évidemment.

Épisode 7 : « Left Behind »

Comme son nom l’indique, l’épisode 7 est inspiré du DLC de The Last of Us. Il s’agissait d’une aventure brève qui mettait en parallèle le moment où Ellie prenait soin de Joël, et celui où, dans le passé, elle explorait une galerie avec Riley. Le lien était tissé par le fait qu’Ellie cherchait une trousse de secours dans un centre commercial, où elle avait dissimulé Joël. Ce n’est pas le cas dans la série, où le flash-back paraît donc plus déconnecté. Il relate tout de même très fidèlement le passé d’Ellie.

Une adaptation du DLC Left Behind

En effet, on apprend qu’Ellie a grandi dans une école militaire où elle était amie avec Riley, incarnée par Storm Reid. Or, sa meilleure amie a disparu depuis quelques semaines. Et pour cause, elle a rejoint le mouvement des Lucioles. Riley décide de rendre visite à Ellie une nuit, et après quelques sauts sur les toits, elles se retrouvent dans la galerie d’un centre commercial, où elles vont profiter des vestiges du passé. De nombreuses scènes évoquent l’extension du jeu vidéo, qu’il s’agisse du carrousel, du photomaton ou de la salle d’arcade. Détail inédit, Ellie et Riley y jouent désormais à Mortal Kombat. On retrouve le livre de blagues, la boutique de déguisement… Les deux jeunes filles s’amusent comme des enfants, se découvrent comme des adolescentes, et ont aussi des discussions plus matures et plus graves, comme lorsque Riley annonce son départ, provoquant une dispute. Ellie finit tout de même par se réconcilier avec elle et même par l’embrasser. L’alchimie entre les deux jeunes actrices fonctionne très bien, et comme toujours, la relation montrée à l’écran est émouvante ; d’autant plus que les adolescentes sont rapidement agressées par un infecté. Toutes deux mordues, elles s’abandonnent à leur triste sort. Riley se sait condamnée. Ellie ignore encore qu’elle est immunisée. C’est alors que l’épisode bascule dans le présent, où la jeune fille se décide à recoudre la blessure de Joël. L’intrigue peut reprendre son cours. Left Behind est une parenthèse, tant au niveau temporel que spatial. L’épisode semble à part, car il se déroule dans un bunker. L’ambiance est inhabituelle et colorée, grâce aux néons du magasin. Bien sûr, cela n’empêche pas l’épisode de transpirer la nostalgie et la mélancolie.

De nombreuses références

J’ai, pour ma part, été particulièrement réceptive à la bande originale. On commence par une reprise emplie d’amertume de The Path, au début, lorsqu’on voit Joël blessé. Peu après, Ellie s’amuse sur l’escalator au rythme de Take on Me, du groupe A-ha, dont elle possède d’ailleurs une cassette dans sa chambre. Take on Me est une chanson reprise par Ellie, dans The Last of Us Part II. Enfin, l’épisode se termine avec le thème du DLC Left Behind, qui est assez sensationnel. Comme toujours, de multiples références sont cachées, ici et là. Dès le début de l’épisode, le porte-clé sur le bureau contient le logo de Naughty Dog, studio de développement à l’origine des jeux The Last of Us. La galerie du centre commercial affiche de nombreuses publicités, à commencer par l’affiche du film fictionnel Dawn of the Wolf, dont on retrouvait déjà les posters dans le jeu vidéo initial. Les dernières références sont presque toutes dans la chambre d’Ellie. On apprend que l’adolescente est amatrice de dinosaures et de voyages spatiaux, en hommage à deux séquences de The Last of Us Part II. On y trouve aussi le comics dont elle est fan ou le livre de blagues. Bref, cet épisode permet d’appendre à mieux connaître Ellie.

Le développement d’Ellie

Bien que j’aime autant le personnage d’Ellie que la performance de Bella Ramsey, je dois admettre que certaines facettes de son comportement me laissaient perplexe. Pourquoi toute cette colère et cette vulgarité ? Pourquoi cette fascination pour la mort ou pour les armes à feux ? Heureusement, Left Behind explore toutes les facettes du caractère d’Ellie et permet enfin de les relier. Dans ce monde post-apocalyptique, Ellie – à l’instar de Riley – est une enfant soldat. Elles ont côtoyé la mort très tôt et sont passées à côté de leur enfance. On les a incitées à s’entraîner, soit pour devenir leader, soit pour obtenir un poste peu reluisant. D’ailleurs, c’est ce qui pousse Riley vers les Lucioles. (Fait inédit, elle est en poste dans le centre commercial, où elle surveille l’artillerie). Et précisément parce qu’on les a privées de leur enfance, Ellie et Riley vont s’amuser et s’émerveiller de tout, au sein de la galerie. Elles vont aussi découvrir les premiers émois amoureux, car elles deviennent des femmes. Lorsqu’Ellie contemple la vitrine de la lingerie, on sent déjà qu’elle ressent quelque chose pour Riley mais aussi qu’elle s’interroge sur son propre corps. De toute évidence, tout cela fait beaucoup à encaisser pour une si jeune fille, qui se laisse parfois aveugler par la colère. Enfin, Ellie joue les dures à cuir pour cacher sa vulnérabilité. Tandis que Joël a été traumatisé par la mort de sa fille, Ellie l’a été par celle de Riley. La peur de l’abandon de chacun d’entre eux rendra le duo d’autant plus indestructible.

Finalement, les épisodes 6 et 7 se complètent. Le premier développe la psychologie de Joël, tandis que le second permet de mieux cerner Ellie. On ne doute plus de leur duo indéfectible. On a parfois souri. On a surtout été émus. Comme depuis le début de cette série, il me tarde de découvrir la suite. Il ne reste plus que deux épisodes, qui devraient se focaliser sur les trois derniers chapitres du jeu, ainsi que l’épilogue. On se retrouve donc dans deux semaines pour parler des épisodes 8 et 9 de The Last of Us.

A la découverte de Ni No Kuni

Aussi surprenant que cela puisse paraître, je ne suis pas une grande amatrice des films du studio Ghibli. J’en ai vus plusieurs, qui ne m’ont pas laissé un souvenir impérissable. Malgré tout, le studio Ghibli a fini par m’atteindre en plein cœur, grâce à une saga de jeux vidéo : Ni No Kuni. L’aventure Ni No Kuni débute au Japon, en 2010, avec plusieurs jeux. En Europe, nous connaissons principalement La Vengeance de la Sorcière Céleste et sa suite, L’Avènement d’un Nouveau Royaume. Il s’agit de jeux de rôle se déroulant dans un monde ouvert. Si la conception artistique pensée par le studio Ghibli est renversante, la musique n’est pas en reste, comme en témoigne le thème principal de Ni No Kuni 2. Les jeux de la franchise ont été pensés comme des œuvres susceptibles de parler aux enfants, mais aussi aux adolescents qui sommeillent en chacun(e) de nous. A ce titre, ces aventures sont aussi enchanteresses qu’on pouvait l’attendre.

L’héritage d’Oliver et Evan

Le premier jeu nous plonge dans la peau d’Oliver, un jeune garçon vivant à Motorville. Son existence bascule lorsqu’il perd tragiquement sa mère. Alors que des larmes se déversent sur sa peluche préférée, une petite créature portant une lanterne au bout du nez ; celle-ci devient une fée bien vivante ! Oliver et Lumi seront alors transportés dans un monde parallèle et magique, où le garçon découvrira plusieurs royaumes, comme Carabas, et où il fera la rencontre de ses meilleurs amis : Myrta et Faco. L’Avènement d’un Nouveau Royaume se déroule des centaines d’années après les faits relatés dans Ni No Kuni. Bien qu’il soit orphelin et tout aussi bienveillant qu’Oliver, Evan s’en démarque à bien des égards. Mi-garçon, mi-lion, il est l’héritier du trône de Carabas, dont il a été chassé, suite à un coup d’état. Le principal lien entre les jeux est le royaume de Carabas, qui a bien changé en plusieurs siècles, à l’instar du reste du monde. Par ailleurs, la légende d’Oliver est racontée, lorsqu’Evan relève les épreuves du Dôme sacré. Si Evan est originaire de ce monde magique, il fait la rencontre de Roland, un autre Roi venant du monde des humains.

Des mondes parallèles

Les motivations d’Oliver sont personnelles. Conscient que les individus de son monde possèdent un être qui les reflète, dans l’autre univers ; il souhaite trouver un moyen de ramener sa mère. Un problème en entraînant toujours un autre, Oliver sera amené à affronter un certain Shadar, puis la Sorcière céleste elle-même, afin de sauver le monde. Evan est encore plus prompt à l’abnégation. Après avoir perdu le trône de Carabas, il tient moins à le récupérer qu’à fonder un nouveau royaume, baptisé Espérance. Son but est ni plus ni moins de signer un pacte de paix avec l’ensemble des autres royaumes, afin que le monde ne connaisse jamais plus la guerre. Le premier Ni No Kuni apparaît initialement comme une œuvre fantastique, dans la mesure où il est longtemps difficile de savoir si l’aventure se déroule réellement, ou seulement dans l’esprit d’Oliver. Le garçon est amené à faire de nombreux allers et retours entre l’autre monde et le sien, où les gens n’aperçoivent aucun phénomène magique. S’il était parfois lassant de basculer d’un monde à l’autre, il est regrettable que cette dimension fantastique ait disparu du dernier opus, qui se contente de montrer le monde des humains au début et à la fin du jeu, par l’intermédiaire de Roland. Dans tous les cas, les intrigues se veulent oniriques et pleines de rebondissements. Si certaines révélations sur les personnages sont parfois attendues, d’autres peuvent agréablement surprendre.

La variété du gameplay

L’aspect enchanteur des jeux se traduit moins par leurs intrigues que par leurs éléments de gameplay respectifs. Ni No Kuni peut être considéré comme un RPG mélangeant les formules d’autres franchises célèbres. En ce sens, le premier opus emprunte clairement le concept de Pokémon. Oliver est capable d’adopter des créatures répondant au nom de Familiers. Il en existe de nombreuses espèces, lesquelles ont la possibilité d’évoluer. Si l’idée est riche, elle finit par devenir pesante, dans la mesure ou, contrairement à Pokémon, l’ensemble du jeu ne repose pas seulement sur ce concept. La formule de Ni No Kuni 2 est différente. Les Familiers sont abandonnés. Tout juste Evan est-il capable d’adopter des Mousses élémentaires, qui agissent de manière plus indépendante au cours des combats. Autre concept abandonné : alors qu’Oliver avait la possibilité de transférer des émotions d’un cœur à un autre, Evan ne possède pas cette capacité. Naturellement, le deuxième opus introduit de nouveaux modes de jeux. Les opérations militaires permettent de contrôler les troupes d’Evan, au cours de batailles stratégiques. Le mode « royaume », quand à lui, est réellement passionnant. Le jeune monarque doit accomplir des quêtes annexes, recruter de la main d’œuvre et réaliser différents objectifs afin d’accroître la richesse et l’influence de son royaume. Les bâtiments construits à Espérance ainsi que les recherches menées peuvent grandement faciliter les autres défis proposés par le jeu.

Épilogue

Les deux épisodes de Ni No Kuni sont, à mon sens, des jeux incontournables pour les amateurs et amatrices de RPG. La direction artistique est renversante, grâce à l’influence du studio Ghibli. Il s’agit aussi de jeux de rôles à la fois classiques et très novateurs. Les personnages et intrigues sont stéréotypés, bien qu’ils ne manquent ni de profondeur, ni de rebondissements. L’univers est sublimé par la variété des éléments de gameplay, évoluant d’un jeu à un autre. Si le premier opus possédait une histoire ainsi qu’un niveau de difficulté plus complexes ; le deuxième opus le surpasse grâce aux différentes améliorations ou à l’introduction de la gestion du Royaume (bien plus passionnante que celle des Familiers). Ni No Kuni est une saga onirique et enchanteresse que l’on retrouve, par ailleurs, dans d’autres médias. Sorti en 2019, un film d’animation éponyme propose une histoire originale. S’il possède quelques bonnes idées, il souffre de sa brièveté et surtout d’une animation très en-deçà de la beauté des jeux. Il existe également un manga, constitué de deux tomes : L’héritier de la lumière et le prince chat. Par conséquent, je ne peux que vous conseiller de faire comme Oliver et Roland, et de basculer dans le monde de Ni No Kuni.

Resident Evil | L’enfer est pavé de bonnes intentions

A la fin des années 90, je découvris – comme beaucoup d’autres – une saga vidéoludique qui allait profondément marquer ma vie de joueuse. Resident Evil est un survival horror dont les premiers opus demeurent terrifiants, encore aujourd’hui. Probablement pas aussi terrifiants que les différentes adaptations qu’on a pu en faire jusqu’à présent, je te l’accorde. Si tu as atterri ici, c’est que tu te demandes si le mauvais sort a été rompu. Cette question n’attise pas ta curiosité au point de te déplacer toi-même au cinéma, mais qu’importe ! J’ai vu Resident Evil : Bienvenue à Raccoon City, pour toi. Ce long-métrage est sorti le 24 novembre dernier. Guère promu, ses premières images – en particulier les costumes des personnages – n’étaient pas forcément convaincantes. Pourtant, cette nouvelle adaptation a été réalisée par un fan de la saga : Johannes Roberts. Dès 2019, le réalisateur britannique promettait un film plus fidèle aux jeux dont il était inspiré. Il promettait également une expérience viscérale, terrifiante mais aussi humaine, prenant place dans une ville américaine mourante.

Resident Evil : Bienvenue à Raccoon City est-il à la hauteur de ces ambitions ou n’est-il finalement qu’une parfaite illustration de l’adage : l’enfer est pavé de bonnes intentions… ?

Raccoon City : à mi-chemin entre Silent Hill et Derry

J’ai tout d’abord passé un bon moment devant Resident Evil : Bienvenue à Raccoon City, lequel porte décidément bien son nom. Le film peut être présenté comme une origin story, entrelaçant les histoires des deux premiers jeux de la saga. De fait, nous sommes amenés à passer une nuit blanche aux côtés de Jill et Chris, mais aussi de Claire et Leon.

Force est de constater que le cadre spatio-temporel du long-métrage est bien maîtrisé. La narration est rythmée par les heures qui passent, au point de créer un effet de compte à rebours. Dans Resident Evil, l’objectif principal est après tout de rester en vie jusqu’à l’aube. L’ambiance de Raccoon City est, quant à elle, très immersive, grâce à la reconstitution de décors emblématiques des jeux, mais aussi d’une musique tout à fait appropriée. Si tu aimes la saga, tu seras probablement ravi(e) d’apprendre que certains lieux phares sont mis à l’honneur, comme le Manoir Spencer, le Commissariat mais aussi l’Orphelinat de Raccoon City. La ville elle-même a sa personnalité propre. Raccoon City est considérée comme une cité fantôme, peu à peu désertée par tous ses habitants. Or, ceux qui restent tombent de plus en plus malades. A mi-chemin entre Silent Hill et Derry (ville fictive inventée par Stephen King), Raccoon City devient une cité lugubre, rongée par un mal ancestral, et dont on rêve de s’échapper, avant même que la situation ne devienne incontrôlable. Le point fort de cette adaptation est probablement de donner de la consistance à la ville comme à ses habitants. Ils instaurent un malaise, avant même d’être totalement corrompus par les fautes d’Umbrella.

Une origin story inégale

Resident Evil : Bienvenue à Raccoon City est une adaptation libre, dans laquelle les deux premiers jeux s’entrelacent et où les personnages ne sont pas toujours tels qu’on l’imaginerait. Claire et Chris Redfield ont grandi dans l’orphelinat de Raccoon City, sous la tutelle d’un certain William Birkin. L’adaptation est libre, mais fidèle. Cela n’a rien d’antithétique.

On peut aisément qualifier le film de fan service ambulant mais la plupart des références sont bien menées ou très efficaces. Certaines sont évidentes, comme la mise en scène de l’apparition du premier zombie du Manoir Spencer, ou le gros plan sur la serrure d’une porte ; d’autres sont plus subtiles et s’adressent aux joueurs et joueuses les plus fidèles. Personnellement, j’ai été très agréablement surprise par les places accordées à Lisa Trevor (un personnage propre à Resident Evil Remake) et à Brian Irons (le chef du commissariat). C’était d’ailleurs un plaisir de retrouver Donal Logue (Vikings, Gotham), dans ce rôle.

Malheureusement, les quelques atouts de Resident Evil : Bienvenue à Raccoon City constituent aussi l’origine de ses défauts. Il était impossible de condenser, en un seul film, l’intrigue et l’ensemble des personnages de deux jeux. Il était impossible de proposer autant d’exposition, en seulement 1h47, et de tenir la route jusqu’au dénouement. D’ailleurs, certains défauts émergent dès le début, et ne font que s’aggraver au fur et à mesure que le récit progresse.

Une caractérisation discutable des personnages

Si le long-métrage semble souffrir d’un manque de budget, surtout au niveau des effets spéciaux ; son problème majeur réside dans l’écriture du scénario, trop précipité vers la fin, et surtout celle des personnages. La plupart des personnages de la franchise sont présents, mais si différents, physiquement ou moralement, qu’il serait difficile de les identifier si leurs noms n’avaient pas été prononcés plusieurs fois. Ainsi, Jill devient un personnage secondaire dont la seule caractéristique est qu’elle est une folle de la gâchette. Serait-ce parce qu’elle trouve un pistolet avant Chris, dans le jeu original ? Non, c’est tiré par les cheveux. Il est vrai que les jeux n’ont pas la réputation de dépeindre un portrait moral bien précis de leurs protagonistes, mais je n’imaginais pas fondamentalement Chris comme un soldat borné, aveuglé par la conspiration d’Umbrella, au point de tourner le dos à sa sœur. (Encore que, cela peut être expliqué par le scénario). Il n’y a malheureusement que peu d’alchimie avec Claire, qui a pourtant toujours eu pour vocation de sauver son frère. Simple civile, parmi une équipe de flics et de soldats formés, Claire est paradoxalement la survivante la plus badasse. En parallèle, Leon est réduit au triste rang de comique de service. Le jeune flic est dépeint, pendant la majorité du film, comme un idiot doublé d’un incompétent, au point de ne pas se réveiller, quand un camion prend feu devant la porte du commissariat et qu’un zombie s’en échappe, initiant une marche embrasée vers lui.

Hélas, les personnages sont si nombreux qu’ils apparaissent peu à l’écran. De fait, chacun ne possède qu’une seule caractéristique et aucun ne parvient à tirer son épingle du jeu. Certains choix sont discutables, comme le fait d’introduire Sherry, qui ne devient qu’une simple figurante. D’autres le sont moins, comme celui d’humaniser Wesker, et de ne pas faire de sa trahison un point culminant de l’intrigue. Après tout, nous sommes déjà au courant ! William Birkin est lui aussi intéressant du moins… Jusqu’à sa transformation en Tyran.

Je pense que c’est à ce stade que le long-métrage a cessé de faire tout effort, pour devenir pleinement le nanar que nous attendions.

Sus au virus N(anar)

Malheureusement, Johannes Roberts n’aura pas tenu toutes ses promesses. Le film est fidèle aux jeux. Certes. Les références sont délicieuses, du moins quand elles sont maîtrisées. Mais Resident Evil : Bienvenue à Raccoon City n’a rien d’effrayant. Certaines scènes instaurent une ambiance intéressante, surtout au début, néanmoins le long-métrage devient grotesque, au moment même où est il censé impressionner. L’apparition du Tyran est un réel échec.

Au final, puis-je conseiller Resident Evil : Bienvenue à Raccoon City ? Le film est si peu exempt de défauts que je ne peux décemment t’encourager à aller le voir au cinéma. Toutefois, il pourrait, à l’avenir, assurer une soirée télé divertissante. Si tu es fan de la franchise, tu prendras un savant plaisir à reconnaître les différentes références, glissées ici et là. Et, à défaut d’avoir peur, sans doute en riras-tu. De toute évidence, ce reboot était animé par de meilleures intentions que les films de Paul W. S. Anderson. Hélas, il n’offre pas un souvenir beaucoup plus impérissable… Comme je le disais tantôt, l’enfer est pavé de bonnes intentions… Reste à savoir si le prochain projet Resident Evil, imaginé par Netflix, fera office d’antidote.

(Ceci dit, quand on sait qu’on partait de cela, on pourrait être plus indulgents !)