The Gardens Between est un jeu indépendant australien, développé par The Voxel Agents et sorti en 2018. Ce puzzle game met en scène l’amitié des jeunes Arina et Frendt, deux voisins qui se rejoignent dans leur cabane haut perchée, afin de se remémorer les bons moments passés ensemble. Or, le ciel est traversé par un éclair, qui bouleverse la boussole du temps. Cet événement les amène à explorer plusieurs archipels, symbolisant leurs nombreux souvenirs communs. Les différentes îles, tantôt pleines de couleurs, tantôt plus sombres, sont gorgées de références propres à l’imaginaire et à l’enfance, de celle abritant un jeu ressemblant – à s’y méprendre – à Mario, à celle servant de refuge à un squelette entier de dinosaure. The Gardens Between est la promesse d’un voyage à la fois doux et onirique.
La représentation des îles fait penser, à s’y méprendre, à des casse-têtes sophistiqués qu’il faut tourner dans tous les sens, pour comprendre la démarche à suivre. Certaines sont esthétiques ou proposent un level design sympathique. Cependant, The Gardens Between sort de l’ordinaire par le biais de son gameplay, qui ne permet pas de contrôler directement les deux protagonistes, mais ni plus ni moins le flux du temps. Ainsi, il est possible de le faire aller en arrière, en avant et – à la rigueur – d’interagir avec certains objets. D’ailleurs, les deux personnages ne peuvent pas réaliser les mêmes actions. Je dois bien admettre que, au début, j’ai redouté que le gameplay se révèle trop simple et répétitif. Contre toute attente, les mécaniques de jeu parviennent à proposer des énigmes assez variées, durant les quelques heures de durée de vie. Je suis loin d’être une grande adepte du puzzle game en général, mais The Gardens Between est tout à fait abordable, en dehors de deux ou trois passages s’étant avérés plus retors. Ce qui est appréciable, c’est que le jeu exploite les capacités du temps de toutes les façons possibles, à travers les huit archipels à traverser.
The Gardens Between est – dans l’ensemble – un jeu chill et apaisant. Il m’a, à certains égards, rappelé d’autres jeux indépendants que j’ai eu l’occasion de terminer par le passé. Je pense tout d’abord àBrothers : A tale of two sons (2013), où deux personnages doivent aussi s’aider l’un, l’autre, afin de pouvoir avancer. En revanche, les deux frères sont directement contrôlés par le même joueur et certains passages demandent bien plus de dextérité. Je pense aussi, moins directement, àMy Brother Rabbit, un autre puzzle game sorti en 2018. Il s’agit d’un point and click traditionnel, qui nous transporte dans le monde onirique de l’enfance, abritant pourtant une réalité plus triste. Enfin, The Gardens Between peut être mis en relation avec Arise : A simple story (2019). Ce jeu ne permet pas seulement d’incarner un vieillard en deuil mais aussi les éléments temporels autour de lui, un peu de la même façon que le temps, dans The Gardens Between. Il s’agit d’une histoire très poignante et poétique, dotée de niveaux variés.
Somme toute, The Gardens Between est un jeu sympathique, ayant le mérite de proposer une atmosphère et un gameplay originaux, mais loin d’être inédits. Il n’entrera pas dans le panthéon de mes jeux indépendants favoris, mais il a le mérite de nous occuper quelques heures et de nous permettre de glaner un trophée Platine aisé. Par-dessus tout, il me sert de passerelle pour vous rappeler l’existence d’autres jeux indépendants valant le détour.
A Juggler’s Taleest un jeu indépendant développé par Kaleidoscube. Ce jeu de plateformes et d’énigmes est sorti en 2021. Cette aventure de deux ou trois heures vous plonge dans la peau d’Abby. Celle-ci ne joue pas au golf ; c’est plutôt une marionnette travaillant dans un cirque. Or, la petite jongleuse est exploitée par le directeur, qui la met en cage, dès les représentations terminées. La fillette va alors tout mettre en œuvre pour regagner sa liberté.
Un pantin en quête de liberté : « Sans aucun lien, je me tiens bien… »
Il semble difficile de ne pas être conquis(e) par les environnements du jeu, qui s’inspirent à la fois d’un théâtre de marionnettes et de différents contes de fées. Si le parallèle entre Pinocchio et Abby paraît évident, d’autres références viennent agrémenter les pourtours du jeu, de l’épée majestueuse prisonnière de sa roche jusqu’aux animaux croisant la route d’Abby, lesquels s’avèrent toujours moins menaçants qu’ils ne le semblaient au préalable. Ce n’est ni la première ni la dernière fois qu’un jeu indé s’inspire de contes traditionnels, pour en offrir une vision parfois plus macabre que féerique. Là où A Juggler’s Tale tire son épingle du jeu, c’est en nous projetant dans un théâtre de marionnettes. Ainsi, chaque chapitre de l’aventure correspond à un acte. Abby est suspendue à de nombreux fils qui, quelquefois, lui épargnent une chute fatale mais qui, la plupart du temps, l’empêchent de progresser parmi les environnements, comme elle le souhaiterait. En ce sens, bien que le jeu soit globalement assez classique et souffre même de quelques imprécisions techniques, il propose aussi des énigmes inédites, puisqu’Abby doit trouver un moyen de progresser en 2D, alors qu’elle est régulièrement bloquée par ses fils. A Juggler’s Tale est, à n’en pas douter, un joli récit sur la quête d’émancipation. « Abby, Abby… Ne vois-tu pas tes fils ? Ils te maintiennent, mais te retiennent aussi, » rappelle le narrateur.
Un narrateur troublant
Le narrateur, parlons-en. Il s’agit du marionnettiste contrôlant les ficelles d’Abby. J’ai d’abord regretté que sa voix soit omniprésente, alors que le jeu aurait aussi bien pu être muet, et d’autant plus cryptique. Cette voix-off faussement poétique est d’autant plus agaçante qu’elle n’hésite pas à sermonner voire humilier Abby lorsque celle-ci meurt. Cela rend nos défaites d’autant plus frustrantes ! Pourtant, peu à peu, l’omniprésence du narrateur s’avère intéressante, et même nécessaire. Cela ajoute une plus-value au récit. Le marionnettiste n’est pas si bienveillant que cela lorsqu’il évite une chute mortelle à Abby ; son ton est davantage paternaliste. Peu à peu, il semble évident qu’il ne souhaite pas du tout qu’Abby s’émancipe, et même… qu’il contrôle les autres personnages du théâtre, y compris ceux essayant de tuer la jongleuse. Le marionnettiste apparaît alors comme un Dieu tout-puissant qui s’amuse à torturer ses pantins, comme des fourmis. Il essaie tant de contrôler Abby, qui n’en fait pourtant qu’à sa tête, qu’on peut même y entrevoir un récit d’émancipation féministe. Mais ce qui est troublant, c’est que nous – en tant que joueurs et joueuses – partageons le point du vue du narrateur. Après tout, nous percevons les décors du jeu, comme si les limites de la télé constituaient le cadre de la scène de théâtre. C’est aussi nous qui contrôlons Abby, la plupart du temps. On se consolera en se disant que, contrairement à notre alter-ego, nous faisons tout pour l’aider à retrouver sa liberté.
L’influence de Little Nightmares
En d’autres termes, A Juggler’s Tale est un jeu aussi intéressant que plaisant à parcourir. Certes, je ne suis pas objective car il m’a rappelé, à plusieurs égards, Little Nightmares, l’un de mes univers favoris, auquel j’ai déjà consacré tout un dossier. Plutôt que de nous plonger dans une maison de poupées, A Juggler’s Tale nous fait découvrir un théâtre de marionnettes. Les décors aux connotations enfantines contrastent avec des éléments plus sinistres et macabres. Bien sûr, l’aventure d’Abby n’est pas vraiment horrifique. Elle est par ailleurs loin d’être aussi cryptique que celle de Six, (au moins six fois moins), mais les deux fillettes ont quelques points communs, d’abord physiquement, et ensuite dans leur manière de se déplacer ou d’interagir avec l’environnement. A ce titre, certains éléments du décor, comme les pendus, et quelques énigmes ou mécaniques de gameplay sont identiques à Little Nightmares, si bien qu’on peut avoir une désagréable impression de déjà-vu. Mais cela reste assez rare en comparaison avec les nouveautés proposées par A Juggler’s Tale.
Les héritiers de Six
Ce qui m’interpelle, c’est que Little Nighmares semble fortement inspirer de plus en plus de titres, depuis sa sortie. Cela n’a rien de surprenant, tant ce jeu de 2017 excelle dans son domaine. Il va de soi que Little Nightmares s’inspire lui-même de jeux indépendants bien connus comme Limbo ou Inside, respectivement sortis en 2010 et 2016. Les deux titres incontournables de Playdead s’installent beaucoup plus dans le die and retry, et sont encore plus cryptiques, dans la mesure du possible. Mais Little Nightmares a, selon moi, laissé une emprunte indélébile dans le monde du jeu vidéo. Si vous aimez la saga de Tarsier Studios, je vous encourage à découvrir A Juggler’s Tale, bien sûr, mais aussi d’autres jeux indés comme Shady Part of Me (2020), Minute of Islands (2021) ou Bramble : The Mountain King (2023). L’héritage de Little Nightmares est présent dans chacun de ces titres, qui parviennent toutefois à s’émanciper à travers leur direction artistique ou certains partis pris. Ainsi, Shady Part of Me base ses mécaniques de gameplay sur la relation entre une petite fille et sa propre ombre. Minute of Islands propose des graphismes ressemblant davantage à ceux d’une bande dessinée. Enfin, Bramble adopte la direction artistique la plus réaliste de ces jeux et prend un autre tournant, en explorant le folklore scandinave. Ces titres ne sont pas tous horrifiques, mais c’est sans doute le contraste étrange et perturbant entre leur tonalité enfantine et leur ambiance macabre, qui les rallie ensemble, autour de Little Nightmares. Et vous, connaissez-vous d’autres jeux de ce type ?
Depuis le mois de septembre, il y a plusieurs jeux que j’ai terminés mais dont je n’ai jamais eu l’occasion de parler sur le blog. Je pense qu’il est grand temps d’organiser un rattrapage des jeux que j’ai eu l’opportunité de tester, pour le pire et pour le meilleur. D’ailleurs, je vais tâcher de les aborder par préférence, afin de garder le meilleur pour la fin. Bonnes découvertes !
6). Silent Hill : The Short Message
Ce nouveau Silent Hill est un jeu psychologique d’horreur, édité par Konami en janvier 2024. Bien que l’expérience soit inspirée de la démo de P.T., ne vous enflammez pas, car elle ne dure que deux heures, ne possède aucun trophée et est très loin d’effrayer. Les joueurs et joueuses incarnent une adolescente nommée Anita, qui évolue dans un immeuble désaffecté. Le jeu oscille entre des phases d’exploration, des cinématiques en prises de vue réelle et des affrontements contre un boss. « Affrontements » est un grand mot dans la mesure où il s’agit de lui échapper, au sein de labyrinthes de plus en plus tortueux et pénibles à arpenter. Bref, l’expérience s’avère vite répétitive et lourde à souhait. The Short Message ne me laissera vraiment pas un souvenir mémorable. Heureusement, c’était gratuit.
Brothers est un jeu réalisé par Josef Fares, le créateur d’It Takes Two, et sorti en 2013. Nous n’en avons pas beaucoup entendu parler mais un remake est bel et bien sorti en février 2024. L’histoire est exactement la même. Deux frères, parlant un langage inconnu et évoluant dans un monde de fantasy, partent à l’aventure afin de trouver de quoi soigner leur père. Ils vont affronter de nombreux dangers auxquels ils feront face en collaborant. Le jeu initial était original car les deux frères étaient contrôlés par la même personne, chaque côté de la manette correspondant à un personnage. Si le remake comporte toujours ce mode, nécessitant de faire preuve d’une certaine dextérité ; il permet également de jouer à deux, en local.La seule autre nouveauté concerne les graphismes, entièrement refaits, de manière plus réaliste. Ces deux arguments de vente m’ont séduite, d’autant que le jeu n’était pas excessif. Malheureusement, ils m’ont tous deux déçue. Bien qu’il soit sympathique de faire l’aventure avec un(e) partenaire de jeu, l’histoire perd en émotion, tout particulièrement à la fin. Qui plus est, je ne suis pas fan de la direction artistique du remake, qui perd beaucoup en féerie. Comme si cela ne suffisait pas, certains passages manquent de maniabilité ou présentent des bugs. Autant dire que cette nouvelle itération de Brothers est tout à fait dispensable.
Venba est un jeu narratif indépendant, de Visai Studios, sorti en juillet 2023. Il s’agit d’une aventure aussi brève que minimaliste dans laquelle une mère indienne migre au Canada, avec sa famille, dans les années 80. Le personnage principal est très inquiet à propos de son fils, qui ne semble pas s’intéresser à ses origines. Si Venba raconte une histoire touchante, il possède un gameplay presque entièrement basé sur la conception de plats indiens, remémorant des souvenirs nostalgiques à la cuisinière. Somme toute, il s’agit d’une aventure très sympathique, que j’ai tendance à conseiller. En revanche, j’ai personnellement été gênée par la barrière du langage, car j’ai dû faire le titre en anglais.
Un jeu conseillé par Anthony F., dont vous retrouverez le test.
3). Tekken 8
On ne présente plus le jeu de combat de Bandai Namco, dont le huitième opus principal est sorti en janvier 2024. Certes, personne ne joue vraiment aux jeux de combat pour leur histoire (si je me trompe, je vous en prie, manifestez-vous) ; mais force est de constater que celle de Tekken 8 propose des moments aussi bien insensés, que d’anthologie. Côté gameplay, le titre propose de nombreux modes, plus ou moins utiles. Certains se jouent en ligne et d’autres en local, qu’il s’agisse des duels traditionnels ou du retour de Tekken Ball. Les mécaniques de gameplay n’ont pas évolué de manière drastique, si l’on omet un monde simplifié assez utile, qui permet de jouer avec ses ami(e)s, y compris les plus novices. Tekken 8 est un bon jeu de combat, accessible à toutes et à tous, qui ne révolutionne rien pour autant. Bandai Namco conserve la formule de Tekken 7, consistant à faire payer plusieurs season pass, afin de débloquer de nouveaux personnages. Par principe, je ne soutiens pas la stratégie, mais j’avoue avoir cédé pour le premier car, malgré tout l’amour que je porte à King, Eddy me manque terriblement.
2). Minute of Islands
Minute of Islands est un jeu indépendant de plateforme et de réflexion développé par Studio Fizbin en 2021. Nous incarnons Mo, une jeune fille explorant différentes îles, afin de sauver un monde en déclin. Il est difficile d’en dire davantage, tant l’histoire est cryptique. Elle l’est presque autant que celle d’un certain Little Nightmares, dont Minute of Islands s’est certainement inspiré. Le jeu n’est pas particulièrement oppressant mais l’héroïne porte un ciré jaune assez reconnaissable, et l’ambiance s’avère aussi mystérieuse que fascinante. J’ai beaucoup apprécié Minute of Islands et ses tableaux envoûtants, semblant extraits de bandes dessinées. A ce titre, mais aussi au niveau du gameplay, il m’a parfois rappelé Gris. On peut regretter des phases de gameplay assez répétitives, mais l’ambiance organique et la direction artistique de Minute of Islands valent sans aucun doute le détour.
Un jeu conseillé par DisserToPlay, dont vous retrouverez la superbe analyse.
1). Gerda : A Flame in Winter
Même si j’ai beaucoup aimé Minute of Islands, mon premier choix est Gerda : A Flame in Winter, un jeu narratif développé par le studio danois PortaPlay et édité par DON’T NOD, en 2022. Gerda aborde un pan méconnu de l’Histoire, puisque le récit se déroule dans un village danois, aux frontières de l’Allemagne, en 1945. Les Danois souffrent de la pénurie, sous l’occupation nazie. Le jeu s’intéresse au rôle des femmes durant la guerre, à commencer par Gerda, une infirmière à la fois danoise et allemande. C’est une double nationalité difficile à porter en ces temps de conflits, mais tout dégénère lorsque le mari de Gerda est arrêté par la Gestapo, après avoir été accusé d’être membre de la Résistance danoise. Gerda est alors prête à tout pour sauver son époux : aider la Résistance, comme collaborer avec certains Nazis. Or, le jeu n’a rien de manichéen ni de prévisible. Les personnages sont très bien construits, et tout n’est pas noir ou blanc entre danois et allemands. L’écriture est assez subtile pour surprendre les joueurs et joueuses, ce qui rend les choix d’autant plus cornéliens. Je regrette que le jeu soit aussi faible sur le plan technique et graphique, mais les mécaniques de gameplay sont plaisantes, et totalement au service de cette sensation de choix. Les décisions de Gerda, son influence sur les autres personnages, la façon dont elle usera du temps qui lui est imparti dans une journée, mais aussi les jets de dés, auront de véritables conséquences. Ainsi, bien que le jeu soit bref, il possède une grande rejouabilité. J’ai adoré.
Un jeu offert par Hauntya, et dont vous retrouverez mon test, sur Pod’Culture.
Sans être une fan inconditionnelle, j’avais passé un très bon moment sur A Plague Tale : Innocence, un jeu d’action et d’infiltration sorti en 2019, dont j’avais publié l’analyse sur le blog. Sa suite directe,A Plague Tale : Requiem, toujours développée par le studio bordelais Asobo, est sorti en octobre 2022. Il s’agit, à mes yeux, d’un jeu de pure désillusion. C’est le principal sentiment qui émane de son ambiance, de sa narration mais c’est aussi – hélas – ce que j’ai ressenti en tant que joueuse. C’est le genre d’harmonie ludo-narrative dont on se passerait bien. Mais décortiquons l’anatomie de cette chute. Attention, l’article comporte des spoilers.
Innocence perdue
L’histoire se déroule au quatorzième siècle, quelques mois après les événements relatés dans le premier opus. Après avoir fui la Peste Noire ainsi que l’Inquisition, en Guyenne, Amicia et son petit frère, Hugo, essaient de retrouver le bonheur. C’est un moment le cas, en compagnie de leur mère Beatrice et de l’apprenti alchimiste de celle-ci : le jeune Lucas. Malheureusement, les ennuis vont rapidement frapper à leur porte, les forçant à déménager dans la Ville Rouge. Là-bas, Amicia et Lucas se rendront compte que la Peste Noire est de retour, tandis que la maladie d’Hugo gagne du terrain. Beatrice est convaincue qu’il leur faut l’aide d’un Magister, et ensuite partir pour Marseille, afin de trouver le moyen de guérir Hugo. Amicia est plus d’avis de suivre l’instinct de son petit frère, dont les rêves étranges, peuplés d’un Phénix et d’un arbre, lui font entrevoir l’île de Cuna. Les protagonistes traverseront donc le sud-est de la France, parfois en bateau, et ce jusqu’à cette fameuse île fictive. Ils rencontreront plusieurs personnages secondaires au cours de leur quête, comme la contrebandière Sophia ou l’ancien soldat Arnaud. Ils croiseront aussi et surtout la route de nombreux ennemis, qu’il s’agisse d’hommes hostiles ou de rongeurs affamés, mais effrayés par le feu.
Si on veut résumer l’intrigue, la quête d’Amicia est ni plus ni moins motivée par un simple rêve d’Hugo. Il s’agit, vous en conviendrez, d’un indice assez mince pour se lancer à corps perdu dans l’aventure. D’ailleurs, les illusions s’effritent peu à peu, les unes après les autres. L’île et l’oiseau du rêve d’Hugo ont pu être mal interprétés et ne sont pas forcément des messages de bon augure. Après tout, si l’on omet les plumes à collecter, le seul oiseau tangible appartient à un soldat ennemi, qui essaie de les tuer. L’île de Cuna possède toute une zone explorable comportant quatre moulins à vents (dont le secret débloque d’ailleurs un objet sympathique). Hugo les compare à des géants, ce qui n’est pas sans rappeler la candeur d’un certain Don Quichotte. Enfin, l’arbre entrevu dans le rêve apparaît plusieurs fois dans le jeu, comme dans le sanctuaire de l’île, ou à la fin, quand Hugo en est prisonnier. Tous les indices montrent donc que nos protagonistes faisaient fausse route, ou du moins, que leur quête était perdue d’avance.
La Cuna semble tout d’abord une île idyllique, mais les plus perspicaces d’entre nous (ou tout simplement celles et ceux ayant vu Midsommar) auront compris que l’endroit était trop lumineux et fleuri pour être vrai. Après avoir affronté l’Inquisition, le frère et la sœur se frottent à une secte païenne et hérétique, persuadée qu’un enfant viendra les sauver. Amicia et Hugo sont toujours déçus par les lieux qu’ils traversent. D’abord magnifiques, ceux-ci deviennent hostiles ou ravagés, à cause de leurs adversaires ou des rats. Mais les deux protagonistes sont aussi souvent trahis par les adultes croisés, qu’il s’agisse du Magister, de leur mère, d’Arnaud ou encore du Comte et de la Comtesse de Provence. A la manière de The Last of Us Part II, A Plague Tale : Requiem possède quelques zones plus ouvertes et libres à explorer, quand Amicia et Hugo se sentent bien. Mais infailliblement, les maps finissent par se resserrer autour d’eux, devenant parfois même des couloirs difficilement praticables. Leur parcours est donc de plus en plus anxiogène.
Amicia est pleine de colère, prête à tuer plus que nécessaire. Elle a définitivement perdu toute innocence, au point de favoriser parfois la confrontation à l’infiltration. Au fil de l’histoire, ses cheveux sont de plus en plus courts. Amicia devient une vraie guerrière. Quant à Hugo, il nous fait comprendre, peu à peu, que cette aventure ne peut pas avoir de fin heureuse. C’est effectivement le cas, puisqu’ils vont suivre les traces de leurs ancêtres. A la fin, Amicia – et par extension, les joueurs et joueuses – sont obligés d’emprunter le chemin inverse de celui qui était attendu. Nous sommes ensuite amenés à renoncer à nous battre, au lieu d’affronter un habituel boss final. Amicia se résout alors à tuer son propre frère, dans l’espoir de mettre un point final à la malédiction qui l’entoure. Comme elle, les joueurs et joueuses n’ont pu se sentir qu’impuissants face au destin d’Hugo.
Quand le rat se mord la queue
Sur le papier, la nouvelle aventure d’Amicia et Hugo est plutôt intéressante. Malheureusement, elle est assez mal exécutée. L’évolution psychologique d’Amicia m’a paru trop brutale et le désespoir d’Hugo, certes légitime, est trop mis en avant, dans la mesure où on finit par ne plus avoir aucun doute sur la manière dont finira cette histoire. Ceci étant dit, j’ai parfois parié sur le fait que c’était Amicia qui allait mourir, et non Hugo. Celle-ci échappe de peu à la mort, à plusieurs reprises. Elle se fait déboîter un bras, se prend une flèche dans le ventre, mais s’en sort toujours indemne. Si Amicia avait le secret de l’invincibilité, je ne comprends pas pourquoi elle n’en a pas fait profiter son frère. Cette surenchère, on la retrouve au cours de plusieurs passages du jeu, au point où Amicia n’est plus attaquée par le roi des rats mais par un véritable tsunami de rongeurs. Mais alchimie rimant maintenant avec magie, elle utilise presque un lance-flammes pour les faire reculer. Vraiment, plusieurs passages du jeu ont mis à rude épreuve ma suspension consentie d’incrédulité.
Et ce n’est pas tout, car le scénario est farci de facilités scénaristiques ou d’invraisemblances, simplement pour entraîner le chapitre suivant. Je ne compte plus le nombre de fois où un personnage se retrouve séparé du reste du groupe à cause d’une mauvaise chute. Ne parlons pas du fameux chapitre où Amicia et Lucas doivent traverser toute une rive, seuls, parce qu’il leur était impossible de rattraper un bateau qui avançait pourtant à deux à l’heure. Quant à l’île de Cuna, j’ai toujours du mal à croire qu’ils l’aient retrouvée si aisément après un simple rêve. Bref, les progrès de la narration sont superficiels, et l’histoire tourne en rond. J’ignore si c’était pour gonfler la durée de vie ou simplement parce que les scénaristes ne savaient eux-mêmes pas où ils allaient. J’ai trouvé le rythme du jeu étrange et je ne suis pas parvenue à m’attacher aux personnages, au point de ne même plus comprendre Amicia ou Hugo. Ainsi, je suis restée hermétique à l’émotion et au grand final, qui aurait pourtant dû me bouleverser. Le pire est peut-être la scène post-générique, qui, à la façon d’un vieux film d’horreur, montre qu’un nouvel enfant est maudit. Cela annonce donc un troisième opus, mais je ne suis pas sûre de m’y précipiter.
Les aléas du gameplay
A Plague Tale : Requiem possède malgré tout des qualités indéniables. J’ai fait le jeu sur PS5. Les personnages ne sont pas particulièrement bien faits, et Amicia ne possède aucune expression faciale, lorsqu’elle parle en marchant. Mais les décors et les panoramas, à couper le souffle, rendent justice au sud-est de la France. Le voyage (parfois maritime) est d’autant plus dépaysant que la bande originale d’Olivier Deriviere est toujours aussi qualitative. Le gameplay principal n’a pas tant changé, dans la mesure où Alicia est toujours armée de sa fidèle fronde. Quand elle ne fuit pas des soldats, elle résout des énigmes et utilise des expériences alchimiques, afin de faire fuir les rats.
Les mécaniques de gameplay ont toutefois tendance à se diversifier. Amicia est souvent suivie d’un compagnon capable de l’aider, grâce à des capacités spécifiques. Ainsi, Arnaud peut venir à bout des soldats et Sophia peut utiliser un prisme de lumière pour faire diversion ou pour se protéger des rats. Le jeu est globalement plus ancré dans l’action et la frénésie. A partir du moment où elle apprend à manier l’arbalète, Amicia est elle-même plus offensive. Certaines phases sont ni plus ni moins des courses-poursuites, durant lesquelles l’angle de caméra change régulièrement, ne nous laissant aucun instant de répit. Enfin, le jeu nous incite à varier nos habitudes de gameplay, car Amicia possède trois arbres de compétences, évoluant en fonction du nombre d’ennemis tués au cours d’une arène : prudence, opportunisme et agressivité. Pour finir, la manette de la PS5 est relativement bien exploitée, dans la mesure où les gâchettes arrières vibrent lorsque l’on court rapidement, ou lorsqu’il pleut. Ces évolutions du gameplay sont, ma foi, les bienvenues.
Mais il y a toujours un mais ! En enchaînant les jeux sur PS5, j’avais oublié que les temps de chargement existaient. Cependant, A Plague Tale : Requiem les a rappelés à mon bon souvenir. On notera aussi un certain nombre de bugs, au cours du jeu, même si aucun ne m’a vraiment empêchée de progresser. Ce qui me surprend le plus désagréablement, c’est les choix discutables d’Asobo Studio. J’ai bien compris que le jeu parlait de désillusion, ou du fait de devoir baisser les armes, pour pouvoir enfin avancer. Mais je ne comprends pas pourquoi on se tape des phases entières où il faut se contenter de suivre des personnages qui parlent, en marchant ; alors que des affrontements importants n’ont droit qu’à des cinématiques.
Conclusion
A Plague Tale : Requiem est bel et bien le jeu de la désillusion, d’abord dans ce qu’il raconte, mais aussi dans ce qu’il fait éprouver aux joueurs et joueuses. Amicia et Hugo entreprennent une quête perdue d’avance et, cela, plusieurs indices nous le font comprendre avant l’heure. Mais les chapitres de l’histoire s’enchaînent parfois de façon superficielle, et l’intrigue tourne un peu en rond, au point de sembler confuse ou de ne pas avoir grande chose à raconter. Je suis ainsi restée insensible face à un final qui aurait pourtant dû m’émouvoir au possible. Si la direction artistique et les nouvelles mécaniques du jeu sont agréables, je ne comprends pas certains partis pris d’Asobo Studio. Si j’avais beaucoup apprécié A Plague Tale : Innocence, sa suite ne me laissera pas un souvenir impérissable.
Dans l’univers du jeu vidéo, un phénomène m’interpelle et me captive, depuis quelques années. Les frontières se brouillent de plus en plus entre le protagoniste et l’antagoniste, ce qui met fin à tout manichéisme. Le temps est loin où le gentil se devait simplement d’affronter les adversaires. Pour rappel, le protagoniste est un personnage permettant de faire avancer l’intrigue. Au contraire, l’antagoniste pose des obstacles, bloquant le dénouement. Bien sûr, tout n’est affaire que de point de vue, dans certains jeux vidéo, depuis longtemps. Prenons en exemple un jeu de combat, comme Tekken, dont le premier opus est sorti sur PlayStation en 1994. Fort naturellement, selon le personnage que l’on incarne, l’ennemi à abattre ne sera pas le même. Au demeurant, ma pensée se tourne vers des jeux plus narratifs, dans lesquels ce changement de perspective a un réel impact sur l’histoire et sur le gameplay. Si vous y avez joué, vous allez certainement tout de suite penser à The Last of Us Part II, paru en 2020. Il est vrai que ce titre est assez révolutionnaire à ce niveau, et a marqué un tournant dans l’histoire du jeu vidéo. S’il n’est pas le dernier à brouiller les pistes entre protagoniste et antagoniste, il n’est pourtant pas le premier non plus. Je vais aborder dix jeux qui effleurent cette question, sous des angles différents. Il s’agit bien sûr d’un choix personnel et non exhaustif. Si vous n’avez pas fait certains de ces jeux, vous pouvez tout simplement sauter le paragraphe qui leur est consacré, pour éviter des spoilers.
1). Star Wars : Knights of the Old Republic (2003)
Star Wars KOTOR est un jeu de rôle développé par BioWare et sorti initialement sur PC en 2003. L’histoire se déroule quatre millénaires avant le règne de l’Empire Galactique. En ces temps reculés, de nombreux Jedi affrontent les Sith, alors innombrables. Le plus célèbre et le plus craint d’entre eux est un dénommé Dark Revan, récemment trahi par son apprenti, Dark Malak. Vous vous réveillez dans la peau d’un personnage masculin ou féminin, que vous aurez pu personnaliser. Malgré votre amnésie, vous deviendrez un Jedi talentueux, avant de parcourir la galaxie, à bord de votre propre vaisseau. Vous explorerez bien des planètes, tant pour régler leurs problèmes internes, que pour trouver des indices sur le plan fomenté par les Sith. KOTOR est un jeu de rôle à l’ancienne, doté de combats au tour par tour et où vos décisions peuvent changer le cours des événements. Non seulement vous pouvez apprendre à mieux connaître les membres de votre équipe, mais vous pouvez aussi basculer du côté lumineux ou obscur de la Force. Or, à un point culminant du jeu, vous apprenez que l’ennemi juré des Jedi, Dark Revan, n’est pas mort. Il s’agit de vous-même, avant que votre apprenti ne vous trahisse et que les Jedi choisissent de remanier votre esprit. Je me souviens encore du choc que j’ai éprouvé en assistant à cette révélation pour la première fois. Il s’agit de l’un des meilleurs twists de l’histoire du jeu vidéo. Ainsi, j’incarnais le « méchant » depuis le début. Et pourtant, le jeu ne s’arrête pas là. J’ai alors encore le choix entre rester du côté des Jedi, ou, au contraire, embrasser pleinement le côté obscur afin de me venger. KOTOR dispose ainsi de plusieurs fins, et j’ai toujours exploré celle du côté obscur, tant elle est déchirante. En décidant de redevenir Dark Revan, vous êtes en effet amené(e) à tuer plusieurs de vos amis. Il s’agit de personnages qui vous ont accompagné(e) tout au long de l’aventure, que vous avez aussi incarnés et entraînés. Le jeu, par sa narration et son gameplay, nous contraint à faire des choix qui nous impliquent émotionnellement et qui nous forcent à agir, nous frappant en plein cœur. Un grand jeu.
Kingdom Hearts II est un action-RPG développé par Square Enix et sorti sur PlayStation 2 en 2005. Il s’agit de la suite des aventures de Sora, un garçon qui explore les différents univers Disney, en rencontrant parfois des personnages de la franchise Final Fantasy. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque, en lançant le deuxième opus, je n’incarnais plus Sora, mais Roxas. La franchise m’avait projetée dans la peau d’un nouveau protagoniste, sans me prévenir. Roxas est un garçon aux cheveux dorés, portant une veste blanche avec des motifs de damier. Il vit dans la Cité du Crépuscule et profite des derniers jours des vacances d’été, en compagnie de ses amis. Or, d’étranges phénomènes se déroulent dans la ville, les amenant à enquêter. Roxas finit alors par apprendre qu’il n’existe pas vraiment. Il n’est que le Simili de Sora, un reflet ayant pris forme lorsque le porteur de la Keyblade est momentanément devenu un Sans-cœur, à la fin du premier jeu. Cette révélation est déchirante pour Roxas, comme pour les joueurs. En effet, la fin des vacances ne rime pas seulement avec la rentrée des classes. Tout n’était qu’illusion dans cette Cité et Roxas est bel et bien au crépuscule de sa vie. Il lui faut s’endormir pour toujours afin de laisser sa place à Sora. Suite à cette introduction riche en émotions, nous incarnons de nouveau Sora, accompagné de Donald et Dingo. Nous continuons à explorer des mondes Disney, pourchassés par la lugubre Organisation XIII. Mais, à la fin du jeu, dans son palais mental ; Sora doit affronter un adversaire auquel il ne s’attendait pas. Il est encapuchonné de noir et il porte deux Keyblades. C’est un adversaire particulièrement difficile à vaincre, au sein d’un combat de boss mémorable. Il s’agit bien sûr de Roxas.
3). Heavy Rain (2010)
Heavy Rain est un thriller interactif développé par Quantic Dream et sorti sur PlayStation 3 en 2010. Vous êtes amené(e)s à incarner quatre personnages, enquêtant, à leur manière, sur un tueur en série. Le tueur aux origamis s’en prend aux jeunes garçons, que l’on retrouve noyés cinq jours après leur enlèvement. Après la disparition de Shaun Mars, son père Ethan décide de tout faire pour le récupérer. C’est aussi le cas de la journaliste Madison Paige, du profiler du FBI Norman Jayden et du détective privé Scott Shelby. Il s’agit d’une expérience très narrative et cinématographique. Malgré quelques mécaniques de gameplay, le jeu se repose essentiellement sur les choix que vous allez être amené(e)s à faire. Il est délicat de parler du dénouement de Heavy Rain dans la mesure où il existe plusieurs fins possibles. Ce qui est certain, c’est que l’on finit par apprendre que le tueur en série que nous recherchions n’est autre que Scott Shelby. Ainsi, nous l’incarnions sans nous douter de rien. Nous étions l’ennemi mortel du jeu, depuis le départ. Les différents personnages que nous contrôlons sont amenés à s’affronter les uns les autres, et cela peut devenir mortel. C’est une expérience assez unique et intéressante, que l’on ne peut retrouver que dans ce genre de jeux narratifs. J’aurais aussi pu parler de Detroit : Become Human (2018). Mais je trouve Heavy Rain beaucoup plus fort, pour ce sujet, tant il a su me duper.
4). The Walking Dead : Saison 2 (2013)
On aborde un autre jeu narratif, développé par Telltale Games, cette fois-ci. Initialement sorti en 2013, il s’agit de la suite des aventures de Clémentine, une jeune fille qui essaie de survivre dans un monde infesté de rôdeurs. Ce jeu a la particularité d’être composé de cinq épisodes. Comme son genre vidéoludique l’exige, malgré quelques mécaniques de gameplay, le jeu se focalise avant tout sur les dialogues et les choix qui vont impacter la suite des événements, ainsi que la fin. Cette série Telltale est réputée pour être particulièrement prenante et émouvante. Dans la première saison, nous incarnions Lee, qui devenait un père de substitution pour la jeune Clémentine. Dans la deuxième saison, Clémentine a bien grandi et se débrouille par ses propres moyens. Elle n’est malgré tout qu’une adolescente qui sera amenée à hésiter entre l’influence de deux mentors : une survivante aguerrie nommée Jane ou bien un homme que Clémentine connaît depuis la première saison, Kenny. Bien que nous n’ayons jamais incarné directement ce personnage, il est de notre côté depuis le début, nous pourrions donc être incité(e)s à nous tourner vers lui. Or, Kenny perd de plus en plus la raison, au point de devenir dangereux même pour ceux et celles qu’il aime. Au cours du dernier épisode, une dispute virulente concernant AJ, le bébé qu’ils ont pris sous leur aile, amène Jane et Kenny à se battre. Dans la peau de Clémentine, vous pouvez alors choisir de laisser mourir Jane, de tuer Kenny, ou encore de vous retrouver seule avec le bébé. C’est un choix très déchirant car les adversaires finaux sont des personnages que l’on a appris à suivre et à aimer au cours des épisodes, voire des saisons précédentes. De mon côté, je n’ai jamais pu me résoudre à abandonner Kenny.
A Way Out est un jeu d’aventure et de coopération, développé par Hazelight Studios. Ce jeu imaginé par Josef Fares est sorti en 2018. Il est très particulier dans la mesure où vous être forcé(e) d’y jouer avec un(e) ami(e), en local ou en ligne. En effet, chaque joueur est amené à incarner l’un des deux protagonistes : Leo Caruso, le sanguin, ou Vincent Moretti, le plus réfléchi. Il s’agit de deux prisonniers qui tentent de s’évader de prison. Le jeu est très cinématographique, tant au niveau de sa mise en scène que de ses références au septième art. Les mécaniques de gameplay évoluent aussi beaucoup. Ce qui rend le jeu si unique, c’est le lien d’amitié voire de fraternité qui naît entre Leo et Vincent. Cette relation est renforcée par le fait que vous jouiez – a priori – avec quelqu’un que vous appréciez-vous même. Vous devrez faire preuve de beaucoup de solidarité et de coopération pour venir à bout de l’histoire du jeu. Malheureusement, après une cavale pleine de péripéties, Leo apprend que Vincent était un policier infiltré. Il est difficile de ne pas se sentir trahi(e) par ce frère d’arme, qui devient tout à coup un ennemi. Lors du dénouement, les deux hommes sont amenés à s’entre-tuer, dans une scène rendant hommage au film Heat (1995). Alors qu’on avait l’habitude de coopérer avec son ami(e), cette personne devient tout à coup notre adversaire. C’est très déstabilisant et forcément émouvant. La narration et le gameplay brouillent plus que jamais la frontière entre protagonistes et antagonistes, et ce avec une grande virtuosité.
Death Stranding est un jeu développé par Kojima Productions et sorti sur PlayStation 4 en 2019. Le titre est réputé pour son univers très spécial et ses graphismes réalistes, accomplis par la capture de mouvements, à partir de plusieurs acteurs et actrices de renom. Il est difficile de décrire l’intrigue de Death Stranding. On se contentera de dire que Sam Porter (Norman Reedus) arpente un monde post-apocalyptique, en essayant d’échapper aux défis environnementaux et aux échoués, afin de créer de nouvelles connexions entre les différents individus d’une humanité déchue et recluse. Il porte un BB, condamné à ne pas naître, dans une capsule, afin de mieux détecter les esprits. Le jeu se plaît à détourner les codes et propose ainsi différentes phases de gameplay. Certaines s’apparentent à un TPS car Sam est engouffré dans des failles spatio-temporelles qui lui font revivre certaines grandes guerres. Là-bas, il affronte systématiquement Cliff Unger (Mads Mikkelsen), un soldat obsédé par l’idée de lui dérober son BB. Somme toute, Cliff est un ennemi récurrent, mystérieux et emblématique du jeu. Il met de sérieux bâtons dans les roues de Sam. Mais ce qui est étrange, c’est que le protagoniste rêve de lui dès qu’il se connecte au BB. A la fin du jeu, l’on se rend compte que Cliff ne cherchait pas le bon enfant. Il s’agit en fait d’un esprit du passé, hanté par l’idée de retrouver son fils, sans se douter qu’il a bien grandi. Cliff est en réalité le père de Sam lui-même. Outre le fait qu’il s’agit d’un excellent twist, il est très émouvant de découvrir le lien unissant les deux hommes. Cliff est plus un être trahi et maudit qu’un réel antagoniste. D’ailleurs, quand Sam est sur le point de perdre son BB, un ultime retour dans le passé lui dévoile comment Cliff était parvenu à sauver son propre fils. Cela donne la solution à Sam pour délivrer le BB de sa capsule. Ainsi, alors qu’il était un antagoniste qui nous empêchait d’avancer, Cliff Unger permet tout à coup de dénouer le nœud de l’intrigue, de façon heureuse. Ce retournement de situation a davantage lieu par des cinématiques que par de nouveaux éléments de gameplay, mais il s’agit de l’un de mes personnages favoris des jeux vidéo.
Faut-il présenter The Last of Us Part II ? Il s’agit d’un survival horror, développé par Naughty Dog et sorti sur PlayStation 4 en juin 2020. Il s’agit de la suite des aventures de Joël et Ellie, tentant de survivre dans un monde post-apocalyptique, envahi d’infectés. Bien que l’introduction permette d’incarner Joël, nous sommes désormais amené(e)s à jouer Ellie, qui est devenue une femme redoutable. Après la perte de son mentor, pour ne pas dire père adoptif, Ellie décide de pourchasser, sans relâche, celle qui l’a tué. Il s’agit d’une certaine Abby. La première moitié du jeu permet ainsi d’incarner Ellie, qui parcourt le monde, afin d’obtenir sa vengeance. Le rythme du jeu en a surpris plus d’un car, en plein milieu de l’histoire, et lors d’un événement plein de tension, l’intrigue s’arrête brutalement. Elle revient alors en arrière, nous permettant tout à coup de jouer l’histoire parallèle, du point de vue de Abby. Nous changeons brutalement de protagoniste, au point d’incarner un personnage qui a commis l’irrémédiable, en s’en prenant à Joël, le héros du premier opus. The Last of Us Part II commet un tour de force en nous faisant découvrir les motivations d’Abby, en nous forçant à la jouer et, de fait, à ressentir de l’empathie pour elle. Cela nous enseigne combien ce genre de conflits est peu manichéen. A la fin de l’arc d’Abby, le boss final n’est autre qu’Ellie… Elle passe de protagoniste à antagoniste, tant en terme de narration que de gameplay. Il s’agit d’un combat éprouvant, où Ellie se cache et tend des pièges. Ses tactiques ne sont d’ailleurs pas sans rappeler celles du terrible David. Face à une telle situation, nous sommes tiraillé(e)s. Quel que soit le personnage qui gagne, nous sommes perdant(e)s. Mais Abby décide de laisser la vie sauve à Ellie. Cet acte ne suffit pas à apaiser la colère d’Ellie, qui revient la traquer, lors d’un acte final. L’ultime combat du jeu permet d’incarner Ellie, contre Abby. Les deux femmes sont éprouvées moralement et physiquement et, contre toute attente, Ellie laisse à son tour partir Abby. Ce jeu nous apprend à nous mettre à la place de l’ennemi, et que la vengeance est un cercle vicieux. Abby est, elle aussi, l’un de mes personnages favoris.
Ghost of Tsushima est un jeu développé par Sucker Punch et sorti en juillet 2020, sur PlayStation 4. C’est un jeu d’action et d’infiltration se déroulant dans un monde ouvert, et plus précisément dans le Japon féodal, au XIIIe siècle. Jin Sakai est un samouraï tentant de défendre son île, face à l’invasion des Mongols. Or, pour sauver son territoire, il lui faudra laisser de côté l’honneur des samouraïs afin de développer ses propres techniques, et devenir le fantôme de Tsushima. A la fin du jeu, malgré la victoire de Jin, le Shogun n’a pas apprécié ses méthodes et décide de le condamner à mort. Or, l’exécutant choisi n’est autre que l’oncle de Jin, le seigneur Shimura. Nous devons affronter, au cours d’un duel, un membre de la famille, un mentor. Après avoir vaincu son oncle, Jin a le choix de l’achever, afin de respecter le code d’honneur des samouraïs, ou de l’épargner, ce qui ferait définitivement de lui un paria et un fantôme. Ce dilemme moral est particulièrement percutant.
Little Nightmares II est un jeu d’horreur et de plate-forme développé par Tarsier Studios, en 2021. Malgré son titre, on devine que cet opus se déroule avant le premier Little Nightmares. Nous n’incarnons plus Six, mais Mono, un garçon dont le visage est toujours dissimulé. Au cours des différents chapitres du jeu, nous aiderons Six à traverser une ville bien hostile, où des monstres cannibales et gargantuesques se montrent menaçants. Le jeu est réputé pour son univers à la fois oppressant, envoûtant et cryptique. Nous avons de l’affection pour Six, que nous avons incarnée dans le premier jeu et avec laquelle nous avons collaboré, dans ce titre. Il nous est même arrivé de la sauver et de la défendre car elle semble, parfois, encore plus vulnérable que nous. Or, comme Little Nightmares I le laissait présager, Six est un personnage gris et difficile à cerner. Il s’agit justement du boss final de Little Nightmares II, dans une conclusion mémorable, où elle prend à son tour une forme géante et monstrueuse. C’est un antagoniste d’exception, mais nous arriverons une fois encore à la sauver, grâce à une boîte à musique. Or, quand les deux enfants essaient de s’échapper de la Tour où ils étaient enfermés, Six décide d’abandonner Mono, en le laissant tomber dans un gouffre. On découvre alors que, en grandissant, Mono devient l’Homme Filiforme, un autre ennemi majeur du jeu. Six l’a-t-elle trahie par mesquinerie ou parce qu’elle savait qu’il représentait un danger ? Qui est l’antagoniste et qui est le protagoniste ? Une fois encore, les frontières sont brouillées. Pour l’un, comme pour l’autre, nous avons incarné des monstres en devenir, sans nous en rendre compte.
Spider-Man 2 est un jeu d’aventure développé par Insomniac Games et sorti sur PlayStation 5 en octobre 2023. Il s’agit ni plus ni moins de la suite des aventures de l’homme araignée, qui explore New-York avec ses toiles, afin de lutter contre le crime. Cette fois-ci, nous n’incarnons pas seulement Peter Parker, mais également Miles Morales, qui possède des pouvoirs légèrement différents. Les deux Spider-Men devront faire face à plusieurs menaces, à commencer par Kraven le Chasseur, puis le Symbiote Venom. Spider-Man 2 m’a très agréablement surprise grâce à sa mise en scène spectaculaire et son histoire passionnante. Sans surprise, Peter se laisse infecter par le symbiote qui prend progressivement possession de lui. Son costume devient alors noir et organique. Lors d’un combat contre Kraven, Peter doit bloquer la cloche de l’arène car le bruit lui est insupportable. Il prend le dessus et tente de tuer le Chasseur, mais Miles intervient et l’en empêche. Alors, un nouveau combat a lieu, dans la même arène. Cependant, nous incarnons Miles face à Peter. Et la cloche n’est plus un obstacle de l’environnement, mais une alliée. Comme si ce duel n’était pas suffisamment impressionnant, le jeu va beaucoup plus loin pour brouiller les pistes entre protagonistes et antagonistes. On apprend ainsi que c’est Harry Osborn, le meilleur ami de Peter, qui va se transformer en Venom. Le jeu permet même de contrôler cet ennemi majeur, lors d’une séquence d’anthologie. Venom pousse le vice jusqu’à contaminer MJ, la petite amie de Peter, qui se transforme à son tour en Scream. Le combat est alors tout aussi titanesque et riche émotionnellement. L’écriture de Spider-Man 2 est brillante. Le symbiote n’a jamais été aussi bien exploité car il démontre la part de noirceur qui sommeille en chacun de nous.
J’ai terminé le tour de ces dix jeux qui brouillent les pistes entre protagonistes et antagonistes, que ça soit par le biais de la narration ou du gameplay. En plus de rompre toute notion de manichéisme, je trouve ce mécanisme très efficace pour impacter directement les joueurs et joueuses. Une fois la surprise passée, nous sommes confronté(e)s à nos émotions et à nos responsabilités. Ce mécanisme, bien maîtrisé, peut rendre certains jeux et certains personnages particulièrement marquants. Il n’est pas rare que cela soit lié à des choix narratifs, dans des titres proposant plusieurs fins, mais ce n’est pas toujours le cas. Certains jeux savent très bien où ils veulent nous mener, à la fois pour notre plus grand malheur, et notre plus grande fascination. Si The Last of Us Part II a marqué un tournant dans cette rupture du manichéisme, il n’est pas le premier titre s’évertuant à déstabiliser les joueurs et joueuses. Peut-être a-t-il lancé un effet de mode. Dernièrement, alors que je ne m’y attendais pas, Spider-Man 2 est aussi allé très loin dans ce cheminement. Comme je le disais plus tôt, il ne s’agit que d’une liste non exhaustive. Aussi, si vous avez d’autres jeux à suggérer, n’hésitez pas à le faire !
En 2018, Insomniac Games frappait fort avec son Marvel’s Spider-Man. Ce jeu, en dépit de ses nombreuses qualités, ne m’avait pas laissé un souvenir impérissable, notamment à cause de ses quêtes secondaires et de ses collectibles plutôt répétitifs et ennuyeux. Je frémis autant que des plumes de pigeon en repensant à tout ceux que j’ai dû pourchasser, à travers les gratte-ciels de New York. J’avais déjà plus apprécié le pourtant plus léger épisode centré sur Miles Morales, paru en 2020. Il faut dire qu’il s’agissait de l’un de mes premiers jeux sur PlayStation 5 et je ne pouvais que saluer la claque visuelle. Somme toute, j’aimais bien la saga initiée par Insomniac Games, mais pas au point de me précipiter sur le dernier volet : Marvel’s Spider-Man 2, sorti en octobre 2023. Comme dirait Schwarzy, ce fut une « monumentale erreur », car j’ai passé un excellent moment. Ce nouvel opus n’a pas seulement amélioré ce qui avait été initié par ses prédécesseurs ; il est doté d’une dualité si maîtrisée, au niveau de l’histoire comme du gameplay, que cela l’a rendu passionnant. Je vous préviendrai en cas de spoilers, aussi est-il temps de s’engouffrer dans la toile de l’araignée.
Une histoire marquée par la dualité
L’histoire de Spider-Man 2 est littéralement passionnante car elle manie, d’une main de maître, la dualité, dans tous les sens du terme. Ce n’est un secret pour personne, le jeu nous glisse dans la peau de deux Spider-Men : Peter Parker et Miles Morales. Fait surprenant, ils seront confrontés à deux antagonistes distincts. Le premier, Kraven, est non seulement charismatique, mais son instinct de Chasseur permet de mettre le grappin sur d’autres vilains de l’univers Spider-Man. Le deuxième antagoniste, pourtant très tôt annoncé par les premières images du jeu, apparaît plus tard. Il s’agit de Venom, le reflet négatif de Spider-Man. Le jeu ne pouvait qu’être empli de duplicité.
Mais ce n’est pas tout, Peter n’a plus à se reposer seulement sur son amitié avec Miles. Comme cela avait été annoncé plus tôt, Harry Osborn est de retour. Le meilleur ami de Peter a envie de travailler avec lui, au sein de la Fondation Emily-May, afin de « guérir le monde ». Enfin, nos deux super-héros eux-mêmes ont du mal à jongler avec les deux facettes de leur vie. Peter perd de nombreux emplois à cause des responsabilités entraînées par le masque de l’araignée. Miles, quant à lui, a du mal à se concentrer sur son inscription à la fac, tant New York a besoin de lui.
Cette dualité, on la retrouve aussi à travers des transformations physique et morales (et je ne parle pas de Miles).Il va de soi que nous entrons dans une partie spoilers. Les métamorphoses physiques sont nombreuses dans cet épisode. On peut mentionner la transformation spectaculaire du docteur Connors en Lézard, et bien sûr celle de Peter Parker lorsque son costume devient plus organique et noir. Mais ces changements physiques n’auraient pas d’impact s’ils n’avaient pas autant d’effet sur l’histoire, la mise en scène ou le développement des personnages. Il va de soi que Peter est confronté à une part plus sombre de lui-même, au risque de décevoir ses proches et de basculer dans le côté obscur. Ce dilemme moral concerne d’autres personnages, à commencer par Miles, qui doit toujours lutter contre la tentation de tuer Mister Negative, le vilain ayant causé la mort de son père. New-York elle-même est transfigurée lorsque Venom s’emploie à contaminer tous ses habitants. Je ne m’attendais pas à une écriture aussi maîtrisée, peut-être à cause des récents films de super-héros que j’ai pu voir. Fin des spoilers.
Une suite attendue implique de grandes responsabilités
Les joueurs et joueuses ont tendance à attendre une véritable révolution à chaque fois qu’un nouvel épisode de leur saga préférée sort. Je pense que c’est un tort. On ne peut pas s’attendre à un reboot à chaque nouvel opus, au point de crier – fort injustement – au DLC, dès lors qu’une suite est dans la continuité de ce qui a été réalisé. Ainsi, Marvel’s Spider-Man 2 ne propose pas d’évolution drastique au niveau du gameplay. Pourquoi le ferait-il, dans la mesure où celui-ci fonctionnait déjà très bien ? En revanche, il propose quelques nouveautés bienvenues, et surtout une meilleure maîtrise de certaines mécaniques.
Là où la saga a toujours brillé, c’est au niveau de son sens du spectacle. Les cinématiques et les combats de boss sont impressionnants. Spider-Man 2 nous met d’ailleurs dans le bain, ou devrais-je dire dans le bac à sable, en nous incitant à affronter le gargantuesque Homme Sable, dès son intro. On peut, sans mal, qualifier cet opus de jeu fun. Il est difficile de s’ennuyer entre les quêtes, dans la mesure où le mode de déplacement est à lui seul très ludique. C’est toujours un plaisir de se balancer d’une toile à une autre afin de traverser New York, et ce même si la map contient plus de quartiers qu’avant. C’est si ludique qu’on rechigne à utiliser les voyages rapides, pourtant déblocables. Par ailleurs, chaque trajet est ponctué d’appels téléphoniques faisant avancer la narration, ou commentant l’actualité de façon humoristique. Je pense notamment aux commentaires du très agréable J. Jonah Jameson. Spider-Man n’est plus seulement capable de sauter et de se balancer, il peut désormais planer. Le delta-toiles est ni plus ni moins un gadget mais force est de constater qu’il a son utilité dans certaines missions, ou tout simplement pour aller rapidement d’une rive de New York à l’autre.
La cité est bien remplie par des quêtes secondaires bien dosées. Non seulement elles ne sont pas trop nombreuses, mais elles évitent aussi de se répéter. D’aucuns diront que le nombre de mini-jeux différents est trop important. Je dois reconnaître qu’il s’agit d’un cache-misère, mais je me suis justement laissée prendre au jeu. On se doute que les quêtes très annexes et les collectibles ne sont là que pour gonfler la durée de vie, mais c’est tout de même plus plaisant quand ils sont diversifiés et ont une finalité, comme une quête finale plus travaillée ou une cinématique faisant référence à un personnage en particulier. C’est beaucoup plus gratifiant. Certains mini-jeux permettent même de mettre en exergue les fonctionnalités de la manette DualSense. C’est très léger et anecdotique mais je me devais de le souligner, tant l’ensemble des jeux PS5 semblent oublier combien cette manette a du potentiel. Ce que j’apprécie moins, c’est les quelques bugs auxquels j’ai été confrontée, alors que je n’en ai souvenir d’aucun, dans les précédents opus. Mais cela reste anecdotique.
Malgré la gravité et la profondeur qu’il est capable de démontrer, Spider-Man 2 n’oublie pas qu’il parle de « l’araignée sympa du quartier ». En ce sens, le contenu secondaire et chill fait du bien. Le jeu est à la fois généreux et inclusif. Je pense à l’énorme inventaire de costumes à débloquer mais aussi aux nombreux hommages rendus à des minorités, qu’il s’agisse de la communauté afro-américaine si chère à Miles Morales, d’une mission où l’on incarne Hailey, l’amie malentendante de Miles, ou encore une quête très secondaire mettant à l’honneur un couple de lycéens gay.
Pour finir, et je vais ici spoiler, le jeu est généreux en terme de références aux comics et différentes itérations de Spider-Man, ou de Marvel en général. Lors de l’apparition de Black Cat, j’ai été agréablement surprise de croiser une allusion à Doctor Strange. Il y a aussi beaucoup de références auxquelles j’ai été moins réceptive, car je suis loin d’être une experte en la matière. Ce qui est certain, c’est que les fans de l’homme-araignée seront comblés. Comme le MCU nous y a habitués, Spider-Man 2 propose des scènes post-génériques donnant des indices sur la suite. Ainsi, Norman Osborn en veut farouchement aux Spider-Men, et la fille du nouveau compagnon de la mère de Miles pourrait être Silk. Je suis très impatiente de voir où Insomniac Games va nous mener. Fin des spoilers.
La duplicité rusée et spectaculaire du gameplay
La duplicité ne se manifeste pas seulement dans la narration ou le développement des personnages, mais aussi dans le gameplay. C’est un coup de maître car cela impacte directement les joueurs et joueuses. Naturellement, nous incarnons tour à tour Peter Parker et Miles Morales. Le jeu a trouvé un juste équilibre entre la similarité de leur gameplay et la différence. Ainsi, on peut choisir d’incarner un Spider-Man ou l’autre, lorsqu’on explore New York. Ils possèdent un arbre de compétences commun, mais aussi un arbre personnalisé, chacun. Les combats vont varier selon qu’on incarne Peter, porteur du symbiote, ou Miles, capable de manier l’invisibilité ou la bio électricité. Certaines quêtes annexes sont consacrées à un Spider-Man en particulier, sans oublier l’histoire principale, proposant un équilibre bien rodé, entre les deux protagonistes.
Les phases de gameplay sont aussi pleines de polyvalence. Bien que l’on passe le plus clair de son temps à explorer New York ou à se battre, certaines quêtes principales ont lieu dans la vie civile. Je pense notamment à une soirée que Peter, Harry et MJ décident de passer au parc d’attraction de Coney Island. Cette mission peut sembler anodine mais elle souligne leur lien d’amitié, tout en attisant notre empathie envers eux. D’autres missions, plus rares, permettent d’incarner MJ. Il s’agit de phases d’infiltration, similaires au premier volet, mais autrement plus intéressantes. Je dirais même que l’une d’elles, par sa tension, et par l’aptitude de MJ à se défendre avec un pistolet, m’a rappelé l’ambiance de Resident Evil.
Marvel’s Spider-Man 2 est un vrai caméléon, en terme d’ambiance. Le jeu est capable de nous mener de scènes chill, en passant par des plaisanteries de Peter, jusqu’à des moments spectaculaires voire emplis de tension. Et nous entrons dans une nouvelle phase de spoilers. Certaines scènes, sans pour autant devenir effrayantes, ont une ambiance qui n’a rien à envier à certains jeux d’horreur. La mise en scène autour du Lézard ou des différentes itérations du symbiote, pour ne citer que cela, poussent au respect.
Je dirais même que j’ai été carrément scotchée par certains rebondissements, effets de mise en scène ou partis pris au niveau du gameplay. Alors qu’il est contrôlé par le symbiote, Peter entre dans un combat sanguinaire contre Kraven. Le chasseur, connaissant le point faible de la tenue organique, frappe dans une cloche afin de faire du bruit. On s’emploie alors à immobiliser la cloche avec des toiles de Peter, avant de revenir au combat. Or, lorsque Peter veut tuer Kraven, Miles intervient. Alors, un combat très similaire commence, dans la même arène. Nous incarnons désormais Miles, contre Peter. La même cloche, qui était un obstacle, devient une alliée précieuse. Il convient de la secouer pour déstabiliser l’adversaire et le neutraliser. Ce combat nous confronte à un personnage que nous avons incarné et que, de fait, nous apprécions. Ce n’est pas sans rappeler un certain passage de The Last of Us Part II. Mais cela va peut-être encore plus loin, grâce à cet effet miroir provoqué par l’arène de combat.
Et j’étais loin d’être au bout de mes surprises. En effet, quand le symbiote retrouve le corps d’Harry Osborn, celui qui était un allié précieux, se transforme en Venom. Nous incarnons tout à coup l’ennemi principal du jeu ! Ce chapitre est extrêmement satisfaisant, tant Venom est résistant et puissant. On se surprend à détruire nos adversaires, avec une sauvagerie grisante. Mais dans un coin de notre esprit, on ne peut s’empêcher de se dire qu’on va devoir finir par affronter ce titan invincible… Enfin, le jeu atteint un autre paroxysme en contaminant MJ, à son tour. Ainsi, elle devient Scream. C’est au cours d’un combat féroce que Peter et elle règlent leurs petits problèmes de couple. Spider-Man 2 nous fait incarner des protagonistes et des antagonistes, car les deux se confondent. De la même manière, l’on doit parfois affronter des personnages à qui l’on est attachés. Cette dualité nous impacte donc directement, en tant que joueurs et joueuses. Fin des spoilers.
Conclusion
Marvel’s Spider-Man 2 saura charmer les fans de l’homme-araignée mais aussi celles et ceux qui, comme moi, ont lancé le jeu par pure curiosité. Bien qu’il ne propose pas de changements drastiques, en terme de gameplay, il a su s’améliorer. Le fait que la durée du jeu n’excède pas 30 heures (Platine compris) démontre que les studios commencent enfin à privilégier la qualité à la quantité. Spider-Man 2 m’a surtout surprise par les prouesses de son écriture et de sa mise en scène. Avec un antagoniste comme Venom, le jeu promettait d’explorer tous les méandres de la dualité et il va encore plus loin que je l’espérais. Non seulement l’histoire, grâce à ses personnages ambivalents et ses rebondissements, est passionnante ; mais l’ambiance et le gameplay sont tout aussi captivants. Je ne peux que vous inviter à vous lancer vous-mêmes dans l’aventure de Marvel’s Spider-Man 2.
Assassin’s Creed Mirage, le dernier né d’Ubisoft, est sorti au mois d’octobre 2023. Il s’agit du 13e opus canonique d’une saga à laquelle je n’ai pas joué en totalité, mais dont j’apprécie les différentes itérations. Dernièrement, les Assassins étaient projetés dans de vastes mondes ouverts, dont les mécaniques de gameplay empruntaient tout aux RPG. Si ces épisodes ont du charme à leur façon, ils ont été beaucoup décriés à cause de l’énormité de leur carte, pas forcément jonchée de contenu intéressant.Assassins’s Creed Mirage promettait un contenu plus restreint, se rapprochant des jeux originels. Nous étions donc toutes et tous curieux de vérifier où aboutirait ce retour aux sources.
« Moi je viens d’un pays de désert infini… » : La Ville ronde de Bagdad
L’intrigue se situe cette fois-ci à Bagdad, en Irak, au début du 9e siècle.Les joueuses et joueurs incarnent Basim, un simple voleur qui rejoint la Confrérie des Assassins. Il sera alors formé afin de mettre fin à la corruption qui s’étend depuis le cœur de la Ville ronde de Bagdad. Fait plus ou moins étonnant : les phases de gameplay se situant hors de l’Animus ont bel et bien disparu de la saga. Pour rappel, L’Animus est une technologie permettant de projeter la conscience d’une personne au sein d’un personnage historique, afin de découvrir son histoire, grâce à une simulation du passé ultra-réaliste. Bien sûr, cela ne peut fonctionner que si l’utilisateur de l’Animus possède un ADN commun avec le personnage dans lequel il va se réincarner. Les mentions à cette partie d’Assassin’s Creed sont très discrètes, si l’on excepte la fin, mais je dois admettre que ce n’est pas pour me déranger. Ainsi, le rythme du jeu n’est plus inutilement haché, et cela rend l’identité de Basim d’autant plus intrigante. En effet, celui-ci est hanté par des cauchemars oppressants, dans lesquels ils est pourchassé par un Djinn. Ce que j’ignorais aussi, mais qui n’est pas anodin, c’est que Basim apparaît également dans le précédent volet : Assassin’s Creed Valhalla, ayant pour contexte la mythologie viking, à peu près à la même époque.
« Je m’appelle Bagdad » : Un système circulaire bien pensé
Mais la révolution d’Assassin’s Creed réside dans son gameplay. Certes, révolution n’est pas le terme adéquat dans la mesure où la saga fait un réel retour aux sources. Mirage n’est pas un RPG se déroulant dans un vaste monde ouvert. A l’instar des jeux précurseurs, il se contente de nous faire explorer Bagdad et ses alentours. Or, la ville est très bien structurée et le dosage de son contenu bien équilibré. Assassin’s Creed Mirage n’invente rien, mais il le fait bien. Le jeu est très circulaire, ce qui le rend à la fois original et agréable. Je m’explique. L’interface elle-même des quêtes ne ressemble pas à une liste verticale de tâches, mais à des missions présentées sous forme de cercles, se reliant progressivement les uns aux autres. Non seulement cela permet de poursuivre la quête principale avec une grande liberté, mais cela accentue l’immersion, car nous avons l’impression que Basim remonte jusqu’au milieu de la toile de l’araignée, au fur à mesure qu’il découvre des indices durant son enquête. Ce qui est circulaire également, c’est Bagdad elle-même. La ville se démarque du désert par des remparts rondes, et semble composée de plusieurs cercles. Au fur et à mesure que l’intrigue se dénoue, les joueuses et joueurs sont naturellement amenés à se rapprocher du cœur de la Ville ronde, où se situe le Palais du Calife. Ainsi, il est normal que la population paraisse moins pauvre et la sécurité plus renforcée tandis que l’on s’enfonce dans la cité. Le jeu est bref (il m’a fallu moins de 30h pour le terminer, mais je l’ai platiné et j’ai largement pris mon temps), cependant il est bien pensé, ce qui rend la progression et l’exploration fort plaisantes.
« Yamakasi » : Du Parkour et des mécaniques de gameplay habituelles
Bien entendu, on y retrouve tous les éléments de gameplay habituels. Basim est un expert en Parkour, capable d’escalader presque toutes les surfaces et de se déplacer très rapidement dans la ville ; bien qu’il soit pratique d’utiliser une monture, surtout lorsqu’on se rend dans le désert. La ville de Bagdad foisonne de choses à faire, qu’il s’agisse de détrousser des passants, de monter au sommet de certains bâtiments pour éclaircir la map ou de chercher des collectibles. Ubisoft semble avoir pris en compte certaines critiques car les collectibles en question sont moins nombreux que d’habitude, bien que la quantité ne soit pas négligeable. Le plus frappant, c’est qu’il n’est pas toujours question de se rendre bêtement sur un point de la carte pour récolter un objet. Par exemple, certains coffres nécessitent de se creuser la tête quelques instants pour comprendre comment les obtenir. Cela semble anodin mais nous sommes tellement guidés et peu amenés à réfléchir, dans les jeux vidéo, de nos jours, que ça fait du bien. D’autres collectibles sont liés à des quêtes secondaires, ce qui renforce l’illusion de leur utilité. Mais attention, Ubisoft restant fidèles à eux-mêmes, la quête des livres cachés est buguée, ce qui peut rendre laborieuse l’obtention des trophées « érudit » et « explorateur ». Enfin, pour faciliter le tout, Basim peut compter sur son aigle, Enkidou, pour repérer les gardes ou les points stratégiques de la map.
« Tu as tué des gens ? / Oui, mais c’était des méchants. » : Contrats et Missions
La plupart des missions consistent à s’infiltrer dans un lieu afin de quérir des informations, sauver un prisonnier ou tuer quelqu’un. Il n’y a aucune prouesse en terme d’écriture mais les quêtes ne se répètent guère et certaines s’avèrent même sympathiques. Il est par exemple plaisant de voir Basim emprunter un déguisement de malade, ou d’eunuque, selon les endroits où il souhaite s’infiltrer. Ceci étant dit, ayant la patience et la délicatesse d’un éléphant dans un magasin de porcelaine, l’infiltration ne dure jamais bien longtemps avec moi. Basim n’est pas très résistant au corps à corps, mais il possède toute une artillerie de gadgets rendant les combats tout de même ludiques. Outre les quêtes principales, le jeu dispose de quêtes annexes (nommées contrats) déjà plus redondantes, mais nécessaires si l’on souhaite débloquer toutes les compétences. J’ai trouvé les Récits de Bagdad mieux scénarisés et intéressants, puisqu’ils nous amènent à rencontrer différents individus, ayant besoin de services un peu plus diversifiés. Somme toute, cet Assassin’s Creed revient radicalement en arrière. Même au niveau des graphismes, je ne trouve pas qu’il soit à la hauteur des facultés de la PS5. Je n’ai pas compris pourquoi Basim a 20 ans, alors qu’il a l’air d’en avoir 40. Le jeu est bien sûr sauvé par une direction artistique des plus charmantes, qui, combinée à l’exploration bien dosée, rend Bagdad très attrayante.
« Ne sois pas désolé, sois meilleur » : L’explication de la fin
Pour conclure, il me semble important de revenir sur la fin du jeu. De fait, ce paragraphe contient des spoilers (sur Mirage et God of War). Après avoir mis fin à la menace de ses ennemis, Basim retourne là où il a été formé, non seulement parce que l’école est prise d’assaut, mais aussi parce qu’il souhaite explorer le Temple, afin d’en apprendre plus sur ses cauchemars et sa propre identité. Son mentor, une meurtrière aguerrie du nom de Roshan, tente vainement de l’en empêcher. Basim n’en fait qu’à sa tête et s’y rend, en compagnie de sa vieille amie, Nehal. Là-bas, le héros découvre un étrange sarcophage ainsi qu’une vérité dérangeante : Nehal n’était que le fruit de son imagination. Quand il sort du Temple, Basim n’est plus le même car Enkidou préfère le griffer plutôt que de lui apporter son soutien. J’ai d’abord pensé qu’il s’agissait d’une allusion très subtile à l’Animus. Ainsi, Nehal serait la descendante de Basim, restée bloquée dans la réalité virtuelle, pour une raison ou une autre. Cela expliquerait pourquoi elle n’était pas vraiment là, ainsi que leur fusion finale. Mais n’ayant pas fait le jeu précédent, il me manquait des informations cruciales. Basim est a priori un antagoniste dans Assassin’s Creed Valhalla, car il est une réincarnation du Dieu de la malice Loki. Le sarcophage du Temple, lui, est un appareil des Isus. Il s’agit de la première civilisation de la mythologie du jeu, dont la haute technologie a inspiré les travaux d’Abstergo Industries, les créateurs de l’Animus. Nehal n’est donc pas une descendante de Basim mais bel et bien la part refoulée de sa personnalité : en d’autres termes, Loki. Je trouve intéressant qu’un personnage masculin et l’autre, féminin, fusionnent ; car Loki est après tout un changeur de peau. A la fin du jeu, Basim n’est plus l’allié ni de Roshan, ni d’Enkidou, puisque la personnalité de Loki a repris le contrôle, après avoir été étouffée pendant bien longtemps, à cause du châtiment d’Odin. Pour mieux appréhender tout cela, il faut bien sûr avoir quelques connaissances de la mythologie nordique. Loki décide ainsi de repartir dans les pays nordiques. Le Djinn hantant les cauchemars de Basim, quant à lui, symboliserait l’un de ses tortionnaires. Bien qu’il m’ait fallu du temps et des recherches pour la comprendre, j’ai beaucoup aimé cette fin car elle est à la fois surprenante, subtile et efficace. Elle m’a par ailleurs beaucoup rappelé l’épilogue de God of War, où l’on apprenait que le vrai nom d’Atreus était Loki.
Épilogue
Somme toute, j’ai tendance à conseiller cet Assassin’s Creed Mirage.Il ne s’agit pas d’un chef-d’œuvre, dans la mesure où il donne l’impression de retourner plusieurs années en arrière. Je ne parle pas du fait de se retrouver à Bagdad, au neuvième siècle, mais bel et bien de la qualité de certains graphismes, ou du retour de vieilles mécaniques de gameplay. Et pourtant, la saga recule pour mieux sauter. J’ai beaucoup apprécié ce retour aux sources car la map est de taille raisonnable, ce qui réduit grandement la quantité de quêtes redondantes, et surtout celle des collectibles. J’ai aimé par-dessus tout l’aspect circulaire du jeu, qu’il s’agisse de l’interface des quêtes ou de la structure de Bagdad, laquelle s’avère plaisante à arpenter, grâce à de jolis panoramas et à une bande originale discrète, mais parfois bien efficace. Compte tenu de sa fin, Assassin’s Creed Mirage est tout à la fois une suite et un reboot de reboot de la saga, mais il est fort plaisant et promet peut-être un avenir plus glorieux pour les Assassins.
J’ai terminé deux jeux indépendants dernièrement et, bien que les deux titres m’attiraient, j’ai été agréablement surprise par l’un, mais irrémédiablement déçue par l’autre. Je me demande ce qui, dans les similitudes ou les différences d’Endling et Jusant, a pu me satisfaire ou – au contraire – me rebuter. Endling – Extinction is Foreverest un jeu développé par Herobeat Studios en 2022, tandis que Jusant, une production Don’t Nod, est paru en octobre 2023.
Deux dystopies rudes et douces à la fois
Endling peut être considéré comme un jeu d’aventure voire de survie. Une jeune mère renarde tente de protéger ses petits, de les nourrir et de les éduquer, à travers un monde bien rude. La situation dégénère lorsque l’un d’eux est kidnappé, car elle essaie aussi de le retrouver. L’intrigue du jeu de plates-formes Jusant, si on peut la qualifier comme telle, est bien plus cryptique. Un(e) jeune vagabond(e) explore un monde désolé, et s’évertue à escalader une immense tour, en compagnie d’une étrange créature ronde qui couine : le Ballast.
Dans les deux cas, il s’agit de jeux silencieux, presque contemplatifs, reposant sur une narration environnementale. Endling se déroule dans un monde dystopique mais sans doute proche du nôtre, chronologiquement. Les éléments de science-fiction sont en effet très discrets. La survie de la renarde et de sa famille est dérangée par le changement brutal des saisons, la pollution et surtout par la cruauté des humains. Sans surprise, le contexte de Jusant est encore plus cryptique et mystérieux. Le/la protagoniste croise les artefacts laissés par une civilisation perdue et semble rechercher de l’eau. On suppose donc qu’il s’agit aussi d’un univers dystopique. Toutefois, l’ambiance semble beaucoup plus éloignée de notre réalité.
La sensation si relative de la répétitivité
Avec ce genre de jeux, je m’attends – à tort ou à raison – à une expérience douce, chill, mais ayant toutefois le don de me surprendre ou de me faire réfléchir. Je dois dire qu’Endling remplit toutes les cases. J’ai pris beaucoup de plaisir à suivre les 30 jours de l’histoire, au fur et à mesure que le territoire de la renarde s’étend. L’expérience a été douce, apaisante et certains points d’intérêt sont venus rendre la map plus passionnante. Je n’ai malheureusement ressenti rien de tout cela dans Jusant, dont la maniabilité du gameplay m’a trop déplu pour rendre l’expérience chill, et dont les niveaux ne m’ont jamais transportée, même si certains s’avéraient – heureusement – plus ludiques que d’autres. Ce jeu m’a semblé répétitif, et l’autre non.Et pourtant, un jeu vidéo est par essence répétitif. A moins d’appartenir à plusieurs genres, et même s’il renouvelle souvent ses mécaniques de gameplay ; celles-ci demeurent généralement les mêmes. Tout dépend si l’on arrive à se laisser transporter par l’univers ou non, et ceci est tellement subjectif !
Bien sûr, le gameplay est important. A cet égard, la différence entre Endling et Jusant est paradoxale. Le premier est, je le rappelle, un jeu de survie. Les renardeaux peuvent mourir à cause d’un prédateur ou de la famine. Certes, Endling n’est pas difficile, car on peut toujours recharger le début de la journée, en cas d’échec, mais l’on se sent tout de même responsable de ces bêtes. Je dirais même qu’un attachement émotionnel naît avec les personnages. En revanche, il est impossible de mourir dans Jusant. De coutume, je n’ai rien contre ce type de jeux, bien au contraire, mais on ne se sent ni en danger, ni investi. Je sais que l’attachement envers les personnages est quelque chose de majeur, dans mon évaluation d’une œuvre, et je n’ai rien ressenti, ni pour le/la vagabond(e), ni pour la créature qui l’accompagne. De surcroît, malgré l’absence de game over, Jusant n’est pas forcément plus simple et demande une certaine dextérité.
Le gameplay d’Endling est assez minimaliste, mais aucun jour ne se ressemble. Bien des détails font la différence. Jusant, quant à lui, possède plusieurs chapitres dont l’ambiance et les défis de traversée changent, mais plusieurs m’ont semblé ennuyeux, soit parce qu’ils manquaient d’originalité, soit parce que la maniabilité m’a définitivement déplu. Le jeu n’est pas difficile pour les gamers aguerris mais je ne le conseille pas aux joueurs très ponctuels. Chaque gâchette de la manette contrôle une main du personnage qui escalade. Les manipulations sont donc répétitives et pas forcément confortables. Un moment du jeu m’a semblé difficile, non pas parce qu’il l’était réellement, mais à cause du manque de repère et surtout de maniabilité.
Enfin, ce qui prime dans un jeu indépendant, c’est naturellement sa direction artistique. J’ai été absolument conquise par celle d’Endling qui donne l’impression de se promener dans un dessin animé, en 2D. Pourtant, le jeu est bel et bien en 3D. Ce paradoxe est assuré par les mouvements latéraux des personnages. Quant à Jusant, bien que les graphismes soient jolis et qu’il y ait plus d’un panorama valant le détour ; je l’ai trouvé très quelconque. Je peine à comprendre comment il se démarque d’autres jeux indépendants, car ni ses graphismes ni sa direction artistique ne m’ont semblé très originaux. Il va peut-être réussir à se démarquer par sa verticalité.
J’ai déjà fait plusieurs fois Endling, et il est possible que je replonge dedans à l’avenir. Même si c’est à cause de raisons personnelles, l’histoire – pourtant toute simple – m’a beaucoup émue. Malheureusement, je n’ai rien ressenti devant Jusant, que je doute de relancer un jour. Et pourtant, objectivement, il ne s’agit sans doute pas moins d’un bon jeu qu’Endling…
Conclusion
Mon avis envers Endling et Jusant ne dépend guère de leurs différences. La plus marquante est sans doute le gameplay très horizontal de l’un, et la progression toute verticale de l’autre. Les deux jeux ont même des points communs, qu’il s’agisse de leur univers dystopique et paisible à la fois ou de leur narration purement environnementale. Par ailleurs, leurs mécaniques de gameplay sont si simples et minimalistes qu’on pourrait les qualifier de répétitives. Pourtant, un jeu est un coup de cœur tandis que le deuxième m’a déçue. Peut-être est-ce une question d’originalité. Certes, les jeux mettant en scène des renards sont innombrables (comme je l’avais déjà expliqué dans un article), mais j’ai rarement fait un jeu de survie dénué de pression ou de dimension horrifique, durant lequel les jours défilent, comme dans un calendrier. Jusant, pour sa part, s’inspire de titres iconiques comme Journey ou Rime, mais je peine réellement à voir comment il s’en démarque. Or, son problème de maniabilité n’a pas joué en sa faveur. Mais ce qui compte par-dessus tout, selon moi, c’est l’investissement émotionnel que l’on va accorder à l’histoire ou aux personnages, et cela est tellement subjectif…
Il s’agit sans doute de l’un des articles où je donne le plus mon avis à chaud. Il est basé sur mon ressenti plus que sur des recherches, c’est pourquoi je serais ravie d’avoir votre avis sur la question. Si vous vous voulez en savoir davantage sur Endling, qui fut un réel coup de cœur, vous pourrez bientôt retrouver mon test sur Pod’Culture. Quant à Jusant, tentez donc l’aventure. Le jeu aura peut-être plus de chance auprès de vous, qu’avec moi !
Il y a bien longtemps, dans une galaxie pas si lointaine, BioWare pactisait avec Lucas Arts et Aspyr, afin de concevoir ce qui est – pour beaucoup – le meilleur jeu Star Wars jamais développé. Star Wars Knights of the Old Republic sortit initialement en 2003. S’il s’agissait avant tout d’un jeu PC et X-Box, il fut également porté sur Switch en 2021. C’est d’ailleurs sur cette console que j’ai retenté l’aventure, après l’avoir – je l’avoue – moult fois poncée sur PC. KOTOR a eu droit à tellement d’histoires dérivées (jeu en ligne, comics, romans,…) qu’il semble parfois difficile de s’y retrouver. Il s’agit avant tout d’un RPG proposant une aventure solo (rien à voir avec Han). L’intrigue se déroule quatre millénaires avant l’apogée de l’Empire Galactique vu dans les films ; à une époque où les Sith, encore nombreux, menacent à la fois l’Ordre Jedi et l’Ancienne République. Le seigneur Sith le plus connu est alors un ancien héros : Dark Revan. Mais ce guerrier légendaire a été vaincu, tant à cause de l’assaut des Jedi que de la trahison de son apprenti : le terrible Dark Malak. L’histoire du jeu commence dans un vaisseau pris d’assaut par les Sith, car il abrite la célèbre Jedi Bastila Shan. Le protagoniste que nous incarnons – un soldat – se réveille dans une cabine du vaisseau. De fait, et au rythme d’une bande originale de haute qualité, nous sommes tout de suite plongés dans le feu de l’action.
L’équipe part à bord de l’Ebon Hawk pour trouver un moyen de neutraliser Dark Malak (à droite).
I). Une leçon pour les RPG modernes
Star Wars Knights of the Old Republic a vingt ans. J’exagère à peine en affirmant qu’il pourrait encore donner de nombreuses leçons aux RPG actuels. Le protagoniste du jeu est entièrement personnalisable, qu’il s’agisse de son genre, de sa classe, de son apparence ou de ses aptitudes. Nous ne savons pas grand chose sur lui (ou elle), dans la mesure où il souffre d’amnésie. Tous ces codes paraissent très classiques, me direz-vous, mais cela justifie que le héros ait tout à apprendre. Par-dessus tout, il a une marge d’évolution morale, que l’on trouve dans très peu de RPG actuellement. Nos choix d’actions ou de dialogues permettent en effet de le faire basculer vers le côté lumineux ou obscur de la Force.
A). Un monde immersif et vivant
KOTOR est un RPG comme je les aime, car il est extrêmement riche, sans pour autant être grotesquement démesuré. L’équipage de l’Ebon Hawk (le vaisseau que nous possédons) est amené à explorer sept planètes, et quelques autres lieux moins vastes. Les planètes en question possèdent des endroits aux ambiances différentes ; mais l’espace demeure relativement restreint. Bien sûr, cela est dû aux contraintes techniques de l’époque, mais c’est à mes yeux amplement suffisant. Je préfère de loin une planète intelligemment utilisée et fourmillant de surprises ou de détails, plutôt que des espaces gigantesques, dans lesquels on ne sait pas où donner de la tête, et surtout où les quêtes – si on peut les appeler comme telles – se répètent inlassablement. Oui, les lieux de KOTOR sont restreints mais vivants.
Des hauteurs vertigineuses de Kashyyyk aux profondeurs de Manaan.
Depuis quelques années, certains RPG proposent des villes gigantesques dans lesquelles il est impossible de rentrer dans les maisons ou de parler aux PNJ. Au contraire, chaque porte de KOTOR peut abriter un secret. Les personnages secondaires et autre PNJ ne foisonnent pas, mais sont généralement marquants. On peut discuter avec eux pour en apprendre davantage sur la planète ou pour être confronté à un choix moral. Mais c’est rarement pour récolter une énième quête fedex, comme si nous étions le livreur Amazon du quartier. Il arrive même que des événements s’enclenchent lorsque nous arrivons à un endroit particulier, à tel point du jeu. Ils ne lancent alors pas une cinématique verbeuse qui casse le rythme, mais rappellent simplement que la planète est habitée et vivante. Par exemple, quand un conflit éclate, nous sommes libres de nous interposer ou non. Cela peut être pour défendre la victime comme pour l’extorquer davantage. En deux mots, tout a du sens et une finalité.
Les planètes ne sont en rien répétitives. Le climat désertique de Tatooine s’oppose à la forêt de Kashyyyk ou au monde marin de Manaan. Dans chaque lieu, le peuple et le bestiaire varient. Par-dessus tout, chaque planète dispose d’un contexte géo-politique spécifique, et influençable. Nous pouvons ainsi prendre le parti d’un clan ou d’un autre, ce qui aura un impact sur l’avenir du monde. L’opposition se fait souvent entre un clan colonisateur et un peuple indigène, ou entre un parti écologique et l’autre peu regardant du bien-être de la nature. Et ce n’est pas aussi manichéen qu’on pourrait le penser. Je pense à Taris, où la population est hiérarchisée selon sa situation sociale, les aliens étant méprisés et les malades étant carrément prisonniers du quartier souterrain, où ils peuvent être transformés en rakgoules. Est-il alors plus juste d’offrir l’antidote aux contaminés, ou bien de les laisser mourir afin de fournir l’échantillon à un docteur qui pourrait en sauver un plus grand nombre ? Bien que nous explorons les planètes pour chercher des indices sur les Sith, nous n’avons pas l’impression d’aller d’un point A à un point B, pour suivre vulgairement l’histoire. Nous savons que nous laisserons une empreinte sur la planète visitée. Et en plus, cela contribue à notre évolution vers le côté obscur ou lumineux de la Force. Manaan est assez marquante dans ce sens puisque les décisions que nous prenons, dans la station (stressante) d’extraction du Kolto, peuvent entraîner la gratitude des habitants de Manaan ou – au contraire – les inciter à nous bannir.
Le héros, Carth et Bastila visitent Dantooine, tandis que des apprentis Sith s’entraînent sur Korriban.
Comme si cela n’était pas assez passionnant, la plupart des quêtes peuvent se résoudre de bien des manières. Il est possible de perfectionner ses talents en persuasion ou en informatique pour éviter certains combats, en manipulant un PNJ ou en piratant un ordinateur pour neutraliser son système de sécurité (robots, tourelles, etc). Je ne prétends pas que KOTOR soit le premier – ni même le dernier RPG – proposant tout cela ; je trouve toutefois que ce n’est pas aussi commun que je le souhaiterais, et que tout cela a tendance à se perdre, dans la multitude de pseudo RPG que nous avons aujourd’hui. Aïe, j’ai l’impression de parler comme un boomer ! Et c’est d’autant plus vrai que je suis influencée par la nostalgie. Je n’oublierai jamais la première fois que j’ai mis les pieds sur Korriban et que j’ai découvert les Sith, à l’apogée de leur pouvoir. On y trouve en effet une académie Sith dont on peut suivre les enseignements, pour l’infiltrer ou au contraire, pour la rejoindre réellement. Je vous laisse deviner ce que j’ai fait…
B). L’équipage de l’Ebon Hawk
Mais ce n’est pas tout ! Ce qui rend KOTOR si vivant, ce sont ses personnages jouables. Le protagoniste est rapidement épaulé par Bastila et Carth. La première est une Jedi au caractère bien trempé qui nous instruit et nous conseille. Le second est un héros de la République, qui redoute par-dessus tout la trahison. Il n’y a qu’en leur parlant moult fois qu’on est amenés à découvrir leur passé. S’ils font partie de notre équipe à certains moments ou endroits, ils sont susceptibles de réagir à nos choix (de façon positive ou négative) ou de rencontrer quelqu’un de leur passé.
L’équipe de KOTOR au grand complet. A droite, Bastila refusant des cookies.
L’équipe peut aussi être constituée de Mission, une jeune Twi’lek et Zaalbar, un Wookie. Canderous est un Mandalorien qui n’a pas peur de se salir les mains pour arriver à ses fins. Il permet de mettre la main sur T3-M4, un droïde utilitaire. On peut aussi mentionner Jolee, un vieillard maniant un sabre-laser mais dont le positionnement est ambigu. Enfin, certains personnages peuvent être manqués, comme HK-47, que l’on peut trouver dans une vieille boutique de Tatooine. Il s’agit d’un droïde assassin étrangement sarcastique. Juhani, quant à elle, est une Jedi passée du côté obscur de la Force : il ne tient qu’à vous de l’éliminer ou de parvenir à la ramener sur le droit chemin, afin qu’elle intègre l’équipe.
Comme si KOTOR n’était pas suffisamment avant-gardiste, Juhani est susceptible de tomber amoureuse de vous uniquement si vous incarnez une femme. Bref, chaque membre de l’équipe est particulier, que ce soit par sa race, son passé, ses compétences, son caractère, ses réactions et tout ce qu’il peut apporter. L’équipage de l’Ebon Hawk est l’un des plus attachants qu’il m’ait été donné de croiser. En ce sens, le dénouement de KOTOR est encore plus tragique, si l’on choisit de basculer du côté obscur. Je n’ai jamais vu une intrigue et une fin qui m’ont autant surprise, marquée et même émue. C’est tellement vrai que je n’ai jamais trop osé modifier mes choix, malgré les nombreux runs que j’ai effectués. Mais je ne dirai rien de plus, puisque le twist de KOTOR est ce qui fait tout son charme.
On va peut-être « rancor » pouvoir jouer à Kotor, mais il faut avouer qu’il y en avait bien besoin.
II). Quelles attentes pour le remake ?
En 2021, le remake de KOTOR, une exclusivité Sony, a été annoncé. En dehors d’une cinématique de quelques secondes dévoilant Dark Revan, nous n’avons pas eu grand chose à nous mettre sous la dent. Pire encore, le développement du jeu semble si laborieux que, tous les quelques mois, la rumeur veut qu’il soit annulé ou, au contraire, ravivé. Si je suis lasse de cet ascenseur émotionnel, j’ai toujours l’espoir que le jeu voit le jour, car il s’agit clairement de l’une des raisons pour lesquelles j’avais investi dans une PS5. Je suis bien sûr prête à attendre tout le temps qu’il faudra afin d’avoir un jeu correctement terminé et abouti.
KOTOR semble si parfait à mes yeux qu’on peut imaginer que je n’attends qu’un vulgaire copié-collé. Oui, et non. Ce qui est exceptionnel pour un jeu de 2003 mérite d’être perfectionné en 2023. Je voudrais que le remake soit extrêmement fidèle en ce qui concerne l’histoire où les différentes planètes à explorer. Je ne serais pour autant pas contre quelques lieux et quêtes annexes inédits, pourvu que les rajouts ne soit pas démesurés ni dénués de sens. Ne me faites pas incarner un Jedi pour aller acheter des œufs ou pour ramener un porg à son propriétaire ! Par ailleurs, force est de constater (sans mauvais jeu de mots) que le jeu originel nécessitait de faire de nombreux allers et retours qui peuvent s’avérer fastidieux pour les joueurs ne connaissant pas la progression par cœur, comme moi. J’imagine que les relations avec les autres membres de l’équipage pourraient être encore plus développées. Une amitié profonde voire une romance pourrait être possible avec chacun d’entre eux, selon notre genre, comme cela s’est vu dans Dragon Age : Inquisition. Il pourrait y avoir encore plus d’interactions entre eux et surtout, il pourrait être possible de les influencer vers le côté obscur ou lumineux de la Force, même si cela pourrait – j’en conviens – altérer l’impact de la fin de KOTOR. (Cette influence de l’équipage, on la trouvait dans la suite de Star Wars KOTOR, un jeu pas mauvais mais oubliable, que j’ai tenté de relancer dernièrement, en vain.)
Et vous, quel camp choisirez-vous ?
Mais KOTOR, premier du nom, n’a pas que des qualités. Les graphismes, en dehors de certaines cinématiques, sont extrêmement archaïques. Je rêve sincèrement de voir le jeu refait avec les graphismes photoréalistes de l’époque, mais aussi une très belle direction artistique. Plus important encore, le gameplay peut s’avérer pénible à prendre en mains pour celles et ceux n’en ayant pas l’habitude. Il s’agit de combats au tour par tour, certes dynamiques, mais qui en ennuieraient plus d’un aujourd’hui. De toute façon, la rumeur prétendait que le remake serait bel et bien un action-RPG. Enfin, certaines phases de gameplay sont carrément devenues presque injouables. Je pense aux courses de fonceurs que je trouvais déjà capricieuses à l’époque, où à l’utilisation de la tourelle, dans l’Espace, quand l’Ebon Hawk est attaqué par d’autres vaisseaux. Ah ça, KOTOR aurait davantage besoin d’être dépoussiéré qu’un certain The Last of Us Part II ! Pour finir, le héros que nous incarnons à tout d’un tank. Comme je le disais dans un précédent article, je rêve que le remake s’inspire de Star Wars Jedi Survivor pour réellement donner la sensation d’incarner un Jedi. Un personnage agile, qui explorerait les endroits les plus reclus, même en verticalité, rendrait l’exploration très agréable. Par-dessus tout, les combats, que l’on choisisse d’utiliser son sabre ou la Force, méritent un nouveau souffle à la fois épique et dynamique.
Voilà, il me semble avoir rappelé tout l’amour que j’éprouve pour Star Wars KOTOR, et expliqué pourquoi j’espère tant qu’un remake voit le jour. Je ne peux que vous encourager à découvrir le jeu original par vous-mêmes, soit dans l’optique de patienter plusieurs années, soit parce que son remake ne verra peut-être jamais le jour. Dans tous les cas, que la Force soit avec vous.
La piel que habito est un film de Pedro Almodóvar sorti en août 2011. C’est aussi et surtout l’adaptation d’un roman de Thierry Jonquet,Mygale, sorti en 1984 et dont l’action se situait en France. Bien que le fil, non pas de l’araignée, mais bien le fil rouge, soit le même ; on peut plutôt parler d’adaptation libre. En effet, Pedro Almodóvar se permet de modifier quelques ficelles de l’intrigue, mais aussi de changer ou ajouter certains personnages secondaires. Quoiqu’il en soit, La piel que habito demeure un long-métrage aussi dérangeant que fascinant. Si je le trouve virtuose et captivant à visionner plusieurs fois, il va de soi qu’il n’est pas à placer sous tous les yeux, tant certaines scènes ou certains thèmes abordés peuvent déranger. La piel que habito est l’un de ces films qui heurtent les gens, comme je les apprécie tant. Il me serait difficile d’en faire l’analyse sans spoiler, aussi ne puis-je que vous inviter à aller découvrir le film, avant de revenir parcourir ces pages. L’une des premières affirmations du chirurgien Robert Ledgard (Antonio Banderas) est la suivante : « L’essence de notre identité, c’est le visage. » Les dés sont tout de suite jetés. Nous comprenons que le film va accorder une importance cruciale à l’apparence, au paraître, au regard que nous posons – nous spectateurs et spectatrices – sur ce qui nous sera présenté à l’écran. Si certains éléments sautent aux yeux, d’autres indices sont insidieusement cachés. Encore faut-il ne pas oublier que les choses sont parfois bien trompeuses. Un regard peut se fourvoyer. Un visage peut en cacher un autre. Et si le docteur Ledgard se méprenait ?
Big Brother is watching you
Des exemples de plans cadres et de regards caméras.
Le regard et le paraître ont une importance capitale dans le film d’Almodóvar. Les spectateurs ne tardent pas à comprendre que le docteur Ledgard vit dans une somptueuse villa, qui lui sert aussi de clinique. Or, une seule patiente semble y résider, ou plutôt y être enfermée : une dénommée Vera (Elena Anaya). Tout laisse croire que Robert agit comme un véritable Big Brother vis-à-vis d’elle. La chambre de Vera est solidement fermée. Il y a des grilles, partout, à commencer par les fenêtres. Non seulement Vera n’a aucune liberté, mais elle est étroitement surveillée ; comme en témoignent les nombreux téléviseurs de sécurité présents dans la maison. Où qu’il se trouve, Robert peut l’observer. Il dispose même d’un écran géant dans sa propre chambre. Mais Ledgard n’est pas le seul voyeur. Almodóvar use et abuse de regards caméras et de plans cadres pour nous faire participer, corps et âme, au voyeurisme.Ces stratagèmes contribuent à rendre l’atmosphère aussi dérangeante que fascinante, puisqu’elle flatte notre curiosité morbide. On ne se sent pourtant jamais suffoquer, car les plans sont forts esthétiques et – paradoxalement – le metteur en scène sait aussi manier l’art de la suggestion.
A revenge film
Robert fait de Vera l’instrument de sa vengeance.
Les regards que l’on pose sur La piel que habito sont à la fois habiles et naïfs. Chaque plan a beaucoup à nous apprendre, encore faut-il que nous ne soyons pas dupes. Un deuxième visionnage est sans doute nécessaire pour apprécier tous les indices laissés par Almodóvar, ici et là. Le long-métrage est semblable à une poupée russe. On croit avoir une vue d’ensemble de l’objet, mais une poupée en cachant une autre ; nous ne sommes pas au bout de nos surprises. La piel que habito est divisé en deux parties. La première dépeint la relation ambiguë entre le docteur Ledgard et sa patiente, Vera. On ignore s’ils s’apprécient ou s’ils se haïssent, mais Robert va comprendre combien il tient à elle, lorsqu’elle sera agressée par un intrus : Zeca (Roberto Alamo). La deuxième partie se déroule six ans avant et remet tout en perspective. On apprend ainsi que Robert a perdu sa femme, peu de temps après qu’elle ait été victime d’un accident de voiture. Quelques années après, il a aussi dû enterrer sa fille, qui ne s’est jamais remise de la tentative de viol dont elle a été victime. Or, Robert a identifié et retrouvé son violeur : un certain Vicente (Jan Cornet). Aussi froid et calculateur Ledgard soit-il, il a des circonstances atténuantes. Il est, de toute évidence, traumatisé par les suicides des deux femmes de sa vie. A sa place, que serions-nous prêts à faire subir à l’homme qui a tenté de violer notre enfant ? La piel que habito est, en ce sens, un pur film de vengeance. Or, la revanche de Robert est aussi inattendue qu’impitoyable. Elle est si folle qu’on en vient à se demander si elle est juste. Il force Vicente à subir une transition de genre, en lui faisant notamment subir des opérations non consenties. Ainsi, Vicente devient Vera.
Des indices subtiles
Les lieux illustrent les pensées et obsessions des personnages.
Dès le début du film, de nombreux indices laissent présager que l’histoire gravite autour d’une féminité déstructurée. On voit que Robert donne des médicaments à Vera et que celle-ci conçoit des sculptures où les corps semblent incomplets ou désarticulés. La cellule de Vera est très révélatrice. La patiente semble rechigner à porter des tenues féminines, qu’elle déchire sans vergogne, pour se mettre à coudre. Les nombreuses inscriptions sur le mur sous-entendent que Vera se trouve dans cette pièce depuis longtemps. Certains dessins représentent une entité à deux visages, ou un corps dont la tête est une maison, et l’entrejambe un simple trou béant. La maison entière de Robert est décorée avec des objets d’art, des sculptures et surtout des peintures qui évoquent des corps décharnés et déstructurés, mais aussi une féminité omniprésente. Les mannequins aux courbes féminines, on les trouve tant sur la table d’opération de Robert que dans la boutique de vêtements de la mère de Vicente. Le corps féminin et la peau incarnent un véritable objet d’obsession, au sein du film. Le twist de La piel que habito est terriblement efficace, au premier visionnage. Un deuxième regard, plus minutieux, permet pourtant de découvrir d’innombrables indices, qui ne font que rendre l’ensemble plus harmonieux et solide. La première fois que l’on voit Vicente, dans la boutique, celui-ci se tient derrière un mannequin comme s’il s’agissait de son propre corps. Il est occupé à ajuster les vêtements féminins qu’il porte. Et ce plan n’est qu’un exemple parmi d’autres. Le jeune homme est amoureux de sa collègue de travail, bien qu’elle soit lesbienne. Il veut lui offrir une robe, mais elle rétorque qu’il n’a qu’à la porter lui-même, si elle lui plaît tant. Tout était écrit à l’avance et semble, de ce fait, maîtrisé d’une main de maître. Ce n’est pas surprenant car, en dépit de son esthétisme et de ses thématiques modernes, La piel que habito s’inspire de nombreux classiques du cinéma ou de la littérature, où la science et la destinée ont une place prépondérante.
Le Prométhée moderne
On peut considérer La piel que habito comme une réécriture très libre et moderne de Frankenstein.
A mes yeux, La piel que habito ne parle pas d’une femme transgenre, puisque la transition de Vicente est forcée. On peut davantage considérer cette histoire comme une réécriture de Frankenstein ou le Prométhée moderne, un roman de Mary Shelley paru en 1818. Si Robert souhaitait d’abord se venger, il utilise ensuite Vera à des fins scientifiques. Toujours obsédé par la mort de sa femme, il désire créer une peau indestructible, qui résisterait aux piqûres d’insectes mais aussi aux grandes brûlures. Or, il entend utiliser des gênes de cochon pour cela, et cette transgenèse n’est pas éthique. Il parviendra toutefois à ses fins en multipliant les expériences sur Vera, en secret. En ce sens, Robert Ledgard a tout d’un savant fou et prêt à tout pour parvenir à ses fins. Il y arrive, d’ailleurs, ce qui ajoute au film – contrairement au roman – une part de science-fiction. Ainsi, Vera est à la fois le cobaye et la créature de Robert. « Je peux estimer que je suis terminée », lui demande-t-elle, dans l’espoir de retrouver sa liberté. Mais Vera deviendra plus la fiancée de Frankenstein, que le monstre originel lui-même.
Le masque de l’araignée
A gauche, le masque des Yeux sans visage (1960). A droite, Robert, incarné par Antonio Banderas.
La piel que habito multiplie les références, de façon volontaire ou non. Si certaines sont confirmées par le réalisateur, d’autres ne sont que le fruit de mon interprétation personnelle. Ainsi, il est avéré que le masque blanc porté par Vera rend hommage à celui du long-métrage Les yeux sans visage, réalisé par Georges Franju en 1960. Dans ce film d’horreur, un chirurgien souhaite reconstituer le visage de sa fille, après que celle-ci ait été défigurée par un accident de voiture. Il entreprend de lui greffer de la peau prélevée sur le corps d’autres jeunes filles. Les similitudes sont troublantes, bien sûr. N’oublions pas que la femme de Robert ne supporte pas de voir son reflet brûlé et défiguré, dans la vitre, ce qui l’incite à se suicider. Quant à Vera, elle commence à incarner beaucoup de figures aux yeux de Robert. Elle est sa création, un substitut de sa fille, de sa femme. Elle est à la fois l’objet de ses désirs et de ses tourments. Cette relation ambiguë, absolue et destructrice n’est pas sans me rappeler celles des protagonistes de romans gothiques. On peut notamment mentionner Notre-Dame de Paris, de Victor Hugo, dans lequel le prête Frollo ne voit plus Esmeralda comme une simple bohémienne, mais comme un fantasme féminin absolu, qu’il adore et déteste à la fois. Si ce rapprochement n’est fait que par moi seule, c’est pour mettre en exergue certains archétypes de personnages et surtout certaines formes de relations. Anecdote amusante, le roman de Thierry Jonquet s’appelle Mygale car il s’agit du surnom du chirurgien, dans le livre. Sa victime, initialement appelée Eve, l’imagine comme une araignée qui étend sa toile, de façon calculatrice et fatale. L’image de la toile et de l’araignée revient aussi beaucoup dans Notre-Dame de Paris pour la simple raison qu’il s’agit d’une métaphore du prédateur et de sa proie, mais aussi de la fatalité. La fatalité, c’est quand tous les indices sont présentés à l’avance mais que l’on se précipite tout de même vers un destin morbide. Ce concept, on ne le doit pas à Victor Hugo, mais carrément aux tragédies grecques de l’antiquité. Et on le retrouve naturellement dans La piel que habito. La boucle est bouclée, la toile est tissée.
Ananké
Malgré sa clairvoyance, Marilia (à droite), n’empêchera pas ses fils de s’entre-tuer.
C’est probablement à travers le personnage (inédit) de Marilia (Marisa Paredes) que le concept de fatalité se traduit le plus. Bien qu’elle ait le statut de domestique, Marilia est d’une certaine façon la matriarche de la maison. Elle y voit plus clair que les autres et explique souvent des secrets passés ou ce qu’il risque d’arriver. Elle met ainsi en parallèle les fins à la fois si tragiques et si proches de la femme et de la fille de Robert, lorsqu’elle raconte tout à Vera. Robert l’ignore, mais Marilia n’est pas une simple domestique. Elle est sa mère biologique ; ce qui fait de Zeca, qu’il a abattu, son demi-frère. Ces relations cachées, découvertes lorsqu’il est trop tard et ces meurtres au sein du noyau familial sont typiques des tragédies grecques. Ce qui l’est aussi, c’est la fâcheuse tendance avec laquelle l’histoire se répète. Marilia a beau demeurer clairvoyante et mettre plusieurs fois en garde Robert contre Vera, celui-ci demeure aussi aveugle qu’Œdipe.
Le symbolisme animal
Vincente/Vera est un être changeant.
Comme Œdipe, Robert a toutes les cartes en mains mais persiste à ne rien voir et à se précipiter vers une fin fatale. Mais peut-on lui jeter la pierre ? Nous autres spectateurs, étions aussi voyeurs et aussi attentifs que lui, ce qui ne nous empêche pas d’être surpris et heurtés par certaines révélations du film. Il faut dire que les personnages n’hésitent pas à porter des masques et autres déguisements pour mieux nous duper. Robert lui-même porte un masque fort inquiétant lorsqu’il décide de kidnapper Vicente. On peut parler de subterfuges mais aussi de métaphores animales. Recherché par la police, Zeca est contraint de se déguiser pour rejoindre la villa où vit sa mère. Or, il est accoutré d’une tenue de tigre. Si elle semble d’abord ridicule, elle est assez révélatrice du caractère du personnage, qui se conduit comme une bête, en violant Vera. Bien que cela soit quasiment absent du film, Robert est, quant à lui, assimilé à l’araignée. Mygale est, je le rappelle, le titre du roman original. Il est bien plus patient et calculateur que son demi-frère, mais tout aussi dangereux. Vicente est, lui aussi, traité comme un animal. Après le rapt, Robert le force à se dénuder. Il l’enchaîne, le nettoie avec un jet d’eau et le force à se nourrir comme une bête. Il ne détruit pas seulement son identité d’homme, mais aussi celle d’être humain. C’est pour mieux le modeler à son image. Mais à quoi pourrait être assimilée Vera ? Quand Robert lui donne la combinaison destinée à protéger son épiderme, il lui assure que cela sera comme une « seconde peau ». Or, Vera avait d’une certaine façon déjà changé de peau. C’est une poupée russe, un animal qui mue, un caméléon ou un serpent peut-être. Robert va tout mettre en œuvre pour l’apprivoiser et la contrôler, montrant à quel point il est fou et toxique. Mais peut-on vraiment se fier à un caméléon ou un serpent ?
Le jeu du serpent et de la mygale (fin)
Robert et Vera s’aiment autant qu’ils se haïssent.
La relation entre Robert et Vera est assurément ambiguë et malsaine. Ils se sont mutuellement détruits, si bien qu’on ne sait plus qui est le bourreau et qui est la victime. Le docteur Ledgard est un homme traumatisé, qui hurlait vengeance, mais la manière dont il obtient sa revanche dépasse l’entendement. Quant à Vera, il est impossible d’oublier que, sous son ancienne apparence, elle a tenté de violer une jeune fille vulnérable. Elle sera toutefois retenue prisonnière, opérée contre son gré, violée à son tour… Elle endure de telles épreuves qu’il serait difficile de lui refuser un arc de rédemption. Pourtant, Vera est troublante. Il est difficile de savoir ce qui lui traverse l’esprit. Quand elle dit à Robert « je suis à toi », le pense-t-elle vraiment, atteinte par je ne sais quel syndrome de Stockholm, ou bien entreprend-elle un processus de manipulation ? La piel que habito est, je le rappelle, le duel entre une mygale et un serpent. Ces deux êtres étaient condamnés à se détruire mutuellement, et pourtant, on est tentés de croire qu’ils s’aiment sincèrement, à certains moments. On aurait pu s’attendre à ce que Vera décide de rester avec Robert, comme dans le roman. Cependant, Almodóvar choisit une autre fin, qui accorde effectivement la rédemption à Vera, tout en répondant à la question que l’on se posait au début de cet article. « L’essence de notre identité, c’est le visage », affirmait Robert. Et sans doute y croyait-il car, en remodelant celui de Vera, en le rendant si proche de celui de sa défunte épouse, il est tombé amoureux. Il avait même la prétention de la changer, de la faire sienne. Vera s’est sans doute perdue en chemin, à un moment, mais elle a fini par retrouver ses esprits et par assassiner Robert. La dernière scène du film apporte un point final à ce questionnement. Vera retrouve son ancienne collègue et surtout sa mère, avant d’affirmer « Je suis Vicente ». De la même manière qu’une femme transgenre à qui l’on refuse une transition aura irrémédiablement un esprit féminin ; Vicente, dont le corps a été mutilé et modifié, reste fidèle à lui-même. La fin, ouverte, laisse toutefois supposer qu’il lui faudra apprendre à vivre avec cette nouvelle apparence et ce genre imposés, afin d’essayer de retrouver le bonheur. Après tout, Vera a déjà montré qu’elle était capable de s’adapter pour survivre…
Quelques années après Star Wars Jedi : Fallen Order, sa suite (Survivor) est sortie notamment sur PS5. L’histoire se passe cinq ans plus tard, alors que Cal Kestis est devenu Chevalier jedi. Dans sa lutte contre l’Empire galactique, il cherche un havre de paix pour ses alliés. Cela pourrait être le bastion jedi perdu : Tanalorr. Malheureusement, un certain Degan Gera (rien à voir avec Laurent) souhaite également s’en emparer. Star Wars Jedi : Survivor est une aventure classique, certes, mais très bien équilibrée. Le jeu débute in medias res et propose une histoire bien rythmée. Bien que le troisième opus n’ait pas encore été annoncé, Survivor a tout d’un épisode intermédiaire. Il reste fidèle envers son prédécesseur tout en se voulant innovateur ; mais il n’ose pas trop non plus car aucune porte ne doit être close. Au reste, on apprécie de retrouver des personnages plus approfondis, sans pour autant que l’humour ne soit délaissé. Si le jeu propose moins de surprises que le premier volet, il demeure un divertissement honnête et intelligent. Je suis satisfaite de l’évolution de Cal Kestis, même si – au risque de me répéter – Survivor n’ose jamais aller trop loin.
De manière générale, les graphismes de Star Wars Jedi : Survivor sont très beaux, et le gameplay bien équilibré entre exploration et action.La difficulté du titre n’est pas toujours évidente, tant au niveau des phases de plates-formes que de combats. Comme dans le premier opus, les adversaires proposent une résistance certaine, et la mort renvoie au point de sauvegarde précédent. Toutefois, toutes les données ne sont pas perdues (comme les collectibles amassés entre temps) et il est toujours possible de baisser le niveau de difficulté. Sans être innovantes, les mécaniques de gameplay sont fort abouties et donnent réellement la sensation de se retrouver dans la peau d’un chevalier jedi. Cal Kestis possède une grande agilité ; il est tout aussi adroit avec la force ou le maniement du sabre-laser. Par ailleurs, il est fort agréable de pouvoir le personnaliser tant au niveau de son apparence que de son armement et de ses postures de combat. En plus de pouvoir manier un sabre, deux sabres ou un double-lames ; Cal Kestis peut aussi adopter un style de combat hybride entre le sabre-laser et le blaster, ainsi qu’une posture plus défensive, grâce à un sabre muni d’une garde, tel Kylo Ren.
Outre cette variété des combats, le jeu fait la part belle à l’exploration. Cal Kestis peut visiter environ 6 planètes, au fil de l’histoire. J’ai d’abord trouvé ce nombre minimaliste et assez limité pour un jeu PS5, d’autant que le passage sur certains lieux est très bref. Néanmoins, certaines planètes ont beaucoup plus à offrir qu’il n’y paraît, sans compter qu’elle sont revisitables, une fois que l’on a débloqué certaines compétences. Autant dire que la durée de vie de l’exploration est honorable, sans pour autant devenir exagérée ni trop lassante (si l’on omet certains collectibles ou certains bugs !). Je préfère largement ce parti pris, plutôt qu’un Lego Star Wars qui permettait d’explorer toutes les planètes de l’univers, au risque de devenir répétitif et indigeste. Les activités annexes, loin d’être obligatoires, ne manquent pas. Cal dispose d’un repère au Pyloon Saloon, à Koboh. C’est un lieu intéressant car il peut être développé, en faisant venir des alliés, en remplissant l’aquarium ou en cultivant le jardin, par exemple. La faune et la flore sont assurément riches et vivantes dans Star Wars Jedi : Survivor, où l’on peut d’ailleurs avoir plusieurs montures. A vrai dire, cela faisait longtemps que je n’avais pas pris autant de plaisir à explorer et découvrir des lieux. Certains secrets sont bien gardés, entre verticalité et dissimulation, ce qui m’a fortement rappelé mon expérience sur les deux derniers God of War.
Somme toute, sans être un chef-d’œuvre, Star Wars Jedi : Survivor est une suite honorable. C’est, à mes yeux, un jeu plutôt bien dosé et équilibré. Electronic Arts semble avoir compris que les joueurs préfèrent, de loin, la qualité à la quantité. J’aurais aimé être plus surprise face à une suite plus téméraire, mais je ne peux nier combien le jeu est honnête et divertissant. A vrai dire, j’espère même que, à certains égards, le remake de KOTOR saura s’en inspirer.