« Anatomie de l’horreur » : Quelques jeux pour Halloween

Le ciel s’obscurcit et les feuilles chutent à la même cadence que la température. Les américains s’apprêtent à fêter Halloween et nous approchons de la Toussaint. Autant dire que le mois d’octobre est privilégié pour se lancer dans quelques jeux d’horreur. La peur s’articule autour de la narration, qui peut elle-même s’inspirer de faits réels comme de mythes et légendes divers et variés. Mais ce sont les mécaniques de gameplay qui décideront si un jeu est réellement terrifiant ou non. Pour ce faire, il n’y a rien de tel que de rendre les joueurs les plus vulnérables possibles. Au cours de cet article dédié aux jeux d’horreur, je vais vous parler de Among the Sleep (2014), Through the Woods (2016), Remothered : Tormented Fathers (2018) et The Chant (2022).

En haut à gauche : Jess découvre l’île de The Chant. Sur les deux autres images, Karen fait face à des apparitions inquiétantes, dans Through the Woods.

L’épouvante peut être installée par des créatures imaginaires comme par des faits réels. Dans les deux cas, elle peut être particulièrement redoutable. Mais ce que j’aime par-dessus tout, c’est quand les jeux d’horreur se révèlent fantastiques, au sens strict du terme. Cela signifie que, pendant un temps ou jusqu’à la fin, les joueurs sont amenés à hésiter entre une explication rationnelle et une explication paranormale. C’est de ce doute que naît la plus efficace des peurs.

A mes yeux, il ne laisse pas l’ombre d’un doute que les événements mystiques survenant dans The Chant aient réellement lieu. Dans les années 70, après la mort tragique de sa sœur, Jess décide de se retirer dans la communauté spirituelle d’une île. Or, le groupuscule a des faux airs de secte, et très tôt, des événements inquiétants surviennent sur l’île. Certaines zones semblent tomber dans une dimension parallèle, peuplée de créatures étranges et effrayantes. Jess devra faire preuve d’une force mentale hors du commun pour sauver les autres membres de la communauté. Les questions abordées par l’univers sont occultes, mais à aucun moment l’existence des monstres n’est remise en question. La plupart des créatures sont même cataloguées dans un bestiaire, et c’est peut-être d’ailleurs ce qui rend le jeu assez peu effrayant, en dehors – à la rigueur – d’un ou deux jump scares.

Through the Woods a des points communs avec The Chant, mais l’ambiance est beaucoup mieux menée. Les deux jeux se déroulent sur une île isolée mais Karen, l’héroïne de Through the Woods, ne s’y retrouve pas aussi rapidement. Elle voit son fils Espen se faire enlever par un mystérieux inconnu, dans une barque, ce qui l’incite à rejoindre l’autre rive à la nage. Il est perceptible que Karen emprunte un passage vers un monde différent. Le sentiment d’urgence et la rupture d’ambiance rendent l’île tout de suite inquiétante, tandis que celle de The Chant apparaît tout d’abord comme un endroit idyllique. Contrairement à Jess, qui est d’abord guidée par ses hôtes ; Karen est immédiatement seule et prompte à se perdre.

Les deux jeux ont des sources d’inspiration différentes. The Chant s’inspire de Silent Hill quand Through the Woods emprunte des légendes à la mythologie scandinave. Les deux choix ont du potentiel, et pourtant, Through the Woods effraie davantage. Les créatures sont moins nombreuses et apparaissent avec moins de fréquence. Il y a une économie de leurs apparitions, ce qui les rend si marquantes. D’ailleurs, plusieurs événements et monstres peuvent passer totalement inaperçus, pour les joueurs les moins observateurs. Le souci du détail de Through the Woods rend le paranormal encore plus implicite. Ainsi, même si je ne pense pas que les événements narrés par Karen soient le fruit de son imagination ; la subtilité de la narration la rend plus effrayante. En découvrant des documents, Karen apprend que son fils a été enlevé par un dénommé Erik. Cela peut sembler un prénom banal, or, en Norvège, une vieille légende conte qu’un homme – ou un démon – appelé Erik kidnappe régulièrement les enfants, qui ne réapparaissent plus. Cela soit dit en passant, d’autres créatures interpelleront les amateurs de mythologie nordique ou les joueurs ayant apprécié Bramble : The Mountain King, sorti au moins de juin dernier.

En haut à gauche : la chambre inquiétante d‘Among the Sleep. Sur les autres images, Rosemary doit affronter monsieur Felton, dans Remothered.

Ces deux premiers jeux font réellement intervenir le paranormal, même s’ils le font avec plus ou moins de subtilité. Among the Sleep convient davantage à la définition du fantastique. Les joueurs incarnent un bébé qui, accompagné de son ours en peluche, doit traverser une maison sombre et inquiétante. Or, une créature malveillante le pourchasse. Les joueurs doivent attendre quelques indices, et le dénouement du jeu, pour comprendre quel est l’équivalent de cette créature dans la réalité. Le double sens de lecture est alors très intéressant. Par dessus-tout, l’on se demande si cette terreur nocturne n’est que le fruit de l’imagination fertile du bébé, ou si les événements relatés sont vraiment arrivés. Hélas, Among the Sleep n’est pas un jeu du tout effrayant, mais la faute en revient plutôt à son gameplay, dont nous parlerons plus tard.

Remothered : Tormented Fathers joue également avec les codes du fantastique. Le début du jeu est parfaitement ancré dans le réel. Une jeune femme, Rosemary, enquête sur la disparation d’une fillette. Cela la conduit dans le manoir Felton, où un vieillard vit reclus. L’ambiance m’a fait beaucoup penser au Silence des Agneaux de Jonathan Demme, du fait de la ressemblance entre Rosemary et Clarice, de la métaphore des papillons ou encore de la probable influence de Buffalo Bill, sur l’un des personnages du jeu. Mais alors que Remothered ressemble à un thriller, des événements paranormaux commencent à intervenir dans la maison. Rosemary est-elle en train de perdre la raison ou arrivent-ils réellement ? Pour le coup, bien que les explications finales soient alambiquées, Tormented Fathers parvient à restituer une ambiance fantastique et surtout une tension constante.

A gauche, un aperçu de l’univers d’Among the Sleep. A droite, l’héroïne de The Chant.

Si le lore et la narration sont importants dans un jeu d’épouvante, les mécaniques de gameplay sont plus déterminantes. Or, comme beaucoup de leurs confrères, ces quatre jeux vont tenter de nous rendre vulnérable pour nous effrayer le plus possible.

Malheureusement, The Chant échoue également à ce niveau. Il est plutôt malin de mettre la force mentale de l’héroïne au cœur du gameplay. En effet, si celle-ci est confrontée à quelque chose qui lui fait peur ou si elle reste trop longtemps dans la pénombre, sa santé mentale diminue. Il lui faut alors méditer pour retrouver tous ses esprits. Malheureusement, le gameplay de The Chant n’est guère plus abouti que l’histoire ou les personnages. Jess dispose aussi d’une santé normale et peut venir à bout de ses ennemis par la force, en confectionnant des armes. Cette part d’action rend le jeu tout de suite moins effrayant.

On se sent bien plus vulnérable dans les trois autres jeux, où l’on joue respectivement un bébé et des personnages dépourvus de moyens d’attaquer. Notons d’ailleurs que tous ces personnages sont féminins. Dans les histoires d’horreur, les femmes sont généralement plus réceptives aux ondes paranormales que les hommes.

Bien que l’on incarne un bébé dans Among the Sleep, ce n’est étonnamment pas le jeu où je me suis sentie la plus vulnérable. Pour cause, les chapitres comportent très peu de réelles menaces. Il s’agit davantage d’un jeu d’exploration, dans lequel il faut trouver des objets pour progresser. Il est bien dit qu’une créature nous suit et qu’elle nous éliminera, dès que l’on fera du bruit ; mais je l’ai si peu vue que je ne me suis jamais vraiment sentie inquiète. Et pourtant, je suis généralement aussi discrète qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine ! C’est dommage, car l’idée du monstre stalker était prometteuse.

A gauche, dans Remothered, l’héroïne se cache face à ses ennemis. (Oui, on voit bien les fesses du premier). A droite, les joueurs les plus vigilants peuvent apercevoir la sorcière Pesta, dans Through the woods.

J’ai été parcourue par bien plus de frissons dans Through the Woods, où Karen ne dispose que d’une lampe torche. Il faudra donc faire preuve d’astuce et surtout de discrétion pour fuir les différents ennemis du jeu. Croyez-moi, je n’étais parfois pas tranquille sur l’île. Finalement, ce qui rend le jeu accessible, c’est son archaïsme technique. Bien qu’il ne date que de 2016, les graphismes et le gameplay sont si dépassés que le jeu peinera à effrayer tout à fait.

C’est dans Remothered : Tormented Fathers que la tension restera constante. En effet, Rosemary sera pourchassée par un vrai stalker, dans le manoir. Il est impossible de prévoir où il se trouve et il est ni plus ni moins mortel. Ainsi, même si Rosemary dispose de couteaux de défense, il est préférable d’avancer sans faire de bruit, de se cacher ou de faire diversion, afin d’échapper à l’ennemi. Or, comme dans les premiers Resident Evil, le titre nécessite de faire des allers-retours incessants dans le manoir, pour trouver des objets et résoudre des énigmes. J’ai fait le jeu avec Hauntya mais nous avions fréquemment besoin de la soluce pour savoir quoi faire. A ce titre, l’expérience était presque plus énervante qu’effrayante. Mais ma foi, cela fait partie des codes du survival-horror, et même si l’expérience de Remothered (également dépassé sur le plan technique) n’était pas parfaite ; je n’oublierai pas ce jeu de sitôt !

Si vous souhaitez passer un Halloween peu effrayant, vous pouvez choisir de vous rendre sur l’île de The Chant, ou dans la maison du bébé dAmong the Sleep. Le premier jeu est original à bien des égards et j’ai été charmée par le double sens de lecture du deuxième. Mais ne nous leurrons pas, il s’agit d’expériences vidéoludiques tout sauf effrayantes, et surtout peu mémorables. J’aurais plus tendance à vous conseiller Remothered : Tormented Fathers. J’ai quelques reproches à faire à son scénario mais le jeu est parvenu à maintenir une tension constante que je n’oublierai pas de sitôt ! J’ai finalement davantage eu un coup de cœur pour Through the Woods, le plus équilibré de tous. Entendons-nous bien, il s’agit presque d’un walking simulator et les graphismes sont datés ; mais j’ai été aussi bien charmée par l’histoire que par l’ambiance du titre. Il faut dire qu’il était plaisant de retrouver le folklore norvégien présent dans Bramble. Ces deux derniers titres devraient vous réserver des sueurs froides ou des surprises malveillantes, pour célébrer un Halloween digne de ce nom.

Annette | Le fol assemblage des genres

J’ai toujours trouvé l’affiche d’Annette remarquablement belle et attractive, sans jamais chercher à franchir le pas du visionnage. Or, ce film de Leos Carax, sorti en 2021, est une expérience unique. Annette est de ces films clivants qu’on ne peut que détester ou – au contraire – adorer. Le long-métrage mettant en scène Adam Driver et Marion Cotillard est quoiqu’il en soit le lauréat du Prix de la mise en scène, au festival de Cannes. Il est difficile de résumer Annette en lui rendant honneur, tant l’intrigue semble éculée. Henry (Adam Driver) est un humoriste aussi cynique qu’acclamé. Il se fiance avec Ann (Marion Cotillard), la cantatrice la plus appréciée du moment, à Los Angeles. Ils s’aiment passionnément, si bien qu’ils brûlent la chandelle par les deux bouts. L’arrivée de leur fille, Annette, ne sauvera pas leur couple, bien au contraire. Vous l’aurez compris, Annette est une satire du monde du show-business, parmi d’autres. C’est par sa forme originale, presque expérimentale, qu’il sort du lot. Le long-métrage musical commence après tout par l’intrusion du réalisateur et même du groupe Sparks (à l’origine de la bande originale), qui défoncent le quatrième mur, dans ce qui s’annonce être une vaste et étonnante mise en abyme. Nous allons donc étudier la forme d’Annette, et tenter d’en interpréter les multiples symboles et références. Comme toujours, les spoilers, plutôt situés à la fin, seront signalés.

« Je me présente, je m’appelle Henry… » M. Cotillard et A. Driver incarne Ann et Henry.

Comme je le disais plus tôt, Henry fait du stand-up. Or, ses spectacles sont particulièrement déstabilisants. D’une part, la mise en scène est telle que nous avons l’impression de faire partie du public. De l’autre, la prestation d’Adam Driver est sombre, implacable, presque inquiétante, ce qui contraste avec l’art de la comédie. Certes, Henry pratique un humour particulier, à la fois noir et cynique. A vrai dire, son spectacle est métaphoriquement plein de violence. Avant chaque numéro, Henry s’entraîne comme un boxeur, qui s’apprête à monter sur le ring. Il confie, à son public, qu’il n’utilise l’humour que pour « désarmer les gens ». Il considère même que c’est « la seule façon de dire la vérité sans se faire tuer ». Il faudra donc bel et bien se méfier de tout ce que dira Henry, même sous couvert d’humour. Si le spectacle d’Henry nous apprend qu’il peut être vindicatif et violent, il dévoile aussi que c’est un mauvais perdant, qui ne se remet jamais en question. En effet, dès que le public commence à le désapprouver, il considère que c’est leur « problème ». Henry a beau être le personnage le plus présent dans le film, c’est un sale type, qui met sciemment mal à l’aise.

Ann, incarnée par Marion Cotillard, fréquente un tout autre type de scènes. En effet, elle est chanteuse lyrique, à l’opéra. Pour l’anecdote, les acteurs chantent vraiment sur le plateau, même si la voix de Cotillard a été mixée avec celle d’une véritable cantatrice, sur les passages les plus lyriques. La soprano paraît beaucoup moins sombre et inquiétante qu’Henry. Elle semble pourtant tiraillée par une dualité. D’une part, il y a la cantatrice qui fait des envolées lyriques au théâtre ; de l’autre, il y a la femme seule qui chante de façon introspective, assise sur les toilettes. Ann est, en définitive, une artiste perdue qui ne sait pas ce qu’elle veut. D’ailleurs, qu’elle en soit consciente ou non, elle a peur de son mari Henry. Les passages d’opéra, loin d’interrompre l’histoire, servent l’intrigue et explicitent la relation entre les deux personnages. Ainsi, l’air durant lequel la cantatrice clame avoir « peur » ou se sentir « en danger » n’a rien d’anodin.

« We love each other so much… » chantaient-ils, avant de brûler la chandelle par les deux bouts.

Annette est une satire du monde du show-business. Le couple est fortement médiatisé. Combien de fois les voit-on se faire photographier ou se retrouver sur la couverture de nombreux magasines ? Les plans durant lesquels ils s’évadent sur la route sont aussi légion, signe que dans ce milieu, tout est rapide et excessif. Annette est un film hybride, tant au niveau de sa mise en scène que de sa bande originale. Si Sparks est initialement un groupe pop-rock, on retrouve de la comédie musicale traditionnelle, de l’opéra ou même un bref passage de rap, durant le spectacle d’Henry. On identifie aussi des codes empruntés au stand-up, au conte ou même au spectacle de marionnettes. Et je suis probablement loin d’avoir cité tous les ingrédients faisant partie du cocktail. Malgré ce mélange étonnant, ou le fait qu’Adam Driver ne soit pas le chanteur de l’année, on se surprend à vouloir réécouter la bande-originale, quelques temps plus tard. Certaines chansons sont même captivantes d’emblée, comme « We love each other so much ».

Je conçois que le film puisse rebuter. J’ai moi-même mis beaucoup de temps à entrer dedans, lors du premier visionnage. C’est un film grotesque et majestueux à la fois, et véritablement hypnotisant. Si je l’ai d’abord trouvé assez cryptique, un deuxième visionnage suffit à constater combien des indices et des clés de lecture sont disséminés ici et là, et ce dès le début du film. A mes yeux, Annette constitue une expérience incroyable.

Henry coupe le cordon ombilical avant de tirer les ficelles. Les bananes et le singe sont omniprésents.

Si j’apprécie autant Annette, c’est peut-être parce qu’il a tout du conte moderne. Les personnages ont une fonction précise et des noms assez simples, tout comme dans les contes. Le nom de famille de Henry est tout de même McHenry ! L’un de ses pseudonymes, sur scène, est « le gorille de Dieu ». Or, il y a plusieurs allusions à cet animal, tout au long du film. Henry a l’habitude de manger une banane avant de monter sur scène. Il arrive aussi qu’un régime de bananes soit disposé près de lui, dans le cadre. Par-dessus tout, le doudou de sa fille Annette est une peluche en forme de singe. Leos Carax n’a pas choisi cet animal au hasard. Son père possédait en effet un chimpanzé femelle qui était jaloux de sa mère. Il a lui-même adopté deux singes par la suite. Comme tous les animaux, le primate représente des valeurs ou des défauts. Comme le dit Carax lui-même : « Les singes représentent à la fois un danger, la sauvagerie — et le martyre. Je les aime beaucoup. […] Petit à petit, les singes ont envahi le film, et sont devenus comme un lien entre père et fille, sauvagerie et enfance. » Ainsi, la peluche du gorille pourrait symboliser la force tranquille, la douceur et la protection familiale dont a besoin Annette. En ce qui concerne Henry lui-même, l’animal représente plutôt la sauvagerie et les dangers qui émanent de sa personne. Henry n’est pas un bon père. Il porte une tâche discrète sur le bas de la joue droite. On ne peut plus la manquer, à la fin, tant elle a grandi. Si j’ai d’abord cru qu’il était malade ; cela peut aussi tout simplement représenter le mal qui progresse en lui. Enfin, l’un des faits les plus surprenants du film – et ce n’est pas peu dire – c’est qu’Annette est interprétée par un pantin de bois. La référence au conte Pinocchio est immanquable. Alors qu’on serait tentés de prendre Henry pour un Geppetto (certes maléfique) ; il a plutôt tout de Stromboli, le marionnettiste exploitant l’enfant de bois.

Ann est régulièrement habillée en jaune. Annette est représentée par un pantin. Enfin, la pomme, le miroir… Tout évoque Blanche-Neige.

Ann est un personnage moins manichéen et donc plus difficile à cerner. Tandis qu’Henry est associé à la banane, Ann est régulièrement filmée en train de manger une pomme rouge. Ce fruit pourrait être une référence à la Genèse, d’autant que le début de la mise en scène de « We love each other so much » fait penser au jardin d’Eden. Le couple ne reste toutefois par longtemps au paradis, et aura tôt fait de se brûler les ailes. Si on reste dans le domaine du conte, la pomme ne peut faire penser qu’au fruit empoisonné, dans Blanche-Neige. Il reste donc à se demander si Ann est la victime d’un sortilège, ou si elle empoisonne elle-même la pomme. Les deux thèses sont probablement défendables. Plus que par un animal, Ann est symbolisée par une couleur. Le jaune est très présent, tant dans le décor que dans sa garde-robe. L’utilisation des couleurs, dans ce film, est tellement belle qu’elle n’a rien d’hasardeux. Le jaune a une connotation plutôt positive, comme le bonheur ou le soleil. Mais au vu de l’ambiance générale, on peut sans doute davantage l’associer au déclin ou à la lune. Notons que le jaune est aussi la couleur de prédilection d’Annette, donc le prénom n’est d’ailleurs qu’un dérivé de celui de sa mère. Les deux personnages sont donc encore plus liés qu’on ne pourrait l’imaginer.

La naissance d’Annette, dont le prénom sert de titre, constitue un point de non-retour. L’accouchement semble lui-même être mis en scène, signe que l’enfant est promise à un avenir dans le spectacle. Il est particulièrement perturbant de voir Henry et Ann traiter un pantin (certes expressif) comme un bébé. J’ai d’abord cru qu’il ne s’agissait que d’un spectacle, intégré au film lui-même. Mais Annette est bel et bien leur fille. Cela n’empêche certes pas Henry de s’asseoir à moitié sur le pantin, sur le canapé ; ou Ann de jouer de façon trop brutale avec. Le long-métrage de Carax fait-il une plongée dans le genre du merveilleux, ou ne s’agit-il que d’une métaphore plus explicite que les autres ? Peut-on considérer Annette comme une simple extension d’Ann ? Le mystère est à son comble. Pour plus d’éléments d’analyse, il est temps de rentrer dans la partie « spoilers »

Environ un an après la naissance de leur fille, Henry raconte, lors d’un one-man-show, la prétendue mort de sa femme, Ann. Comme le public, nous sommes bien en peine de savoir s’il invente une histoire, ou s’il dit la vérité. Le décès d’Ann pourrait après tout avoir eu lieu hors-champ, comme dans les tragédies grecques, qui n’avaient pas le droit de représenter la mort sur scène. Justement, comme dans toute tragédie classique, Annette à un dénouement à la fois funeste et inévitable, et ce même si on pouvait le prédire dès le début. Henry utilise beaucoup le champ lexical de la mort dans ses dialogues. Quand il parle de ses spectateurs, il se vante de les avoir « tués » de rire. Il complimente aussi Ann en affirmant qu’elle meurt « magnifiquement sur scène ». Enfin, lui aussi prétend pouvoir « mourir » et « saluer » à l’infini. La chanson « We love each other so much » a tendance à les décrire comme un couple heureux et amoureux, au moins au début ; mais ce n’est pas le cas. Dans l’un des premiers plans de la chanson, seules les mains d’Henry apparaissent dans le cadre. Elles s’apprêtent à attraper Ann par derrière, de façon menaçante, avant qu’il ne se contente de l’enlacer. Beaucoup d’indices similaires annoncent la dangerosité d’Henry et la fin funeste d’Ann. Après le one-man-show d’Henry, l’on se rend compte qu’Ann est toujours vivante. Mais cela ne va pas durer. La famille part en vacances sur un yatch, mais le bateau est emporté par la tempête. Annette semble terrorisée, tandis que sa mère tente de la réconforter, sous le regard tranquille d’un jouet en forme de baleine. Comme dans Pinnochio, vont-elles être englouties par Monstro ? Henry ne rencontre plus le même succès qu’avant, tandis que sa femme est acclamée. Il est rongé par la frustration et la jalousie, et comme si cela ne suffisait pas, il est sans doute alcoolique. Lorsqu’Ann arrive sur le pont du bateau, il s’empresse d’entreprendre une valse avec elle, sans son consentement. Cette scène est immortalisée par l’affiche du film, dans laquelle on voit Ann, vêtue d’un ciré jaune, pendue aux bras de son époux, en tenue de marin. Cette danse n’a rien de romantique, puisqu’Ann ressemble à une poupée de chiffon, qui pend aux bras de son bourreau. Après cette valse d’une grande violence, Ann est emportée par le tourbillon des vagues. C’est plus un meurtre qu’un accident. D’ailleurs, Henry a déjà été violent avec d’autres compagnes, auparavant. Le déclin de son succès concorde avec la prise de paroles de plusieurs femmes ayant témoigné contre lui. Elles ont mis en garde la malheureuse Ann, qui ne pourra hélas jamais s’échapper. Annette critique ainsi le monde du show-business de façon très contemporaine puisque tout cela fait écho au mouvement Me too. C’est aussi une satire universelle. Le meurtre déguisé sur le yatch est sans doute inspiré de l’histoire tragique de Natalie Wood, une actrice américaine décédée en 1981. Aujourd’hui encore, nous ignorons s’il s’agissait d’un accident, ou si elle est morte suite à des violences conjugales provoquées par Robert Wagner.

« Balance ton quoi » : des femmes (dont Angèle, au milieu) dénoncent Henry… Qui essaie d’attraper Ann. Dans la cabine du bateau, la baleine apparaît à droite.

Annette s’inspire d’une réalité bien cruelle ; sans jamais oublier sa part de conte. Juste après la mort d’Ann, Henry et Annette échouent sur un rocher, depuis lequel ils n’aperçoivent que les étoiles et la lune. Annette, malgré son jeune âge, se met alors à chanter une berceuse avec une incroyable justesse. C’est en réalité l’esprit d’Ann qui lui transmet son don. On serait tentés de croire qu’Annette devient la réincarnation d’Ann, mais il s’agit plus d’une malédiction que d’un ultime présent. L’esprit vengeur d’Ann prévient en effet que la « voix » d’Annette sera son « spectre ». Ce présent n’est qu’un « poison » qui va lui permettre d’obtenir sa revanche, sur le long terme. Ann se sert donc sans vergogne de sa fille, pour parvenir à ses fins.

Henry est un sale type qui tombe bien évidemment dans le piège. A peine s’aperçoit-il que son bébé a un don pour chanter, qu’il s’empresse de vouloir l’exploiter. Pour ce faire, il engage le personnage du chef d’orchestre, incarné par Simon Helberg. Bien qu’il ait été absent de la première partie du film, l’on se rend compte qu’il a un rôle important, depuis le début. Peut-être avait-il simplement été évincé par Henry. On apprend ainsi qu’il aimait tendrement Ann, et qu’il sortait avec elle, avant qu’elle ne tombe sous le joug d’Henry. La chanson que l’on croyait attribuée à Ann et Henry « We love each other so much » a en réalité été composée par le maestro. Le chef d’orchestre est donc une victime de plus d’Henry, lequel a besoin de lui pour monter un spectacle. Le maestro n’en demeure pas moins le personnage le plus positif du film. On sent qu’il aime sincèrement Annette, et qu’il veille sur elle, face à un père démissionnaire et même cruel. D’ailleurs, s’il apprécie tellement l’enfant, c’est parce qu’elle lui fait penser à Ann et parce qu’il soupçonne d’en être le père biologique. Forcément, dès qu’Henry apprend cela ; il s’empresse de tuer le chef d’orchestre. Par noyade, lui aussi.

Annette possède plusieurs visages. A droite, le maestro est le seul à veiller sur elle.

Le gorille de dieu a fait de la vie de sa fille un enfer. Mécontent d’avoir tué sa mère, puis son père de substitution ; il l’a exploitée sur scène. Bébé Annette a fait le buzz sur internet, ce qui lui a ouvert les portes d’une tournée mondiale. Or, il ne s’agissait évidemment pas d’un rythme sain pour une enfant. Malgré son apparence de marionnette dotée d’une petite cicatrice sur le front, Annette semblait constamment épuisée et malheureuse. Dans les scènes prenant place à l’aéroport, on voyait qu’elle était posée sur les valises, et traînée comme un objet de plus. La mort du maestro donne toutefois un électrochoc à Annette qui fait comprendre à Henry qu’elle ne veut plus chanter. Celui-ci exige au moins d’elle un dernier concert. Ce sera le plus grand et le plus faramineux de tous. Annette accepte de monter (ou plutôt de s’envoler) sur scène. Mais au lieu de chanter, elle révèle au monde entier avec de simples mots d’enfant, une réalité terrible : « Papa, il tue des gens ».

L’épilogue du film a lieu en prison, où Henry est incarcéré. Son apparence s’est dégradée ; en peu de temps, il semble avoir bien vieilli et maigri. La tâche sur sa joue a grossi. Mais Annette aussi a changé. La marionnette et la peluche de gorille tombent par terre, tandis qu’une fillette en chair et en os s’assied en face d’Henry. Elle est incarnée par Devyn McDowell, qui n’a que sept ans à la sortie du film, mais dont le regard témoigne d’une grande maturité. Et pour cause, Henry a volé l’enfance et l’innocence de sa fille. Puisqu’il est prisonnier, Annette retrouve enfin sa liberté et lui dit ses quatre vérités. Avec la douceur d’une enfant mais la sévérité d’une âme blessée, elle reproche à ses parents de l’avoir exploitée : « j’étais comme un jouet entre vos mains ». C’est bien naturellement la clé de lecture du film, qui explique pourquoi Annette ressemblait à un pantin, jusque là. Ses parents, surtout Henry, ne l’ont jamais considérée comme un être humain à part entière. Elle ajoute la condamnation implacable : « maintenant, tu n’as plus rien à aimer ». Henry a beau recevoir le sort qu’il méritait, l’épilogue d’Annette est incommensurablement triste. Après tout, l’enfant est traumatisée. Elle affirme ne plus jamais vouloir chanter et préférer passer le reste de sa vie loin des projecteurs, « dans le noir », comme un « vampire ». Cela rappelle que même quand une victime s’en sort, les conséquences peuvent être désastreuses.

Annette est un film unique, presque expérimental. Il aborde des thèmes éculés, à commencer par la critique du milieu du show-business ; mais il le fait sous une forme très originale. Si le long-métrage peut presque être considéré comme un opéra, tant la musique est omniprésente ; il est difficile de réellement lui attribuer un genre. Les codes de mise en scène et les styles musicaux n’ont en effet de cesse de se mélanger. Annette est un film étonnant et même très déstabilisant, lorsqu’on le découvre. Pourtant, les spectateurs les plus observateurs ont toutes les clés en mains pour comprendre et décortiquer ce qui est raconté. Annette est ni plus ni moins un conte, dans lequel les métaphores et le symbolisme pullulent. C’est aussi une tragédie moderne, qui dénonce les crimes d’hier et d’aujourd’hui, en mettant les personnages au pied du mur. En effet, ceux-ci ont beau prédire et annoncer leur destin funeste, il s’y précipitent corps et âme…

Dossier #5 : La Chasse et Drunk | Le diptyque de Thomas Vinterberg

Il est l’heure d’ouvrir la cinquième saison du blog et pas avec n’importe quel article. J’ai décidé de parler aussi de cinéma, dorénavant. Pour inaugurer cette catégorie, j’ai choisi deux films qui me tiennent à cœur. Bien qu’ils n’aient aucun lien concret, j’ai tendance à considérer La Chasse (2012) et Drunk (2020) comme les membres d’un diptyque. Après tout, ces long-métrages danois ont été réalisés par Thomas Vinterberg et rassemblent un casting similaire : Mads Mikkelsen, Thomas Bo Larsen ou encore Lars Ranthe. Par-dessus tout, chaque film s’attarde sur le quotidien d’un professeur au bord de la dérive. Nous allons vérifier comment fonctionne le réalisme de ces films qui, avec subtilité, interrogent et questionnent nos limites morales. Cette analyse mettra en exergue leurs points communs mais aussi leurs différences. L’ensemble de l’article devrait être accessible à toutes et à tous ; les véritables spoilers étant réservés pour la troisième partie.

Mads Mikkelsen, au Festival de Cannes, en 2012.

Bien qu’ils soient parfois sujets à débats, La Chasse et Drunk sont des films salués par la critique et plusieurs fois récompensés. La Chasse avait été nominé aux Oscars, dans la catégorie des meilleurs films en langue étrangère. Mads Mikkelsen avait remporté le prix de l’interprétation masculine, à Cannes. Drunk n’est pas en reste puisqu’il a obtenu le César et l’Oscar du meilleur film étranger.

Les deux films de Vinterberg ont des scènes d’ouverture similaires. Nous sommes plongés, in medias res, au sein de traditions danoises. Dans le premier, les membres du club de chasse n’hésitent pas à faire trempette dans l’eau glacée du mois de novembre. L’ambiance est festive et les protagonistes ont certainement bien bu. Sans surprise, le prologue de Drunk est tout aussi arrosé. Au rythme des premières notes de la chanson phare du film (What a life), des lycéens font une course rituelle, avant de semer la zizanie dans les tramways de Copenhague. Ces prologues posent bien évidemment le contexte, tout en présentant les personnages.

Dans La Chasse, Mads Mikkelsen incarne Lucas, un ancien professeur travaillant désormais au jardin d’enfants. Il semble bien intégré à la fête, et même plutôt conciliant et serviable, puisqu’il n’hésite pas à plonger dans l’eau glacée pour prêter main forte à un camarade dans le besoin. Dans Drunk, Martin (Mads Mikkelsen) est évidemment absent des festivités. Le montage coupe court à la fête pour révéler une salle des profs terne, dans laquelle la principale s’inquiète des dérives de ses élèves. Les salles de classe des quatre protagonistes du film sont alors dévoilées les unes après les autres. Si les trois amis de Martin ne respirent pas la joie de vivre, celui-ci propose des cours d’histoire particulièrement moroses et ennuyeux, qui n’inspirent ni intérêt ni respect à ses élèves.

Lucas, dans La Chasse, est un homme bien intégré. Il est apprécié par les enfants sur lesquels il veille et il fréquente régulièrement son frère Bruun (Lars Ranthe) ou la famille de son meilleur ami Theo (Thomas Bo Larsen). Néanmoins, à plus de 40 ans, Lucas est séparé de son ex-femme et de son fils. Il vit seul, avec sa chienne Fanny, et on comprend à demi-mot que cela fait jaser le reste du bourg, où tout le monde se connaît. Martin, dans Drunk, n’a même pas l’illusion que tout va bien. Alors qu’il fête les 40 ans de son ami Nikolaj (le prof de psycho, Magnus Millang) en compagnie de Tommy (le prof de sport, Thomas Bo Larsen) et Peter (le prof de musique, Lars Ranthe), il boit un verre de trop et fond en larmes. Ses collègues de travail comprennent qu’il souffre de dépression, tant à cause de la situation au lycée que de sa vie personnelle, sa femme Anika (Maria Bonnevie) étant devenue particulièrement distante.

En dépit de toutes les similitudes entre La Chasse et Drunk, une différence capitale est mise en exergue. Lucas est un homme ordinaire dont un élément déclencheur va provoquer une véritable descente aux enfers. En effet, un mensonge hasardeux de Klara (Annika Wedderkopp), la fillette de son meilleur ami, incite tout le monde à croire qu’il agresse sexuellement les enfants du jardin. Au contraire, Martin est déjà au bord du gouffre et va essayer, notamment par le biais de l’alcool, de s’en sortir… La Chasse est un film sombre et suffoquant, dans lequel l’espoir s’étiole comme au fond d’un entonnoir. Le rythme est lent et soutenu à la fois, car il ne faut même pas deux mois pour que l’existence de Lucas devienne un calvaire. L’atmosphère de Drunk est plus équilibrée, alternant entre des hauts et des bas, au cours de toute l’année scolaire (du mois d’août au mois de juin, au Danemark). Les deux longs-métrages, liés à bien des égards, vont ainsi aborder une vision des choses et des thèmes assez différents.

II. Une science socialeIII. L’analyse de scènes clésConclusion : Des œuvres amorales ?

Little Gamers Part IV

Une nouvelle année se termine pour le blog, et pas n’importe laquelle, puisqu’il s’agit de la quatrième. Mystic Falco, qui s’occupe toujours brillamment de la partie graphique du blog, a une fois encore dissimulé deux petits personnages, dans chaque miniature d’article. Il s’agissait du BB, dans Death Stranding, et d’une version Pixel Art de Vivaldi. Oui… Parce que… Les quatre saisons… Bref… Passons.

Pour en revenir au bilan, ce fut une année relativement bonne, sur le plan personnel. Une fois n’est pas coutume, il y eut des hauts et des bas, surtout au niveau santé ; mais je suis tout de même parvenue à conserver mon rythme d’écriture. J’avais fait part de ma frustration, l’an passé, vis-à-vis de la baisse de visibilité des articles, mais aussi des interactions avec les lecteurs et lectrices. Cela avait été tellement démotivant que j’avais presque songé à fermer le blog. J’ai tout de même décidé de continuer à écrire pour moi, ou pour les quelques personnes qui continuent à me lire ; en essayant tout simplement de faire abstraction de cette composante. Les faits sont là : aujourd’hui, les gens ne prennent plus la peine de lire et encore moins celle de commenter. Je devrais suivre la mode de l’époque et me diriger vers un format image ou vidéo, et surtout, quelque chose de très court… Mais force est de constater que ce n’est pas idéal pour les analyses telles que je les conçois. Alors, ma foi, papy continuera à faire de la résistance. En tout cas, je remercie vivement celles et ceux qui prennent le temps de me lire voire de me donner leur avis.

En fait, le vrai défi de cette année fut de rester régulière. Même si je consacre beaucoup de temps aux jeux vidéo, force est de constater que j’en consacre beaucoup moins qu’avant, et que peu de titres ont su me passionner cette année. Il n’était donc pas aisé de publier un article une semaine sur deux. Je n’ai pas toujours bien vécu la pression que ça représentait. Il faut dire que je ne me suis pas facilité la tâche lorsque j’ai publié un article par semaine durant la diffusion de la série HBO The Last of Us. Je suis toutefois satisfaite d’avoir réussi plusieurs séries d’articles comme The Last of Us ou Final Fantasy Pixel Remaster. Je n’avais en effet j’avais relevé ce genre de défis, sur le blog, auparavant.

De fait, est-ce que Little Gamers est en péril ? Je ne pense pas. J’ai pris beaucoup de recul vis-à-vis d’internet et je prends toujours du plaisir à écrire. Même si je tiens énormément à rester régulière, il faut que je trouve un moyen de calmer la pression, avant la saison prochaine. Les faits sont là, je joue un peu moins qu’avant. Et comme le ravivement de ma passion pour le cinéma est un peu fautif, il faudrait peut-être que je songe à faire évoluer le blog, en lui ouvrant la porte de nouveaux horizons. Il va de soi que je serais curieuse d’avoir vos avis.

Quoiqu’il en soit, il est désormais temps de faire le traditionnel tour des chiffres de l’année 2022-2023, sur le blog.

10 Articles sur Pod’Culture

Je continue à être active sur Pod’Culture, où j’ai pu être régulière cette année. En raison d’un rythme mensuel, j’ai pu écrire dix articles pour le site. J’ai commencé par proposer un test de The Quarry avant de donner mon avis sur trois séries sorties en l’honneur d’Halloween 2022. Il s’agissait de The Midnight Club, The Watcher et du Cabinet de curiosités. J’ai aussi eu le privilège de recevoir deux codes de la part d’éditeurs, ce qui m’a permis de faire les tests de The Last of Us Part I et God of War : Ragnarök. J’ai commencé l’année 2023 en proposant une critique du spectacle Starmania, suivie d’un long article sur les comédies musicales, en général. C’est en mars que j’ai parlé d’un véritable coup de cœur : la série Better Call Saul, préquelle de Breaking Bad. Après plusieurs critiques faites en l’honneur du Printemps du cinéma, j’ai posté mon avis sur un film m’ayant vraiment marquée : Les Gardiens de la Galaxie Vol. 3. L’année s’est ni plus ni moins terminée avec le test de Bramble : The Mountain King. Or, il s’agit de ma plus belle découverte vidéoludique 2023, pour l’instant.

18 Trophées Platine

J’ai obtenu trois trophées platine de plus que l’an dernier, et 18 en tout, ce qui me permet d’arriver à un total de 94. Parmi mes derniers Platines, on trouve des jeux indépendants ou brefs (Twin Mirror, Maneater, Donut County, Stray, Suicide Guy, My Brother Rabbit, Final Fantasy I à V Pixel Remaster), mais aussi des jeux plus longs (Death Stranding, The Last of Us Part I, Horizon Forbidden West, God of War Ragnarök), voire carrément un peu pénibles à compléter (The Quarry, Hogwarts Legacy, Bramble : The Mountain King). The Quarry m’a imposé de refaire le jeu plusieurs fois afin de tuer ou sauver des personnages, ou de collectionner tous les collectibles. Hogwarts Legacy, dont je n’ai pas parlé sur le blog pour des raisons évidentes, possédait trop de collectibles pour son propre bien. Il fallait aussi refaire le début du jeu plusieurs fois, afin de découvrir les quatre maisons de Poudlard. Enfin, Bramble : The Mountain King doit être terminé sans mourir. Même avec l’astuce de la sauvegarde sur le cloud, ce trophée n’a pas été de tout repos.

21 Articles sur Little Gamers

J’ai posté quatre article de plus que l’année dernière, sur le blog. Je suis plutôt satisfaite de ce résultat, mais voyons lesquels ont le plus fonctionné :

1 – L’analyse de Death Stranding

2 – La peur récréative

3 – Les films et séries de ma vie

4 – Stray et Maneater

5 – Final Fantasy III & IV Pixel Remaster

L’analyse de Death Stranding est, de très loin, l’article ayant le mieux fonctionné. Les quatre autres articles du top ont un score finalement très moyen. Ne parlons même pas des articles de cette saison n’apparaissant pas dans la liste, tant ils ont été boudés, sauf par une communauté de lecteurs et de lectrices fidèles. Je vois deux raisons à cela. D’une part, j’ai changé de compte Twitter même si nous en parlerons plus bas. D’une autre part, j’ai été moins inspirée cette année. Les trois premiers articles du top sont une analyse très détaillée et des billets plus originaux. Les articles plus conventionnels ont moins convaincu, d’autant plus que j’ai beaucoup parlé de jeux indépendants. Les parodies de jeux d’horreur ou les articles sériels (comme The Last of Us (HBO) ou Final Fantasy Pixel Remaster) n’ont pas rencontré leur public non plus, mais je ne regretterai pas d’avoir essayé. A vrai dire, des articles plus anciens ont parfois mieux marché, dans l’année. Ils continuent donc à être lus, d’autant que j’ai veillé à tous les reposter sur Twitter, dernièrement. A ce propos, voici le top des articles les plus populaire du blog, depuis sa création :

1 – Dossier #3 : Little Nightmares

2 – Dossier #2 : Bienfaits et méfaits des trophées

3 – Dossier #1 : La Casa de Papel

4 – Le bestiaire de The Witcher

5 – L’analyse de Death Stranding

Si ces trois dossiers étaient déjà en tête l’année dernière, l’analyse de Little Nightmares a gagné deux places afin de se hisser au sommet du classement. Il est vrai qu’il doit y avoir peu d’analyses aussi approfondies sur la saga, au format écrit. L’autre changement du classement, c’est l’arrivée de l’analyse de Death Stranding dans le top des articles les plus lus, depuis la création du blog. C’est un double exploit car c’est un billet assez récent, et il ne comporte qu’une seule page, contrairement aux dossiers. C’est vraiment une agréable surprise.

59 Abonnés

Et oui, il fut un temps où j’avais 900 abonnés sur Twitter. En vérité, beaucoup n’étaient pas de vrais followers et renforçaient plus le sentiment de solitude qu’autre chose. C’est pourquoi j’ai décidé de basculer sur un nouveau compte Twitter, en septembre 2022. Nous n’y sommes que 59 mais je n’ai pas l’impression d’avoir énormément moins d’interactions. En tout cas, de mon côté, je me sens plus satisfaite de mon fil d’actualité. J’ai aussi pris la décision de supprimer Instagram. Il ne me reste plus qu’un compte très privé. Pour finir, il y a 61 littles gamers abonnés au blog lui-même.

15 881 Visites

Nous avions clôturé la saison 3 avec 12 304 visites. Il y a donc eu 3 577 visites sur le blog au cours de l’année scolaire. Cela en fait au moins 800 de plus que la saison dernière. C’est modeste, mais encourageant à mon échelle.

Que dire de plus ? Je ne regrette pas d’avoir un peu fait le ménage sur les réseaux sociaux car cela m’a permis de prendre le recul dont j’avais besoin, vis-à-vis de la baisse de visibilité. Il est vrai qu’avoir moins d’abonnés ne pouvait que réduire la popularité des nouveaux articles, mais certains ont tout de même sorti leur épingle du jeu, sans compter que d’anciens billets ont continué à fonctionner. Contre toute attente, mes résultats sont donc légèrement meilleurs que la saison dernière. Ou tout du moins, je vois la coupe à moitié pleine plutôt qu’à moitié vide. Le problème réside dans le fait que je n’ai pas toujours trouvé le temps, la motivation ou l’inspiration de faire des articles consistants, toutes les deux semaines. C’est pourquoi je dois vraiment réfléchir à l’avenir du blog, dont le rythme va changer, à moins que je ne décide tout simplement de parler d’autres sujets, comme le cinéma. Une chose est sûre, après un traditionnel été de repos, je compte bien poursuivre ma chasse aux trophées Platines, mais aussi reprendre mes services sur Pod’Culture, et bien sûr Little Gamers. Je vous dis donc à bientôt !

Final Fantasy V & VI Pixel Remaster | De la perfectibilité à la révolution

Cela fait plusieurs semaines que nous parlons de Final Fantasy Pixel Remaster sur le blog. J’ai présenté la collection à travers les deux premiers épisodes, avant de m’appesantir sur Final Fantasy III et IV. Même si j’ai une semaine de retard, je me devais de terminer cette série d’articles avant la fermeture estivale du blog. Il est donc temps de parler de Final Fantasy V et VI, respectivement sortis en 1992 et en 1994.

Des mondes de couleurs et de progrès

Final Fantasy V, c’est l’histoire de Bartz (un vagabond), Lenna (une princesse), Faris (pirate de son état) et Galuf (un vieil homme mystérieux et amnésique) qui vont devoir défendre la planète, après la mise en péril des cristaux élémentaires et la chute étrange de météorites venues d’ailleurs. Final Fantasy IV a beau être l’un de mes épisodes favoris, on sent les progrès entrepris avec le cinquième volet, dont la narration gagne en fluidité grâce à des animations plus nombreuses et sophistiquées mais aussi bon nombre de cinématiques. Final Fantasy V propose une durée de vie plus généreuse puisqu’il y a plusieurs mondes à visiter. Mais là où il se démarque le plus, c’est par sa tonalité volontairement légère, renforcée par des animations pleines d’humour et des couleurs très vives. Coïncidence ou non, plusieurs personnages ont un look particulièrement androgyne, à commencer par Bartz ou Faris (dont l’apparence est expliquée par l’histoire). Faris apparaît en tant que capitaine redouté des pirates. Ce n’est que plus tard dans l’aventure que ses partenaires (mais aussi les joueurs) se rendent compte que c’est une femme, préférant tout simplement se genrer et s’habiller au masculin. Faris est, à n’en pas douter, un personnage particulièrement avant-gardiste pour l’époque.

En terme d’exploration et de personnages, Final Fantasy VI n’est pas en reste. Il s’agit certainement de l’un des épisodes de la saga les plus populaires, avec le septième opus. Bien que mes préférences intimes aillent ailleurs, je dois reconnaître qu’ils n’ont pas volé leur popularité. Alors que Final Fantasy VII incarne une révolution technique, marquant l’ère de la PlayStation et de la 3D ; Final Fantasy VI est certainement ce qu’il se fait de mieux, en 2D. Pour commencer, le scénario et les personnages sont particulièrement bien écrits et intelligents, au point qu’on ressente un aboutissement dans l’évolution de la saga. Ce sixième volet est la jonction parfaite entre fantaisie et science-fiction, car les chimères sont au cœur du jeu, tant en terme de narration que de gameplay. Le monde des chimères est la cible de l’Empire, qui souhaite dérober et exploiter leur magie. Ils font régner la terreur en utilisant des armures Magitech et de l’artillerie lourde. D’un autre côté, les protagonistes tentent de préserver la magie et la nature de ceux qui tentent de les exploiter. Quand une chimère meurt, elle se transforme en Magilithe, une pierre qui abrite son âme et qui permet à son porteur d’apprendre la magie, à son tour. Terra n’en a pas besoin, car elle est elle-même à moitié chimère. Cette dernière est probablement l’une des héroïnes les plus marquantes de la saga. Dans les années 90, les Final Fantasy présentent des personnages particulièrement travaillés, qu’ils soient féminins ou masculins. A l’heure où j’écris ces mots, et bien que j’ai déjà terminé Final Fantasy VI par le passé ; je n’ai pas encore fini la version Pixel Remaster. J’ai dû faire une bonne moitié du jeu, qui m’a pourtant déjà remis en mémoire des scènes très marquantes et cultes, comme celle du train fantôme, où Cyan dit adieu à sa famille fraîchement décédée, ou celle de l’opéra, dans laquelle Celes dérobe la place de la cantatrice pour lui éviter un enlèvement, dans une mise en abyme parfaite, tant grâce à la mise en scène qu’à la musique. Le pixel art et le level design de Final Fantasy VI ont vraiment fait un bond en avant, au point que le jeu tente parfois de proposer une illusion de la 3D, dans ses tableaux ou dans ses cinématiques. Certes, c’est maladroit et plus très joli, aujourd’hui, mais on ne peut que saluer cet énième aspect avant-gardiste.

De la frustration à la fascination

J’ai dit beaucoup de bien de Final Fantasy V, mais je dois reconnaître qu’il m’a beaucoup frustrée, par bien des aspects. Pour commencer, de nombreux ennemis et même plusieurs donjons imposent des malus, des altérations d’état ou des handicaps, supposés être originaux, mais qui se révèlent plus pénibles qu’autre chose. Ensuite, chaque membre de l’équipe peut et doit maîtriser une vingtaine de jobs chacun. Il est vrai que cela engendre des possibilités de personnalisation et de stratégie infinies, mais il est aussi très long et fastidieux d’entraîner les personnages, comme de s’habituer à chaque style. En encore, cela a été grandement facilité par les nombreux bonus de la version Pixel Remaster ! Il est vrai qu’il est gratifiant de se retrouver finalement avec une équipe surpuissante, mais le chemin est bien long pour y parvenir. Comme si cela ne suffisait pas, le job du mage bleu nécessite d’être victime de certaines attaques pour les apprendre. Et encore, à condition d’avoir activé une compétence spéciale ! Une dernière pensée enfin pour l’apparition de boss secrets, certes facultatifs, mais particulièrement éprouvants à vaincre, sans la stratégie suggérée par des guides que je remercie chaleureusement. On ne peut assurément pas reprocher à Final Fantasy V d’avoir proposé de nouvelles choses, qui vont d’ailleurs inspirer de nombreux RPGs, par la suite ; mais beaucoup étaient perfectibles.

Heureusement, Final Fantasy VI va s’y employer. Le sixième opus a beau proposer beaucoup de personnages, tous possèdent un job fixe. A vrai dire, chaque membre de l’équipe maîtrise une capacité spécifique ; Strago est d’ailleurs un mage bleu. Mais le système d’apprentissage est simplifié et plus pratique puisque Strago peut apprendre l’attaque, même s’il n’en est pas la cible directe. De plus, une zone de la map permet de rencontrer n’importe quel adversaire vaincu par le passé, ce qui évite de manquer injustement une technique. On pourrait redouter un nombre trop élevé de personnages, mais tous sont marquants à leur manière, grâce à leur histoire, leur personnalité et leur job bien à eux. De plus, ils sont mis en valeur par une narration inédite dans la saga. En effet, il arrive que les personnages soient divisés en plusieurs équipes, qui vivront chacune un scénario différent, dans l’ordre souhaité par les joueurs. Mais ne nous leurrons pas, ce qui a rendu Final Fantasy VI si mythique, c’est probablement son antagoniste. Alors que la saga nous a habitués à des personnifications du mal ou du moins à des ennemis sombres et austères, Kefka est un digne héritier du Joker. Habillé comme un clown, haut en couleurs et prompt aux sautes d’humeur ; Kefka est un adversaire inattendu. Son allure de pantin ne le rend pas moins menaçant car c’est un être fourbe et cruel. Par-dessus tout, ses entrées sont toujours annoncées, en amont, par son rire tonitruant, qui est assurément un bel usage du bruitage, pour l’époque.

Final Fantasy VI possède toutes les qualités de ses prédécesseurs, portées à leur paroxysme. On sent combien Square rêvait déjà de proposer une aventure encore plus vaste, et même en 3D. En ce sens, il est particulièrement révolutionnaire, pour l’époque. Une chose est certaine : maintenant que je me suis remis la genèse de la saga, en tête, il me tarde de découvrir Final Fantasy XVI, sorti il y a quelques jours.

Final Fantasy III & IV Pixel Remaster | De l’apogée au détour des règles

Il y a quelques semaines, nous sommes déjà revenus sur l’intérêt d’acquérir la compilation Pixel Remaster des six premiers Final Fantasy. Suite à un retour sur les deux opus originaux de la saga, il est temps pour nous de nous intéresser aux épisodes III et IV. Square les a conçus en très peu de temps, puisqu’ils sont respectivement sortis en 1990 et en 1991. Si Final Fantasy III est assurément le meilleur épisode de la trilogie, dont il finit de bâtir les fondations ; Final Fantasy IV les sublime toutes afin de proposer la première histoire profondément authentique et personnelle. Il s’agit sans doute de l’un de mes opus favoris, de toute la franchise. Voyons donc pourquoi.

Édifier des règles pour mieux les contourner

L’histoire de Final Fantasy III est en toile de fond et ne se distingue que très peu de ses prédécesseurs. Quatre orphelins, répondant aux noms de Luneth, Arc, Refia et Ingus trouvent un cristal et sont élus pour représenter la lumière, face aux ténèbres qui menacent le monde. Bien que le fil conducteur demeure on ne peut plus classique, Final Fantasy III propose une réelle progression en terme de narration et de fluidité de l’histoire. Ainsi, les sorts ont une utilité narrative, puisque certains donjons nécessitent de se miniaturiser ou de se transformer en crapauds. Le monde ouvert est lui-même plus dense et riche, bien que l’on puisse regretter un donjon final exagérément long. On peut dire sans mal que Final Fantasy III clôture brillamment la trilogie, en menant à son paroxysme tout ce qui avait été introduit dans la saga, jusque là. La franchise a enfin un socle solide sur lequel s’appuyer.

Mais celui qui va tout transcender, au point de contourner certaines règles ; c’est bien Final Fantasy IV. D’abord, le jeu propose une quête principale plus longue et davantage de contenu annexe. Ensuite, dès le départ, il surprend les joueurs en avançant à contre-courant. Nous n’incarnons pas un personnage dénué de personnalité, ni un orphelin. Nous rentrons dans la peau d’un soldat aguerri, leader de la flotte militaire du roi, et a priori maléfique puisqu’il s’agit d’un chevalier noir. D’ailleurs, dès le début, un village est réduit en cendres par sa faute. Cécil marque un vrai tournant dans l’histoire des protagonistes de la saga, par la surprise et la richesse de son background. De manière plus générale, bien que l’on retrouve la collection de cristaux ou la lutte entre le bien et le mal, l’histoire est beaucoup plus originale et développée. Final Fantasy IV ne se contente pas de fouler des sentiers battus ; il exploite les codes maintes fois utilisés par la saga pour les contourner ou les sublimer. Et cela n’aurait pas été possible sans des personnages plus développés ainsi qu’un scénario plus subversif. Bien que Final Fantasy IV soit profondément ancré dans un univers médiéval de fantaisie, la saga commence à esquisser, avec lui, un virage vers la science-fiction. Après avoir exploré la planète bleue et le monde souterrain, les personnages doivent en effet trouver un moyen de voyager sur la lune.

Somme toute, Final Fantasy III est l’investigateur de grands progrès pour la saga. On n’a jamais vu autant de jobs différents, que l’on peut changer au fur et à mesure que l’on progresse dans l’histoire ; mais c’est au détriment de la profondeur des personnages. A ce niveau, Final Fantasy IV tire nettement son épingle du jeu, au point d’être l’un de mes opus favoris, de toute la saga.

Le casting formidable de Final Fantasy IV

Comme je le disais, les quatre protagonistes de Final Fantasy III sont dénués de personnalité, si bien qu’on peut modifier leur nom dès le départ, et qu’on peut changer leur job, tout au long du jeu. Bien qu’ils soient tous chevaliers oignons, initialement, il existe pas moins d’une vingtaine de jobs. La prouesse de Final Fantasy IV consiste à introduire des personnages définis et uniques, certes nombreux, mais tous plus marquants les uns que les autres. J’ai déjà évoqué Cécil qui, après avoir été un chevalier noir pendant de nombreuses années, doit accéder à la rédemption pour devenir un paladin de lumière. La lutte entre le bien et le mal n’est plus seulement externe mais aussi interne, comme en témoigne l’épreuve que doit accomplir Cécil pour devenir paladin. Il doit affronter un double de lui-même et finir par accepter de déposer les armes ; ainsi il prouvera sa vertu.

Les personnages ont un nom, un job et une personnalité définis. De sorte, il en va de même pour leurs relations. Ainsi donc, la mage blanche, Rosa, incarne le grand amour de Cécil. Un amour jalousé par Kaïn, le chevalier dragon. Il s’agit du meilleur ami de Cécil, que Golbez, l’ennemi principal, tente de manipuler. On comprend sans mal que le nom de Kaïn est une référence à Caïn, le frère ennemi d’Abel, dans la Bible. Je ne mentionnerai pas tous les personnages jouables, mais on peut avoir une pensée pour Cid, qui s’occupe toujours d’améliorer notre vaisseau. Rydia est une fillette extrêmement intéressante car son village à été brûlé à cause de Cécil. Elle trouvera toutefois la force de lui pardonner et de l’accompagner. Il s’agit d’une alliée précieuse puisqu’il s’agit de la seule invocatrice du jeu. J’ai une affection toute particulière pour les jumeaux Palom et Porom, dont le destin propose l’une des scènes les plus belles et mémorables du jeu.

Final Fantasy IV a si bien construit ses personnages qu’on ne peut que les aimer et que l’histoire, en utilisant pourtant les mêmes ressorts narratifs, se retrouve beaucoup plus immersive et émouvante. Naturellement, la musique n’y est pas étrangère.

Quelques points techniques et conclusion

Naturellement, Final Fantasy IV n’est pas exempt de défauts. Deux trophées nécessaires à l’obtention du Platine sont inutilement chronophages, bien qu’il existe des astuces pour accélérer les choses. Certains objets indispensables sont gagnés de manière aléatoire, en neutralisant certains types d’ennemis. Vous l’avez compris, Final Fantasy IV met un premier pas dans le chemin tortueux et infernal du farming abusif.

Final Fantasy III est, de son côté, un véritable socle pour la saga, puisqu’il est le premier à instaurer le système d’invocations, le sous-marin, ou encore les mogs. Mais Final Fantasy IV est une révolution, également sur le plan technique. Le level design des donjons est plus clair et intéressant. Par-dessus tout, le système de combat n’est plus du tour par tour traditionnel. Le jeu introduit l’Activ Time Battle, qui rend les affrontements plus dynamiques. En effet, les personnages peuvent réagir plus ou moins vite, et pas toujours dans le même ordre, selon comment progresse leur barre d’action.

Si on ne peut que saluer Final Fantasy III pour les pierres capitales qu’il a apportées à l’édifice de la saga ; Final Fantasy IV est vraiment révolutionnaire, pour son époque. Il m’a profondément marquée, grâce à son aventure unique et ses personnages formidables. Cela me donnerait presque envie de replonger dans sa suite, notamment sortie sur PSP : The After Years.

Resident Evil 4 | Un séjour avec Leon S. Kennedy

Vous vous souvenez de mon voyage avec Ethan Winters, en Europe de l’Est ? J’ai décidé de prendre de nouvelles vacances, mais avec un autre partenaire, car le premier était parfois un peu pénible… J’ai donc pris la destination de l’Espagne en compagnie de Leon S. Kennedy, et pour tout vous avouer, j’ai parfois eu l’impression d’atterrir dans le même village bucolique…

Tout commença lorsque Leon voulut m’amener faire une descente avec lui, en bagnole de flic. Séduite par l’idée, je l’accompagnai, de même que deux policiers locaux. Ces derniers donnaient l’impression de se moquer de Leon, mais de un, je ne parle pas un mot d’espagnol ; de deux, j’étais trop préoccupée par l’ingestion de mon tacos deux viandes. De ce que j’avais compris, ils devaient retrouver une certaine Ashley, qui avait un lien de parenté quelconque avec le Président de je ne sais plus quel pays. Le problème étant que j’avais furieusement envie de soulager ma vessie. Nous nous éloignâmes dans les bois, avec l’un des policiers ; et lorsque je revins sur mes pas ; je tombai nez à nez avec Leon. Avant de pouvoir le soupçonner de voyeurisme, je réalisai qu’il cherchait en fait l’autre flic. Leon cachait décidément bien son jeu. Malheureusement, le policier en question semblait avoir bel et bien disparu. Nous étions dans la forêt et il faisait très sombre. Armée de mon courage habituel, je décidai de suivre Leon comme son ombre…

Nous finîmes par tomber sur un village rural qui me rappela en tout point mes vacances avec Ethan. Je ne cachai pas mon bonheur, et d’ailleurs, les villageois locaux non plus. Ils étaient en train de faire un feu de joie, sur la place du village. Curieusement, cela ne sembla pas plaire à Leon qui se mit à agresser les paysans, les uns après les autres. Je savais que les américains étaient emplis de préjugés, mais pas au point de le voir frapper des petites vieilles. Une fois que Leon fut calmé, nous décidâmes de faire une pause. Le jeune policier s’empressa même de rédiger ce dont nous avions été témoins, en se servant d’une machine à écrire. Il structura son journal de bord en chapitres. Il me parut évident, tout à coup, que ce séjour serait bien plus long que tous ceux que j’avais entrepris jusqu’à présent… Notre objectif consistait à trouver un moyen d’aller jusqu’à l’église. Leon voulait-il se repentir pour ce qu’il avait fait, ou souhaitait-il tout à coup épouser la foi des habitants du village ? Figurez-vous que tout le monde semblait particulièrement pieux, ici. Leon s’empressa de les qualifier de « secte ». Si je rechignai à faire preuve d’un tel préjugé, force était de constater que certains espagnols étaient très étrangement vêtus. Ils semblaient même avoir attrapé un très mauvais virus. Je pense notamment à ce type qui avait les yeux écartés et un sac sur la tête. Pour couronner le tout, il se mettait à courir partout en agitant une tronçonneuse devant lui. C’est vrai que le bûcheron du village devait être débordé, surtout s’il était tombé malade, mais c’était dangereux quand même. Encore que, ça ne prouvait pas qu’il appartenait à une secte…

Quand nous fûmes repus des paysages champêtres, Leon et moi décidâmes d’emprunter une barque pour aller pêcher. Nous eûmes la main heureuse car je n’ai jamais vu un poisson aussi gros que celui que nous attrapâmes ce jour-là. Nous vîmes beaucoup de magnifiques paysages. La flore et surtout la faune étaient extrêmement variées dans cette région. Par contre, il fallait se méfier des pièges à loup. Je tombai constamment dedans, me promettant de les éviter la fois d’après ; mais oubliant cette promesse aussitôt. Nous finîmes par accéder à l’église et, tenez-vous bien, c’est là que nous retrouvâmes Ashley, la jeune fille disparue ! Les villageois ne nous voulaient donc pas que du bien. S’agissait-il vraiment d’une secte ? Leon avait-il donc raison depuis le début ? Notre duo devint ainsi un trio. Et je tiens à dire que, malheureusement, je ne portai pas Ashley dans mon cœur. Celle-ci venait d’être libérée de sa captivité, nous étions pourchassés par des villageois pas très contents ; et tout ce qu’elle trouvait à dire, c’était qu’avec le mauvais temps, elle allait attraper un rhume… D’ailleurs, elle devait déjà avoir de l’asthme, car elle n’avait de cesse de respirer comme un buffle, en trottinant derrière moi. Et puis, très vite, notre trio devint un quatuor. Nous tombâmes également sur un ancien chercheur répondant au nom de Luis. Bien qu’il nous aida à nous échapper du village, je dois admettre qu’il ne m’inspirait pas une confiance absolue. Si je dois faire un compte rendu de cette première étape du séjour, je dirais qu’il était beaucoup plus mouvementé et empli d’action, que les précédents. Bien sûr, cela ne nous empêcha pas de faire des promenades et de flâner. Leon n’avait pas perdu son âme d’enfant car il était toujours aussi fan de pirates. Tantôt nous achetions une carte à l’étrange Marchand qui nous suivait partout, pour faire des chasses au trésor dans le village ; tantôt nous allions dans un stand de tirs pour que Leon tente de gagner des prix en tirant sur des boucaniers en carton. En définitive, nous nous sommes beaucoup amusés. Mais je maintiens que quelque chose clochait dans cette région. Certaines personnes malades perdaient la tête et il leur poussait quelque chose à la place, vous savez, comme dans ce manga… « Parasite ». Ils ne voulaient définitivement pas que nous partions avec Ashley, et c’est pourquoi nous prîmes la fuite jusqu’au château.

Alors, il me sembla que nous basculions plusieurs siècles en arrière, jusqu’à l’ère médiévale. Les lieux étaient magnifiques, mais occupés. Ils appartenaient à un certain Ramon Salazar, qui ressemblait plus à un elfe de maison qu’à Serpentard. La religion semblait encore plus pratiquée ici-bas, car nous croisâmes de nombreux moines. La plupart d’entre eux étaient hostiles, et mêmes les armures décoratives finirent par nous attaquer. Fort heureusement, Leon avait toujours le mot pour rire : «  C’est de la camelote ces chevaliers. » Ah, ah ! Mais Ashley passait son temps à casser l’ambiance. Dès qu’elle n’arrivait pas à faire un saut toute seule, elle s’empressait d’appeler Leon, 50 fois d’affilée. Et puis, elle finissait toujours par se faire capturer, de nouveau ! Je peux dire, sans mentir, que nous avons passé notre temps à « rechercher Ashley ». Malheureusement, Leon finit par tomber dans un piège, et je me retrouvai seule avec elle, sans arme. Bonjour la galère ! Nous dûmes nous faufiler dans la bibliothèque, comme des rats, simplement équipées d’une lampe, afin de trouver un moyen de libérer Leon. Ce fut probablement l’un des moments les plus anxiogènes du séjour. Mais, comme on aurait pu s’y attendre, Ashley se fit de nouveau capturer et, avec le concours de Leon, je tentai de la rejoindre jusqu’à la salle du trône. Malheureusement, nous échouâmes dans les profondeurs. Vous savez, dans les jeux vidéo, il y a toujours un niveau où l’on patauge dans le caca… Mais pourquoi je parle de jeux vidéo ? L’ascension ne se fit pas sans encombre, pour regagner la surface. J’avais peu d’endurance, et il y avait un long chemin à parcourir. En plus, nous croisâmes une fois encore d’étranges créatures, dont des insectes plus gros que moi ! (Ce qui n’est pas peu dire). En tout cas, Leon n’avait pas que des amis, entre une étrange bête increvable, un soldat (Jack Krauser) qui n’arrêtait pas de le traiter de « bleu » et Salazar lui-même. Heureusement, nous prenions souvent le temps de souffler et de nous amuser un peu, au détour d’un ascenseur ou d’un chariot, qui ressemblait au Train de la Mine, chez Disney.

Une fois que nous eûmes fini d’explorer le château, nous quittâmes le Moyen-Age pour nous retrouver au début du vingtième siècle, pour ne pas dire dans un épisode de Call of Duty. L’île que nous venions de rejoindre était protégée par une horde de soldats armés jusqu’aux dents. Partout où je regardai, il y avait des projecteurs, des lasers et des mines explosives. Or, Leon comptait sur ma discrétion légendaire pour ne pas être repéré. Le pauvre, il n’était pas sorti de l’auberge. Je déclenchai l’alerte en à peu près deux minutes, et c’est ainsi que le massacre commença… Je compris rapidement pourquoi l’île était si bien gardée. Elle abritait des locaux où avaient été menées des expériences secrètes. Lorsque nous explorâmes l’un d’entre eux, nous vîmes passer, au loin, dans un couloir obscur, une étrange silhouette blanche et visqueuse à la démarche incertaine. Vous me connaissez, je n’aime pas douter de la gentillesse des gens ; mais je ne crois pas qu’il y en avait une once chez les Regeneradors. Non, Leon pouvait les tuer allégrement, s’il le désirait. Ou plutôt, s’il le pouvait. Nous continuâmes à nous frayer un chemin sur l’île, en dépit des efforts répétés du méchant affreux soldat qui pourchassait Leon partout. Mais en vérité, Jack avait krauser sa propre tombe. Ce n’est que dans les hauteurs que nous accédâmes au laboratoire final, où Leon et Ashley, qui avaient été contaminés, purent se soigner. Pour ma part, je n’avais rien à craindre, car je portais un masque anti-COVID. La fin du séjour fut quelque peu habituelle. Leon tua une vilaine grosse bête. Nous dûmes partir en urgence, en prenant malgré tout le temps de faire un tour en scooter des mers… Mais il y eut un rebondissement final inattendu puisque nous apprîmes, par l’intermédiaire d’Ada, que Wesker était le méchant depuis le début… Malédiction !

Final Fantasy I & II Pixel Remaster | Le retour des pionniers du JRPG

Qui n’a jamais entendu parler de Final Fantasy ? Jeu de la dernière chance pour Square, en 1987, la saga est – à l’instar de Dragon Quest – pionnière dans le monde du JRPG. Il est possible que vous vous soyez déjà laissés envoûter par l’une des musiques cultes de Final Fantasy, ou même que vous ayez testé l’un de ses épisodes phares, comme Final Fantasy VII, premier titre en 3D qui laissa son emprunte sur le monde du jeu vidéo. Il y eut pourtant bel et bien six épisodes avant, certains n’ayant été que très tardivement exportés en Amérique du Nord ou en Europe. La saga a fait du chemin depuis, puisque, actuellement, la version physique de Final Fantasy Pixel Remaster – regroupant les six premiers jeux – est impossible à se procurer, tant elle a été victime de son succès (ou de spéculation)…

De l’intérêt de la compilation Pixel Remaster

Final Fantasy (1987) n’a pas toujours été aussi riche visuellement.

Final Fantasy Pixel Remaster n’est pas la première réédition des titres originaux de la saga, loin s’en faut. Plusieurs versions et compilations ont traversé les années et les consoles. Final Fantasy est notamment sorti sur PlayStation, où ses graphismes étaient améliorés, sa musique remixée et où il était prévu plus d’espaces de sauvegarde. Chaque portage apporta son lot de modifications ou d’améliorations. On peut notamment mentionner la version Game Boy Advance qui intégrait, en plus d’un mode facile, du contenu supplémentaire, mais aussi un ajustement des mécaniques de gameplay, via l’ajout de points de magie ou d’objets curatifs. Sur PSP, on pouvait même retrouver des cinématiques en 3D. J’avais moi-même fait plusieurs épisodes de la saga, sur Steam, il y a quelques années.

Qu’apporte donc Final Fantasy Pixel Remaster, me direz-vous ? En ce qui me concerne, il y a le bonheur de redécouvrir les six premiers jeux de la saga, intégralement en VF, et sur PlayStation 4, ce qui signifie l’obtention de trophées de Platine à la clé. Par-dessus tout, comme en témoigne la bande-annonce de la compilation, Square nourrissait le désir de mettre, sur le marché, une version plus accessible et en même temps aussi fidèle que possible aux premiers titres de Final Fantasy. Ainsi, bien que les améliorations et les options d’accessibilité ne manquent pas, tout ajout superflu a été occulté afin de rester au plus près des versions originales. C’est par ailleurs la première fois que les six premiers titres sont compilés en même temps. De sorte, les interfaces et mécanismes sont plus harmonieux que jamais.

Parmi les options d’accessibilité les plus alléchantes, on peut mentionner l’amélioration de la police d’écriture, l’augmentation de la vitesse de déplacement, la possibilité de supprimer les rencontres aléatoires et le multiplicateur de points d’expérience ou de gains. Voilà qui met fin à tout ce qui gonflait artificiellement – et péniblement – la durée de vie des jeux, sur NES. L’expérience ne s’en retrouve que plus rapide et aisée. Le pixel art est remastérisé, à l’instar des musiques, réorchestrées par Nobuo Uematsu, en personne. Toutefois – toujours par souci de proposer une expérience aussi fidèle que possible – les joueurs ont la possibilité de remettre les musiques originales. Pour tous les fans de la licence, Final Fantasy Pixel Remaster est un must have, dans la mesure où il se nourrit des portages précédents, tout en réalisant le tri nécessaire pour rester le plus fidèle possible aux expériences de base. C’est la première fois que les six premiers épisodes sont harmonisés à ce point, et c’est naturellement l’occasion pour nous de revenir sur les prémices d’une saga pionnière du JRPG, en commençant naturellement par Final Fantasy I et II.

La structure narrative originale des Final Fantasy

Un aperçu des maps de Final Fantasy I & II.

Final Fantasy est une saga bien particulière dans la mesure où les titres principaux sont – généralement – indépendants les uns des autres. L’histoire ne se déroule pas dans le même univers et les personnages principaux changent, bien que l’on puisse retrouver des noms familiers, ici et là. Les mécaniques de gameplay elles-mêmes évoluent d’un jeu à l’autre. La saga a toujours été motivée par le besoin de se renouveler, au risque de ne pas toujours faire l’unanimité. Cette hétérogénéité se retrouve dès les premiers épisodes de Final Fantasy, qui n’en servent pas moins de socle pour les futurs jeux de la licence, ou pour les JRPGs en général. Au-delà de leurs différences, les jeux Final Fantasy possèdent naturellement un ADN commun, que l’on s’amuse à retrouver au cœur des deux premiers titres.

Final Fantasy est sorti, je le rappelle, sur NES, en 1987. On aurait pu s’attendre à une histoire tout à fait basique et, d’une certaine façon, elle l’est. Les joueurs peuvent choisir la classe et le nom des quatre personnages jouables, qui sont dénués de toute histoire ou personnalité. Les dialogues sont minimalistes et l’histoire très manichéenne. Et pourtant, on découvre un open-world riche, non dénué de poésie, dans lequel les quatre guerriers de la lumière doivent sauver les cristaux élémentaires, mais aussi neutraliser Chaos, pour ramener la sérénité dans le monde. Final Fantasy, premier du nom, est pourvu d’un retournement de situation final, un peu alambiqué, qui deviendra la marque de fabrique des futurs épisodes de la saga. Ainsi, Chaos et Garland, le chevalier maléfique vaincu au début du jeu, ne font qu’un ; le tout s’expliquant par une histoire de paradoxe et de boucle temporels. Final Fantasy n’en demeure pas moins l’histoire de la lutte sempiternelle de la lumière contre le mal. Les héros et l’antagoniste lui-même sont plus des entités symboliques que de véritables personnages.

Or, tout cela évolue dès le deuxième opus, dans lequel la narration s’est – en à peine un an – considérablement améliorée. Ainsi, les héros ont un passé et un nom, à commencer par Firion, Maria et Guy, qui recherchent leur frère perdu Leon. Ils rejoignent très rapidement la résistance afin de mener des activités rebelles contre l’empire, dirigé par le redoutable Palmécia. La saga acquiert une dimension politique qui ne la quittera jamais vraiment. Par-dessus tout, de nombreux personnages secondaires viennent grossir les rangs de l’équipe, de façon passagère. Cela permet d’enrichir l’histoire, les possibilités de gameplay, mais aussi de proposer de véritables ressorts scénaristiques, comme la mort de compagnons. Il est malheureusement assez préjudiciable de devoir constamment renouveler le quatrième membre de son équipe, mais l’effort n’en est pas moins louable. Par ailleurs, pour rendre les dialogues plus vivants, et l’implication des joueurs plus forte, Final Fantasy II met en place un système de mots-clés à découvrir et à retenir, afin de débloquer des dialogues inédits et souvent nécessaires à la progression. Tout cela semble peu de choses, mais on ne s’étonnera plus que Final Fantasy ait à ce point marqué l’histoire du RPG, ou du jeu vidéo en général.

Références et mécaniques de gameplay à gogo

Bahamut dans Final Fantasy et le Chocobo dans Final Fantasy II.

Bien que Final Fantasy ne soit pas le premier jeu vidéo de rôle, il n’en est pas loin, à l’instar d’un certain Dragon Quest. Or, les JRPG sont tous les enfants du jeu de rôle sur papier Donjons & Dragons. C’est pourquoi le bestiaire de Final Fantasy en est beaucoup inspiré. Si celui-ci n’aura de cesse d’évoluer au fil des années, certaines créatures restent des habituées de la saga. A mes yeux, Bahamut, que l’on retrouve dès le premier jeu, est une créature iconique de Final Fantasy. Mais il est bel et bien issu, lui aussi, de Donjons & Dragons. Final Fantasy s’inspire aussi de légendes, comme celles du Roi Arthur. C’est pourquoi l’arme la plus puissante du jeu s’appelle Excalibur. La saga commence à détenir une identité propre avec le second opus, où l’on commence à voir apparaître des visages familiers, comme Cid, qui possède un Aéronef. Par-dessus tout, la carte du monde abrite la forêt des Chocobos, dans laquelle on peut trouver une monture jaune canari digne de ce nom.

Les deux premiers Final Fantasy possèdent toutes les mécaniques de gameplay traditionnelles du JRPG. Les joueurs sont livrés à eux-mêmes dans un open-world, où la suite de la progression est indiquée par des dialogues et surtout des limites naturelles. Les héros n’auront par exemple accès qu’à un seul continent avant de débloquer un bateau. Les cartes ne sont pas très grandes, en comparaison avec les maps actuelles ; cela ne les empêche pas d’abriter plusieurs secrets et mystères. Par-dessus tout, la durée de vie et la difficulté des jeux était assurée, sur NES, par d’innombrables rencontres aléatoires, et la nécessité de s’entraîner des heures, afin de progresser. Il n’y avait bien sûr pas de sauvegardes automatiques, ce qui, en cas de KO ou de problème technique, pouvait faire perdre des heures de jeu. Avec les options d’accessibilité proposées par Pixel Remaster, les jeux sont nettement plus chills, si l’on omet certains boss plus retors, ou la nécessité de compléter un bestiaire dans lequel se dissimulent des monstres assez rares.

Le premier Final Fantasy est on ne peut plus classique au niveau des combats. Les stats et les compétences d’un héros dépendent de la classe choisie, au début de l’aventure. Si certains valoriseront l’attaque, d’autres seront des mages blancs ou noirs. Les combats au tour par tour ont longtemps été la marque de fabrique de la saga, avant d’être sacrifiés au profit d’une dimension action-RPG, dans les épisodes les plus récents de la licence. Comme je le disais, la saga s’est sans cesse renouvelée. Aussi, dès l’épisode 2, Square innove et tente des mécaniques de gameplay inédites. Or, elle ne m’ont personnellement pas séduite. Ainsi, les personnages ne gagnent aucun niveau. Leurs statistiques évolueront en fonction de la manière avec laquelle on jouera avec. Ainsi, un personnage qui attaque davantage sera plus fort, et un autre qui encaisse beaucoup plus résistant. Ce sont les compétences de magie et d’arme, qui évoluent, et ce, de façon plutôt capricieuse. On ne peut pas gagner à tous les coups, mais au moins Square aura-t-il tenté des choses.

Épilogue

Vous l’aurez sans doute compris, il est très intéressant de replonger dans l’univers des premiers Final Fantasy par l’intermédiaire de Pixel Remaster. On ne compte plus les compilations et les rééditions des premiers titres, mais il s’agit peut-être de la version ultime, à la fois très accessible et en même temps fidèle aux expériences originelles. Cela permet de découvrir avec sérénité l’histoire et les personnages des premiers opus d’une licence culte, qui, tout en se renouvelant, a peu à peu installé des éléments destinés à devenir mythiques et à la rendre tout de suite reconnaissable. Cerise sur le gâteau, le menu de chaque jeu réserve des surprises, comme le bestiaire, des concepts arts ou la possibilité d’écouter la bande originale. Il me tarde de me lancer dans la redécouverte des épisodes III à VI, et je reste également curieuse de découvrir Final Fantasy XVI, prévu sur PlayStation 5, plus tard dans l’année.

Si vous souhaitez en savoir plus, je vous invite à lire la chronique à venir de Pixel Remaster, sur Pod’Culture, signée Anthony ; mon article sur l’histoire du RPG, ou ceux sur Final Fantasy VII et VIII.

Pokémon Écarlate | Retour vers le… Passé

Bien qu’il s’agisse de l’une des licences les plus lucratives au monde, on ne peut pas dire que les jeux vidéo Pokémon brillent de tout leur éclat, ces dernières années. Game Freak et par extension Nintendo ne s’avouent pas vaincus, puisqu’ils continuent à sortir des opus, et ce plusieurs fois par an. Pourquoi s’en garderaient-ils ? Les joueuses et joueurs ont beau crier au scandale à chaque nouvelle parution, les titres continuent à se vendre comme des petits pains. Et je ne leur jette pas la pierre, puisque je me suis moi-même fait attraper par les mailles d’un filet que même le moins subtile des Magicarpe aurait su éviter. Qu’on le veuille ou non, la neuvième génération de monstres de poche est là. Ils évoluent dans une région inédite, Paldea, où l’aventure se veut à la fois plus libre et plus narrative que jamais. En dépit de son ambition, Pokémon Écarlate (ou Violet) souffre de défauts techniques et graphiques prévisibles, si bien que l’on peine à croire que le jeu date de 2022.

Classicisme et contre-courant

Comme dans tout jeu Pokémon, vous êtes amené(e)s à incarner un jeune dresseur ou une jeune dresseuse, qui rejoint l’Académie Orange (pour la version Écarlate). Le prologue est on ne peut plus classique, si bien qu’il rappelle les toutes premières générations de Pokémon. Sitôt votre mère vous a-t-elle prodigué ses derniers conseils que vous choisissez votre premier compagnon de route, parmi trois starters (Poussacha, Chochodile et Coiffeton) avant de partir à l’aventure. Une chose est certaine, vous n’irez pas beaucoup en cours, car vous aurez tout un monde à explorer. Votre objectif ? Trouver votre trésor.

Mais alors que le début semble classique, plusieurs mécaniques sont utilisées à contre-courant. L’exemple le plus adéquat est l’apparition précoce du Pokémon légendaire du jeu : Koraidon. Celui-ci intervient dès le début de l’aventure, puisqu’il fait office de Pokémonture, afin d’évoluer dans le vaste open-world. De la sorte, un lien se crée avec le Pokémon légendaire, plus encore qu’avec votre starter. Certaines missions lui font gagner des compétences, débloquant de nouvelles zones de la map. C’est plutôt bien pensé d’autant que Koraidon ne fait pas tout à fait partie de votre équipe, préservant ainsi l’aura inaccessible qui sied à tout légendaire digne de ce nom.

Vos objectifs sont les mêmes que d’habitude, à savoir compléter votre Pokédex, devenir Maître et mettre fin à la menace d’une certaine Team. Mais une fois encore, on se laisse surprendre par quelque originalité, tant au niveau du fond que de la forme. En fait, le jeu entier ne possède que trois quêtes principales, disponibles en simultané. Vous êtes lâché(e)s dans le vaste monde, où vous pourrez affronter les Arènes dans l’ordre que vous désirerez. En parallèle, il vous faudra dissoudre les quartiers généraux de la Team Star, afin de débloquer de nouvelles zones, et enfin affronter des Pokémon gigantesques dans le but de trouver des épices miraculeuses, pour l’un de vos amis, Pepper. Ainsi, vous êtes totalement libres d’explorer la région à votre guise. Au début, il n’est pas toujours évident de trouver votre chemin, mais le niveau des Pokémon sauvages devrait vite vous guider.

Une narration inspirée

Les quêtes sont très peu nombreuses, mais efficaces. C’est la première fois que je me laisse à ce point entraîner par l’intrigue d’un jeu Pokémon, ou que je trouve les personnages secondaires aussi caractérisés. Certains mini-jeux précédant les Arènes sont peu inspirés, et le titre a du mal à faire intervenir de vrais rivaux ou méchants (au point de risquer la dissonance ludo-narrative puisqu’il faut bien des duels) ; mais dans l’ensemble, la narration est efficace. La Team Star a un véritable passif et est représentée de façon moins manichéenne que d’habitude. La mission nécessitant d’aller chercher des épices est finalement, elle aussi, bien loin de la simple quête fedex de RPG. Il est nécessaire de finir ces trois quêtes pour accéder à la fin du jeu qui réserve, elle aussi, son lot de surprises. Bref, bien que la narration n’ait rien de révolutionnaire ni de particulièrement profond ; c’est un vrai bond ou du moins une bouffée d’air frais venant de la licence Pokémon.

J’ai beaucoup mentionné l’open-world sans préciser que la région Paldea s’inspire de la Péninsule ibérique, comprenant l’Espagne, le Portugal et les îles environnantes. On reconnaît ainsi la faune, la flore et l’architecture hispaniques. Pour ne citer que cela, le bâtiment de l’Académie Orange ressemble énormément à la Sagrada Familia, de Barcelone.

Les nouveaux Pokémon de la neuvième génération ont été imaginés en fonction de cet environnement. On peut mentionner Compagnol, un assemblage de petits rongeurs, Pâtachiot, le chien brioche, Olivini, que l’on retrouve dans les vignes, Terracool, le cousin de Tentacool, ou encore Courrousinge, une nouvelle évolution plutôt charismatique de Colossinge. Le taureau étant l’emblème de l’Espagne, il existe trois nouveaux skins pour Tauros. Celui que vous croiserez dans la plupart des plaines est d’un noir de jais. Selon que vous jouiez à la version Écarlate ou Violet, vous trouverez – plus rarement – un Tauros de type feu ou eau. Ces nouveaux Pokémon sont plutôt mignons et sympathiques, mais pas toujours inspirés. L’un d’eux est tout de même un dauphin qui s’appelle littéralement Dofin. Et tenez-vous bien, il évolue en Superdofin ! Cela ne m’a certes pas empêchée de prendre beaucoup de plaisir à explorer la région de Paldea, riche en environnements variés, afin de débusquer le plus de Pokémon possibles. Chaque espèce se déplace à sa façon et à ses réactions propres sur la map. Un jeu Pokémon ainsi fait était clairement un rêve de gosse.

Archaïsme technique

En parlant d’enfance, j’ai eu l’impression de retourner au début des années 2000, et il ne s’agit pas d’un compliment. On peut dire, sans trop exagérer, que Pokémon Écarlate aurait pu sortir sur PlayStation 2. Les graphismes sont archaïques et ce n’est rien comparé aux défauts techniques du jeu. Les éléments de la carte et les Pokémon sont affichés au dernier moment, les ralentissements sont très réguliers, et ne parlons pas de la caméra complètement folle, surtout pendant les combats. Certes, les graphismes ne font pas tout et les problèmes techniques n’empêchent pas de jouer, mais un tel rendu est ni plus ni moins scandaleux, en 2022.

L’open-world s’inspire clairement de celui de Breath of the Wild mais ne lui arrive, évidemment, pas à la cheville. Comme si l’inspiration n’était pas assez évidente, on retrouve d’ailleurs des coffres rouges, cachés ici et là. Ils sont en fait piégés puisqu’il s’agit d’un Pokémon nommé Mordudor. Bref, le monde ouvert de Pokémon Ecarlate a beau grouiller de Pokémon, et s’avérer assez chill ; il est désespérément vide. Je ne suis pas fan des collectibles ou des quêtes annexes futiles, mais de là à n’en mettre quasiment aucun ! Il est frustrant de n’avoir presque aucun mystère à découvrir dans cette grande map, (du moins avant le post-game, que je n’ai pas fait). Les villes elles-mêmes sont inintéressantes au possible, comparées aux premiers jeux Pokémon. La plupart du temps, il n’est même plus possible de rentrer à l’intérieur des bâtiments, qui ne sont que des façades vides. Les magasins et restaurants se contentent d’afficher des pages d’inventaires et de menus, on ne peut plus répétitifs.

Conclusion

Cette nouvelle génération de Pokémon se distingue par son aptitude à rendre hommage aux premières générations, tout en apportant son lot de nouveautés. Le Pokémon légendaire est une monture permettant d’explorer un monde ouvert intégral. Les trois quêtes principales s’effectuent dans l’ordre désiré. J’ai presque oublié de mentionner l’apparition d’une nouvelle forme de Pokémon, due au Téracristal. Le dernier Pokémon possède des qualités narratives que l’on attendait plus. L’évolution de l’intrigue et la sensation de liberté sont toutefois gâchées par la vacuité de la map, mais aussi le retard scandaleux des graphismes et de l’aspect technique. Une part de moi a été agréablement surprise et s’est bien amusée, avec ce nouveau Pokémon ; l’autre est une fois de plus excédée que Game Freak et Nintendo se moquent à ce point du monde. Ils continuent à vendre, plusieurs fois par an, des jeux bâclés et inachevés. C’est le jeu Pokémon dont j’aurais rêvé quand j’avais dix ans. Alors, peut-être que quand j’en aurai 50, un Pokémon digne de ce nom sortira. Mais ma patience, pourtant plus légendaire que Koraidon, aura certainement atteint ses limites, d’ici là.

Les jeux Supermassive Games | Une formule qui s’essouffle

Le studio Supermassive Games, fondé en 2008, accéda à une certaine renommée avec Until Dawn, qui fut élu « meilleure surprise de la rentrée 2015 ». C’est aussi le studio à l’origine de The Quarry ou des jeux épisodiques appartenant à la série The Dark Pictures Anthology. S’ils ont des ambiances variées, tous ces jeux sont liés par le genre du survival horror, mais aussi l’aspect « film interactif », bien que je ne sois pas fan de ce terme, utilisé à tort et à travers de nos jours (certains l’utilisent même pour The Last of Us ou God of War…) En dépit de l’originalité de la formule initiale, ces jeux sont aussi – fort malheureusement – liés par des défauts, qui, faute de s’effacer avec le temps, s’enracinent dans les rouages de l’intrigue et du gameplay, au point d’en rendre le mécanisme à la fois usé et usant.

Hommage au cinéma d’horreur

Les productions Supermassive Games dont il est question dans cet article appartiennent au genre du survival horror. Généralement, les personnages sont prisonniers d’un endroit mettant leur vie en danger. Il ne tient qu’aux joueurs de les sauver, en faisant les bons choix. La caméra est fixe afin de maintenir une tension et une sensation de malaise. Chaque jeu s’inspire pourtant d’un sous-genre spécifique de l’horreur. Ainsi, Until Dawn rendait hommage aux slashers des années 90 et 2000, dans lesquels un groupe d’adolescents stéréotypés se faisait tuer progressivement. Celles et ceux ayant fait le jeu savent toutefois que l’intrigue prend ensuite un tout autre virage. The Quarry s’attaque plus vraisemblablement au mythe des loups-garous. Quant à The Dark Pictures Anthology, la première saison vient de se terminer et quatre titres sont sortis à ce jour. Man of Medan revisite la légende du bateau fantôme, Little Hope celui de la ville de Silent Hill, hantée par les souvenirs de sorcières sacrifiées ; de son côté, House of Ashes se déroule dans un vieux temple où surviennent des événements venus d’ailleurs, quand The Devil in Me, jeu le plus récent, préfère se concentrer sur un manoir piégé, où sévit un admirateur du tueur en série H. H. Holmes. Ainsi, il y en a pour tous les goûts et cela permet – en principe – d’éviter la sensation de répétitivité.

Gameplay semé d’embûches

Ces jeux ont tous, à peu de choses près, le même gameplay. Les joueurs contrôlent alternativement plusieurs personnages, qui ont la possibilité d’explorer les lieux, à la recherche d’indices sur la suite des événements. Certains objets permettent même de lire l’avenir. Les différentes phases de l’intrigue sont généralement divisées et commentées par un narrateur ou une narratrice. Dans The Dark Pictures Anthology, il s’agit du glacial et énigmatique Conservateur, incarné par Pip Torrens. La mécanique de gameplay la plus importante des jeux réside toutefois dans la possibilité de faire des choix de dialogue et d’action qui auront des conséquences, sur le fil de l’intrigue. Les scènes d’action se gèrent traditionnellement par un enchaînement de QTE. Il s’agit de jeux narratifs somme toute classiques, si on les compare aux titres Telltale Games ou Quantic Dream.

Malheureusement, le gameplay possède des lourdeurs qu’on peine de plus en plus à pardonner avec le temps. En haut de l’affiche, on peut mentionner les persos tanks, à la fois lents et rigides. Le studio essaie de rendre ses jeux plus dynamiques. D’ailleurs, les personnages de The Devil in Me peuvent désormais courir, franchir des obstacles ou utiliser des objets. Mais cela ne résout pas le problème des innombrables, longs et répétitifs couloirs à traverser. Les jeux de The Dark Pictures Anthology souffrent de sérieux problèmes de rythme. La mise en place de l’histoire et des personnages est deux fois trop longue, tandis que le final est souvent expédié très vite, au point de laisser un sentiment de frustration aux joueurs et joueuses. Plusieurs fins m’ont donné l’impression de finir en queue de poisson même si j’ai conscience que les mystères ne sont tout à fait résolus qu’en découvrant tous les secrets, et que cela apporte donc une certaine rejouabilité. Enfin, il n’est pas toujours aisé de se sentir investi(e), car les histoires et les personnages sont définitivement trop stéréotypés. Il est ainsi difficile de s’attacher émotionnellement à eux ou de vraiment se soucier de leur sort. Et ne parlons pas de la mise en scène, qui croit terroriser, en faisant des gros plans systématiques sur des cadavres aux orbites vides ou aux yeux exorbités… Supermassive Games fait volontairement des jeux qui rendent hommage aux clichés des films d’horreur, mais cela est si peu subtil que les titres en deviennent très caricaturaux.

Espoir et déception

Vous allez me dire : « pourquoi t’acharnes-tu donc à continuer à tester ces jeux ? » Eh bien, parce qu’ils possèdent des qualités malgré tout. En dépit de quelques soucis techniques, les graphismes des jeux Supermassive Games sont généralement impressionnants. Le développeur utilise la motion capture pour rendre ses personnages plus réalistes que jamais. A travers les différents jeux, on reconnaît ainsi une jolie palette d’acteurs et actrices, comme H. Panettiere, R. Malek, S. Ashmore, W. Poulter, D. Arquette ou encore T. Raimi. De plus, en dehors d’Until Dawn, ces jeux possèdent un mode multijoueur, en ligne ou local. Les soirées canapé me manquent tellement qu’il s’agit – à mes yeux – d’un vrai argument de vente. Du moment qu’on prend ces jeux pour ce qu’ils sont, et qu’on accepte de montrer une très forte suspension consentie d’incrédulité ; on peut parfois passer un assez bon moment. J’ai donc joué à chacun des titres proposés par le studio, dans l’espoir que celui-ci apprenne de ses erreurs et propose des jeux plus divertissants.

Malheureusement, Supermassive Games préfère – de loin – la quantité à la qualité. Alors que j’avais senti une évolution avec House of Ashes et même The Quarry, le studio est retourné dans ses vieux travers avec The Devil in Me. De quoi sérieusement user la patience des joueurs les plus tolérants. Il devient évident que la formule n’évolue pas et se renouvelle si peu qu’elle s’essouffle de plus en plus. Je ne peux décemment plus conseiller ces jeux, qui sortent tout de même une fois – voire deux fois – par an. The Devil in Me annonce la deuxième saison de The Dark Pictures Anthology, qui devrait débuter avec un jeu dans l’espace. Je ne suis pas sûre d’être au rendez-vous, cette fois-ci.

A mes yeux, c’est un potentiel gâché. L’idée est brillante, car j’aime énormément les jeux narratifs, surtout s’ils peuvent être faits à plusieurs, comme s’il était question d’un jeu de rôle. L’aspect survival horror promet une soirée particulièrement riche en sensations. Malheureusement, les défauts au niveau du gameplay, du rythme et de la narration sont si nombreux qu’on a l’impression de se retrouver devant le jeu pop corn de l’année. On ne sait plus trop pourquoi on y joue, si l’on oublie le fait qu’on désespère de trouver des titres proposant un mode multi local. Je ne fais plus confiance à Supermassive Games, mais je regretterai toujours que cette idée n’ait pas été mieux exploitée, ni reprise par un studio plus ambitieux. Quand on voit à quel point It Takes Two a été apprécié, on peine à comprendre pourquoi les aventures narratives jouables à plusieurs ne reviennent pas sur le devant de la scène.

Resident Evil VIII | Un séjour avec Rose Winters

Vous vous souvenez du voyage que j’ai entrepris avec Ethan Winters, il y a quelques années ? S’il a étrangement coupé les ponts depuis, j’ai eu l’occasion de retrouver sa fille Rose, devenue une ravissante adolescente. Après avoir fumé quelques joints, (ne le dîtes à personne, je ne sais pas si elle est majeure), nous avons décidé de retourner en Europe de l’Est, à l’endroit où elle vivait lorsqu’elle était bébé. Si vous projetez vous-même de faire ce voyage à l’avenir, je ne vous conseille pas de lire le compte-rendu de nos péripéties. Une dernière chose : soyez indulgent(e)s en me lisant. Je crois que nous avons définitivement trop fumé…

Je ne me souviens pas clairement du voyage, mais seulement que nous nous sommes réveillées dans un endroit sombre et exigu. Très vite, une porte trembla et une voix féminine nous demanda de la libérer. Lorsque nous la sortîmes de là, Rose constata qu’elles avaient un air de ressemblance. Je trouve, personnellement, qu’elle exagérait. Et puis, il faisait si sombre que nous ne voyions pas grand chose. Nous fîmes rapidement d’autres rencontres. Les filles ne semblaient pas très éveillées et les hommes étaient plus que blafards. Ils se traînaient péniblement vers nous en poussant des gémissements. A cet instant, je compris que nous nous étions retrouvées dans un repaire de hippies et de drogués. Mais qui suis-je pour juger ? Nous n’étions pas bien sobres nous-mêmes. Ce n’était cependant pas suffisant pour excuser le comportement de Rose, qui était bien la fille de son père. Elle ne cessait de se plaindre ou de se rendre dans des endroits improbables, quitte à ramper sur le sol ! Elle allait mettre des heures à nettoyer et repasser son linge… A force d’errance, nous finîmes par regagner la surface. Je compris, à ma plus grand satisfaction, que nous avions retrouvé le château de la famille Dimitrescu.

Les lieux appartenaient désormais à l’homme en léger surpoids qui commerçait avec Ethan et moi, autrefois. Il se faisait surnommer le Duc. En le voyant porter un masque et en l’entendant émettre des rires diaboliques, je conclus qu’il était certainement devenu comédien. Les types blafards qui déambulaient partout dans le château devaient composer sa troupe de théâtre. Les lieux étaient aussi vastes et somptueux que dans mes souvenirs. Ils étaient un peu moins propres et ordonnés, voilà tout. Fait assez amusant pour être souligné, le Duc n’avait pas pris la peine de remplacer les fenêtres, depuis qu’Ethan s’était amusé à toutes les briser. Rose avait la même passion pour l’exploration et les Escape Games que son père. Elle se mit en tête de parcourir tout le manoir afin de trouver des masques. C’est vrai que la période du COVID n’était pas tout à fait terminée, mais enfin, elle le faisait avec un sacré acharnement. Ah, j’oubliais ! Tout au long de notre visite, nous fûmes guidées par une personne mystérieuse, qui refusait de dévoiler son visage ou son identité. Il se contenta d’expliquer qu’il souhaitait veiller sur Rose. Pendant un instant, je pensai qu’il pouvait s’agir d’Ethan. Mes doutes se dissipèrent dès qu’il donna son nom : Michael. Je songeai, un instant, qu’il avait pu mentir. Il mit fin à mes derniers soupçons en affirmant qu’il était un ange… Nous avons passé plusieurs heures à explorer le château. Je vous épargne les détails. Badabim. Badaboum. Nous nous sommes rendues à la demeure Beneviento.

C’est avec nostalgie que je redécouvris le lieu de mes précédentes vacances. Si la propriétaire de la maison n’était pas là, elle avait eu la gentillesse de nous laisser toutes ses affaires. Rose se mit ainsi à jouer avec des singes en peluche et des poupées. Je trouvai qu’elle était un peu âgée pour faire cela, mais, une fois encore, qui suis-je pour juger ? Nous finîmes par avoir de la visite. Il s’agissait de jeunes femmes, tellement belles, qu’on aurait pu les prendre pour des mannequins. En revanche, elles étaient très timides. Elles n’osaient venir vers nous que lorsque nous avions le dos tourné. Mais alors, qu’est-ce qu’elles étaient affectueuses ! Elles cherchaient sans arrêt à nous étreindre ! Nous finîmes, je pense, par fumer le pétard de trop, car la maison sembla devenir gigantesque. Les poupées semblaient plus grandes que nous et nous pourchassaient, comme pour faire une partie de cache-cache survitaminée. Elles auraient tout de même pu se passer de brandir des paires de cisailles, car c’était dangereux. Je vous le dis, cette histoire aurait pu mal finir ! Quand nous reprîmes nos esprits, nous nous rendîmes compte que la maison n’était pas déserte mais qu’elle était occupée par… Eveline. J’étais si contente de la revoir ! Rose s’étonna que notre hôtesse soit restée une petite fille, mais elle était encore dans l’exagération, si vous voulez mon avis. Certaines personnes ne grandissent pas beaucoup ; ce n’est pas une raison pour les stigmatiser. Eveline était d’humeur chagrine car personne ne lui rendait jamais visite et qu’elle se sentait seule. Si j’éprouvai de la compassion pour elle, je fus bien la seule. Rose se montra plutôt brute de décoffrage et décida de partir, épaulée par… Ethan. Comment ?! Michael n’était pas un ange et nous avait donc menti ?! La stupéfaction passée, je pensais qu’Ethan était bien un mec et un piètre père, par-dessus le marché. Attendre que sa fille soit presque adulte pour réapparaître, c’était quand même limite limite !

C’était décidé, j’en avais assez. J’avais envie de rentrer. Rose souhaita tout de même rester pour trouver je ne sais quel cristal. Un objet de valeur pour la famille, sans doute. Et figurez-vous que nous croisâmes une autre vieille connaissance : Miranda ! Celle-ci n’avait pas changé et était très heureuse de rencontrer Rose. Elle admit même que c’était elle qui nous avait conviées ici. Je suppute que la discussion dégénéra entre Miranda, Rose et Ethan, qui n’était jamais le dernier pour faire des embrouilles… Et finalement, nous partîmes, les mains vides. Non seulement Ethan n’avait pas souhaité rentrer avec nous, mais Rose avait fait tomber le cristal sur le sol, le faisant exploser en mille morceaux. Tout ça pour ça ! Je pense qu’on ne me surprendra plus à voyager avec les Winters. Enfin, il ne faut jamais dire jamais…