Si vous connaissez ce blog, vous n’êtes pas sans savoir que je suis une grande amatrice de la saga Little Nightmares. Aussi, c’est avec une certaine fierté que je reprends du service, avec l’analyse du dernier opus de la saga : Little Nightmares 3, édité par Bandai Namco en octobre 2025. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le benjamin de la trilogie fait l’unanimité dans le mauvais sens du terme, tant il est décrié. Ce n’est malheureusement pas étonnant, dans la mesure où le développement n’est plus assuré par Tarsier Studios mais par Supermassive Games, les darons de la très moyenne Dark Pictures Anthology. Nous profiterons de cet article pour rappeler les raisons de ce changement drastique, pour comprendre pourquoi Little Nighmares 3 échoue là où ses prédécesseurs avaient si bien réussi, mais aussi et surtout pour analyser ce que cet opus apporte à l’univers que nous chérissons tant.
Tarsier Studios s’en est allé…
Suivez Low et Alone dans une aventure inédite.
Bien que Tarsier Studios soit suédois, et Supermassive Games britannique, les deux studios ont fait leurs armes sur Little Big Planet, ce qui les a sans nul doute formés pour le développement de platformers 2D. Ce n’est pas leur seul point commun, puisque Supermassive Games est connu pour le slasher Until Dawn, suivi d’une série de jeux narratifs d’horreur coopératifs, certes moins réussis. Alors que les deux studios œuvraient pour Bandai Namco depuis quelques années, Tarsier Studios s’est laissé racheter par THQ Nordiq (Biomutant, Alone in the Dark) en 2019. Depuis, THQ Nordiq a lui-même été absorbé par Embracer Group. Or, la franchise Little Nightmares appartient toujours à Bandai Namco. Non seulement Tarsier Studios travaille sur un nouveau titre, baptisé Reanimal ; mais Bandai Namco a dû choisir un autre développeur : Supermassive Games. Le choix est plutôt judicieux sur le papier, mais beaucoup moins quand on a joué à un certain nombre de leurs derniers jeux. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, je n’ai trouvé aucune trace d’un potentiel conflit entre Bandai Namco et Tarsier Studios, qui serait à l’origine de cette division. Et pourtant, Tarsier n’a pas manqué de faire paraître la démo de Reanimal, très peu de temps après la sortie de Little Nightmares 3. Or, la démo en question a été beaucoup mieux reçue que le jeu entier, développé par Supermassive Games. Notons que Reanimal devrait sortir au début de l’année 2026, mais nous ne sommes malheureusement pas là pour parler du prochain (et prometteur) titre de Tarsier.
A deux, c’est mieux ?
« Ca va couper, chérie… »
Little Nightmares 3 ne met plus en vedette Six, la fillette enveloppée d’un imperméable jaune ; mais deux nouveaux enfants. Low porte une cape, un masque ressemblant à un corbeau ou même à Pantalon, de la commedia dell’arte. Il est armé d’un arc et de flèches. Alone, qui a le visage entièrement masqué, est quant à elle équipée d’une clé. Little Nightmares 3 se veut innovant, en proposant une aventure entièrement coopérative. Il faut être deux pour progresser au fil des quatre chapitres du jeu, puisque chaque personnage possède une compétence qui lui est propre. Le titre propose même un « friend pass », afin de pouvoir jouer à deux, en ligne, avec un seul jeu acheté. Malheureusement, Little Nightmares 3 ne possède pas de mode multijoueurs local, ce qui est assez ironique quand le jeu est vendu comme une expérience coopérative ; et quand on sait que ce sera le cas de Reanimal. J’ai testé Little Nightmares 3 en coopération avec l’IA, mais aussi en ligne, grâce au Friend pass. Comble du malheur, de nombreux bugs sont apparus quand on jouait à deux, en ligne, comme si le jeu ne supportait pas ce pour quoi il était initialement prévu.
Nécropole et bac à sable
A un moment, je me suis crue dans Toy Story 3…
L’aventure de Little Nightmares 3 débute dans une cité située au beau milieu du désert, baptisée la Nécropole. Un cimetière est un premier terrain de jeu intéressant. J’ai tout de suite été frappée par la colorimétrie assez innovante du titre. Les protagonistes, plus colorés que leurs prédécesseurs, progressent dans une zone à l’ambiance dorée. Les défunts de la Nécropole ne sont pas habituels non plus, puisqu’il s’agit d’individus changés en pierre. Une nuée de corbeaux semble par ailleurs avoir élu domicile en ces lieux. On ne peut s’empêcher de se demander si Méduse hante la Nécropole, elle-même surveillée par Odin. Mais la réalité est autre. L’occupant des lieux est un bébé géant. Nous ne sommes pas coutumiers de monstres aussi gigantesques dans la saga. Pourtant, cet antagoniste avait été envisagé par Tarsier Studios par le passé. Ils avaient alors imaginé une créature plus organique, alors que le bébé que nous confrontons est un poupon en mauvais état. Le bébé est fait de plastique ou porcelaine quand l’antagoniste du chapitre 2 se déplace sur un système à roulettes mécanique. C’est un changement honorable, mais qui tend peut-être à rendre les monstres moins terrifiants. Autre fait surprenant, les ennemis de la franchise sont généralement des adultes qui en veulent particulièrement aux enfants. Dans la Nécropole, le bébé est même plus jeune que nos protagonistes. En vérité, il paraît plus malheureux et maladroit que profondément méchant ou agressif. Certains joueurs voient en ce bébé un alter-ego de Low. Ainsi, ce premier antagoniste ne serait que la métaphore d’une enfance brisée et délaissée. Il n’y a, à mon sens, malheureusement pas grand chose d’autre à se mettre sous la dent, niveau analyse. Cet opus – moins cryptique que ses prédécesseurs – semble faire table rase du passé. On retrouve de nombreuses références au symbole de l’œil, qui avait l’habitude de nous épier. Mais ce n’est pas suffisant pour placer Little Nightmares 3 dans l’espace ou dans la chronologie. Ce sont, à mon sens, des références plus malhabiles qu’autre chose. On commence très tôt à craindre que Supermassive Games ait singé Tarsier Studios, sans comprendre la teneur du bijou qu’ils avaient entre les mains. Ainsi, ils n’ont pas réussi à capturer l’âme de Little Nightmares. Le premier chapitre de ce titre est outrageusement simple. Ne vous attendez pas à rencontrer des tableaux glaçants ni des énigmes retorses. Le plus souvent, il sera question d’avancer de manière horizontale, en traversant d’indénombrables trappes ou conduits d’aération. L’introduction de nouvelles mécaniques de gameplay, comme les parapluies permettant de planer, ne change malheureusement rien à la donne. La fin du chapitre nous apprend que Low et Alone se déplacent d’un lieu à l’autre, grâce aux miroirs. Une référence potentielle à Alice au Pays des Merveilles, qui se déplace elle-même de l’autre côté du miroir. Les miroirs ont toujours eu un rôle prépondérant dans la saga. Hélas, ce moyen de transport magique est aussi un prétexte pour nous déplacer entre des lieux, sans cohésion.
Araignée et bonbons
On mange ou on se venge ?
Low et Alone se retrouvent dans un endroit bien plus froid et métallique, aux lueurs grises et verdâtres. Il s’agit, tenez-vous bien, d’une usine à bonbons. Pour l’instant, le seul thème commun envisageable est celui de l’enfance. Autant dire que Supermassive Games ne sont pas allés chercher très loin. Comme dit plus tôt, l’antagoniste de ce chapitre est une femme se déplaçant sur des roulettes. Elle occupe le rôle de Superviseuse dans l’usine, et possède de nombreux bras. Plus loin dans le niveau, on réalise que la partie inférieure de son corps est mécanique. Quand elle s’en déleste, la Superviseuse a tout d’une araignée humaine. Malheureusement, elle non plus n’est pas très angoissante, car elle rappelle énormément la Maîtresse de Little Nightmares 2, qui était nettement plus glaçante. On croise aussi la route de nombreux employés de l’usine. Il s’agit d’adultes obèses et abrutis par leur emploi, mais assez inoffensifs. On peut y déceler sans doute une satire du travail à la chaîne. D’aucuns y voient une explication à la solitude de Low, dont les parents auraient pu être brisés par leur travail. Malheureusement, Low n’est pas le seul orphelin, mais le jeu tout entier… D’autres soupçonnent que les bonbons de l’usine sont conçus avec de la chair d’enfants, ce qui ferait sens avec l’univers de la saga. Ce qui me paraît évident, c’est que les bonbons en question sont vendus dans la fête foraine, visitée lors du chapitre 3.
« Sans aucun lien, je me tiens bien »
Le meilleur chapitre du jeu, mais il y avait encore mieux à faire dans un tel décor.
Le chapitre 3 est sans doute mon favori du jeu. Il est, tout du moins, le moins lisse de Little Nightmares 3, bien qu’il y ait encore plusieurs occasions manquées. Le niveau, plus long, débute dans un lieu plutôt neutre, où Low et Alone découvrent des pantins, qui s’échappent des vitrines où ils sont exposés. Le chapitre nous permet de retrouver les Nomes, les petits êtres que l’on collectait dans le tout premier Little Nightmares. Un DLC permettait d’ailleurs de comprendre qu’ils avaient été des enfants autrefois. Ce n’est pas la seule référence aux autres jeux de la franchise. Low et Alone pénètrent dans la fête foraine, plus connue sous le nom de Carnaval. Les pantins y vivent et y travaillent. Ils ont la même attitude que les sales gosses, dans Little Nightmares 2. Les clients du Carnaval, adultes et obèses, rappellent ceux de la Dame, dans l’Antre du premier jeu. D’ailleurs, des poupées de la Dame sont dissimulées, ici et là dans le chapitre. On pourrait émettre des théories, mais je crains que – une fois de plus – il s’agit plus d’un lien fragile et maladroit qu’autre chose. On trouve, de manière générale, plusieurs autres références, comme les ballons rouges qui pourraient être un clin d’œil au clown de Ça, imaginé par Stephen King. L’antagoniste du chapitre 3 est – de loin – le plus marquant du jeu. Je devrais d’ailleurs parler de deux ennemis, puisqu’il s’agit d’un marionnettiste et de ce qui lui sert de main droite. L’homme au costume violet est surnommé The Kin, et sa marionnette, Mini Kin. Bien qu’elle agisse comme un animal de compagnie, lorsqu’elle demande à manger ; elle semble plus pensante et agressive. Elle est par ailleurs la seule à voir. The Kin, comme beaucoup d’autres adultes du jeu, est dépourvu d’yeux. Le Carnaval raconte implicitement une histoire. Il rappelle beaucoup la fête foraine du conte Pinocchio, où les enfants sont changés en ânes, puis exploités. Le marionnettiste semble emprisonner les enfants puis les forcer à se donner en spectacle. La rumeur prétend qu’une des affiches décorant le niveau dévoile que Low a lui-même été exploité par The Kin, autrefois. Dans la mesure où l’on a déjà vu le petit garçon cloîtré dans un lit d’hôpital : on peut se demander s’il rêve ou s’il revit les traumatismes de son passé. Cela semble assez logique, puisque, après s’être échappés à l’aide d’une montgolfière, Low et Alone arrivent dans l’Institut.
Une thérapie peu conventionnelle
Le psy garde un œil sur Low.
L’Institut présente un changement radical d’ambiance. La plage qui le borde rappelle étrangement l’entrée de Pale City, dans Little Nightmares 2. Le bâtiment tombe en ruines, mais ne manque pas de végétation. Les chambres d’asile laissent deviner que Low a déjà séjourné ici. De toute évidence, les enfants qui y sont restés sont décédés, puisque des fantômes sont dissimulés, ici et là, dans le chapitre. Ce dernier introduit une nouvelle mécanique de jeu intéressante car Low retrouve, dans son ancienne chambre, une poupée à l’effigie d’Alone. Cette peluche permet de raviver le passé, puisque sa lueur rend les lieux comme ils étaient avant de s’effondrer. On comprend, par la même occasion, qu’Alone n’est sans doute que le fruit de l’imagination de Low. Les adversaires basiques sont moins innovants. Le personnel de l’Institut essaie de proposer une scène plongée dans la pénombre, aussi effrayante que celle des Mannequins dans l’hôpital de Little Nightmares 2, sans succès… Le boss final du jeu n’est pas un serpent, comme on le penserait de prime abord, mais un psy au bras long. Cet antagoniste, surnommé L’Hypnotiseur est si gigantesque, qu’il semble condamné à se faufiler dans les ruines de l’Institut. Ses jambes et ses bras sont disproportionnés et son visage est – sans surprise – dénué d’yeux. C’est quand il ouvre ses mains que l’on découvre que les yeux de l’Hypnotiseur sont placés dans ses paumes. Il s’agit probablement d’une référence au Pale Man, dans le génialissime Labyrinthe de Pan, de Guillermo Del Toro. Pour se débarrasser de ce boss, il faut notamment frapper sur un Gong, à l’aide de la clé d’Alone. C’est là le signe qu’il est temps pour Low de se réveiller. Pourtant, on sent qu’Alone est réticente à l’idée de traverser le dernier miroir. Elle sait sans doute que si Low se réveille, elle disparaîtra, puisqu’elle n’est que son amie imaginaire. D’un certain côté, elle n’a plus de raison d’être, puisqu’elle a aidé Low à échapper à ses traumatismes. On peut aussi se demander si, à l’issue du jeu, Low arrivera vraiment dans un meilleur endroit. Oui. C’est là le plot twist de Little Nightmares 3. Low a fait des cauchemars tangibles et Alone n’était que le fruit de son imagination. Outre le fait que cette révélation est has been depuis des décennies, c’est, à mon sens, une insulte à notre intelligence. Supermassive Games a pris au pied de la lettre le titre du jeu, quitte à mettre en péril tout ce qui avait été bâti par Tarsier Studios. On peut, après tout, désormais douter de la réalité de l’Antre ou de Pale City…
Pour aller plus loin…
Alone a été vidée de son essence, comme le jeu tout entier…
Little Nightmares 3 est, a posteriori, un peu moins vide qu’il ne le laissait paraître. Mon analyse du jeu est plus longue que je ne le présageais. Il n’y a toutefois rien de bien croustillant à se mettre sous la dent, surtout si on compare cet article au dossier complet que j’avais pu faire sur Little Nightmares 1 et 2. Ce dernier opus est une déception, en terme de narration, comme de gameplay. Non seulement, on n’est pas mal à l’aise, mais en plus, on s’ennuie. Le titre manque de mystères, de dangers et de véritables innovations. Il va même à reculons puisqu’il présente des problèmes de profondeur, ou de saut, qui avaient déjà été corrigés dans Little Nightmares 2. Le jeu est très court. Si vous êtes restés sur votre faim, il faudra attendre l’été et l’hiver 2026 pour avoir accès aux deux chapitres du DLC nommé : Les secrets de la spirale. En attendant, si vous êtes curieux d’en apprendre plus sur l’univers instauré par Little Nightmares 3, il existe des produits dérivés, à commencer par un Podcast, notamment disponible sur Deezer. Le bruit des cauchemars est une conversation entre une fillette appelée Nonne et le docteur Otto. Nonne parle de ses mauvais rêves, dont l’un se déroule dans le Carnaval du chapitre 3. Étonnamment, les cauchemars de la patiente éveillent des souvenirs douloureux au psychologue, qui a perdu sa petite sœur autrefois. On peut par ailleurs se demander si Otto et l’Hypnotiseur ne font qu’un…
Sources


































































































































































